ATT a proposé 39 milliards de dollars pour l'acquisition de T-Mobile USA. Cet achat soulève de multiples questions tant pour les abonnés, que pour la concurrence et l'économie du secteur des deux côtés de l'Atlantique.  

Si cette acquisition est validée par les autorités de régulation américaines, la nouvelle entreprise ainsi formée aura 129 millions d'abonnés, dont 34 millions venant de T-Mobile. Ce qui placera la société en tête du marché américain devant Verizon avec 94 millions d'abonnés et de Sprint Nextel avec 50 millions de clients. Un point qui devrait simplifier la fusion : les deux opérateurs ont fait les mêmes choix en termes de technologies réseaux puisqu'ils possèdent des infrastructures GSM et ont pris la décision de migrer vers le LTE (Long Term Evolution).  Le communiqué publié par AT&T souligne d'ailleurs que la fusion des deux réseaux devrait l'amener à déployer de manière plus agressive le LTE aux Etats Unis. L'accord a été approuvé par les comités de direction de AT&T et de Deutsche Telekom, la maison mère de T-Mobile. Deutsche Telekom devrait posséder 8% de AT&T aux termes de l'accord.

AT&T récupère T-Mobile pour nettement moins cher que les 51 milliards de dollars payés par Deutsche Telekom, il y a 10 ans, en 2001. Mais l'accord n'est pas encore bouclé. De par sa taille, il va être passé au crible par les autorités de régulation américaines, la FCC (Federal Communications Commission). « 2010 a été la première année où la FCC  n'a pas estimé que le marché des réseaux mobiles était concurrentiel aux Etats Unis» rappelle Dan Frommer de Business Insider.  L'accord devrait être achevé d'ici 12 mois, ce qui est très long.

Un nécessaire besoin de fréquences

On commence à supputer sur l'impact sur le marché américain. Verizon pourrait faire une offre d'achat sur Nextel, les deux opérateurs utilisant la technologie CDMA. Les opérateurs régionaux pourraient créer un contre poids en s'associant. Le réseau d'AT&T utilise le spectre radio dans les bandes de fréquence de 850 et 1900 MHz pour des services GSM/GPRS/Edge et de plus en plus de services HSPA+, c'est-à-dire de la 3G. T-Mobile utilise essentiellement la bande de fréquences de 1900 MHz pour ses services GSM. Fin 2008, l'opérateur a commencé à déployer ses services 3G dans les bandes de fréquences de 1700 et 2100 MHz AWS. T-Mobile affirme que ses services 3G+ délivrent des débits de téléchargement jusqu'à 21 Mbit/s au lieu des 7,2 Mbit/s.

Les deux opérateurs adoptent une même démarche pour leurs services mobiles. D'un côté, ils dopent leurs réseaux 3G vers le HSPA+ et de l'autre, ils vont commencer à construire leurs réseaux LTE. C'est dans quelques mois, à l'été, que AT&T va construire son réseau LTE. La première phase de couverture nationale sera achevée en 2013. Dans une interview publiée ce dimanche, le président d'AT&T, Ralph de la Vega explique que « la première chose est que cet accord allège le défi que représente le manque de ressources radio pour les deux opérateurs. En combinant les spectres radios que nous avons respectivement, et qui sont complémentaires, cela aide réellement nos sociétés. Le deuxième point est que nous allons améliorer la qualité et de plus de capacité réseau puisque la couverture de réseau augmente. »

Les analystes ravis et les consommateurs sceptiques

Si cette fusion semble faire l'affaire des deux opérateurs, les bloggeurs américains réagissent plutôt négativement. « Une mauvaise entreprise en rachète une autre » râle Robert Scoble, pour Business Insider. « Alors qu'il s'agit d'une bonne nouvelle pour les deux sociétés, j'espère que les autorités de régulation vont retoquer cet accord » affirme Sascha Segan pour PC Magazine. Sascha Segan prédit que l'abonnement à petit prix de T-Mobile va disparaître, malgré les affirmations d'AT&T expliquant que les fusions ont permis de baisser les prix dans les années passées, et qu'il y aura moins de modèles de smartphones parmi lesquels choisir. « Pendant la fusion, on va baisser la qualité de service de la relation client au minimum » termine Sascha Segan.

Pour autant, les analystes saluent cette opération « il y avait trop d'acteurs, cela donnera un peu plus de place au troisième opérateur » explique Phillip Redman, un analyste du Gartner et d'ajouter « la FTC et la FCC vont mettre du temps pour analyser cette fusion, mais je pense qu'au final, elle sera autorisée. Il s'agira de la dernière grande fusion de ce type dans l'industrie du wireless ». Sur le plan de la concurrence, Jeffrey Kagan, analyste indépendant estime que l'acquisition ne devrait pas avoir d'effet négatif sur les prix. Jack Gold, un analyste de J. Gold Associates est plus pessimiste « certes il y aura une amélioration de la couverture réseau, mais avec une concurrence plus limitée, les prix vont augmenter ».