A peine quelques jours après l'annonce de 540 suppressions de postes chez HP France, Oracle France a dévoilé à son tour en début de semaine un plan de réduction d'effectifs. Cette fois, ce sont 250 postes qui sont menacés dans le cadre d'un projet européen qui prévoit de couper 850 à 1 000 postes. 15,6% de l'effectif français est touché. Sur l'Europe, ces réductions correspondent à 5 ou 6% des effectifs globaux, sur 17 000 collaborateurs. La semaine précédente, l'éditeur américain, champion de la croissance externe, avait annoncé des résultats financiers meilleurs que prévu sur son année fiscale (malgré des ventes de licences en recul de 13% sur le dernier trimestre). Mais l'un des points notables de cet exercice, c'est bien le niveau de la marge opérationnelle qui atteint 51% sur un chiffre d'affaires de 23,25 Md$ (+ 3,7 %). Une marge bien supérieure, par exemple, à celle réalisée par d'autres acteurs du secteur, comme SAP (24,6% en 2008). En mars dernier, à l'issue de son troisième trimestre fiscal, pour prouver sa bonne santé, la société de Larry Ellison a versé pour la première fois des dividendes à ses actionnaires. Le rachat de Sun toujours pas entériné La marge d'Oracle a « constamment progressé ces dernières années, ce qui a permis à la société de financer tous les rachats qu'elle a effectués », fait remarquer Franck Pramotton, délégué syndical national CFDT Oracle. La dernière opération en date de l'éditeur est le projet d'acquisition de Sun, pour 7,4 Md$, un dossier toujours en phase d'examen par le département américain de la justice. Un an et demi plus tôt, Oracle avait déboursé pas moins de 8,5 Md$ pour mettre la main sur Bea. Entre temps, il a absorbé de nombreux autres éditeurs pour des montants moins élevés. Si le rachat de Sun est accepté, d'autres licenciements se profileront au niveau mondial. Préserver la marge opérationnelle Pour justifier des prochaines suppressions de postes en Europe, Oracle a argué d'une prévision de croissance « significativement inférieure » à ce qu'il attendait. Selon le blog de la CFDT Oracle, la société avance aussi qu'elle souhaite préserver sa marge opérationnelle pour pouvoir maintenir sa stratégie à long terme, c'est-à-dire ses efforts en recherche et développement et sa politique de croissance interne et externe. Pour le délégué syndical CFDT, les filiales d'Oracle paient le prix fort lors des rachats, ce qui conduit à creuser les déficits. Franck Pramotton rappelle que la filiale française d'Oracle ne paie pas d'impôts sur la société depuis six ans, puisqu'elle ne déclare aucun bénéfice, les mécanismes d'exonération fiscale permettant d'avoir des filiales déficitaires et une maison mère bénéficiaire. Outre la problématique d'équité vis-à-vis des moyens apportés aux salariés, le représentant du personnel considère que « cela a pu, par le passé, servir d'argument au lancement de plans sociaux pour procéder à des ajustements structurels ». Le plan social annoncé cette semaine en Europe est le deuxième de l'année pour Oracle. Lors du premier projet, la France n'avait pas été touchée. La semaine dernière, Christian Estrosi, nouvellement nommé au poste de ministre chargé de l'Industrie, avait appelé Yves de Talhouët, PDG de HP France pour le rencontrer au sujet des licenciements annoncés. A l'issue du rendez-vous, il avait indiqué qu'il veillerait à ne pas faire d'ingérence dans le dialogue social entre la direction d'HP et ses salariés. Les paris sont ouverts pour savoir si Christian Estrosi jugera utile d'appeler également Pascal Dumontet, DG d'Oracle France.