Tout va bien pour le monde Itanium. La croissance est là, les clients sont heureux, les processeurs sont remarquables et IDC prédit un futur radieux. Alors pourquoi ne pas rejoindre l'alliance des vainqueurs et acheter des serveurs d'entreprises standards HP, comme tout le monde le fait. Ceux qui ont suivi la conférence commune que tenaient hier sur le Web les patrons d'HP, Intel et Oracle, seront sans doute reparti avec une petite impression de surréalisme. Certes, si l'on en croit Mark Hurd, les ventes de systèmes à base d'Itanium ont bondi de 90% l'an passé dépassant très largement la croissance des ventes de systèmes à base de puces Power ou Sparc. Mais Hurd se garde bien d'expliquer que cette croissance a deux explications essentielles qui n'ont pas grand chose à voir avec un attrait soudain des clients pour la plate-forme. Tout d'abord, les ventes de systèmes Itanium partent de très bas, les taux de croissance ne veulent donc pas dire grand chose. Ensuite, HP a abandonné le développement de ses systèmes PA-Risc et orchestre la bascule de ses clients vers l'Itanium. Itanium prend donc progressivement la place des systèmes PA-Risc, ce qui est bien un minimum pour HP. Hurd s'est d'ailleurs bien garder de citer les chiffres IDC qui fâchent, notamment le fait que près d'un tiers des clients HP se refuseraient à basculer vers Itanium. Sur ce tiers, près de 36% migreraient vers le Xeon, 25 %, vers l'Opteron, 25% sur Sparc et 11% sur Power (au total HP ne conserverait comme clients que 22% des clients refusant de migrer vers Itanium)... Le discours d'Intel sur le sujet reste quant à lui toujours aussi surréaliste. Itanium est un standard du marché se plait à répéter Paul Otellini, le patron de la firme. Comment prendre une telle déclaration au sérieux lorsque l'on sait que les ventes de puces Sparc sont par exemple dix fois supérieures à celle de l'Itanium. En fait, l'exercice d'hier visait surtout à rassurer la base installée HP. "je veux que vous dormiez sur vos deux oreilles en sachant qu'il y a une énorme énergie et de considérables sommes d'argent investies dans [Itanium]" a ainsi expliqué Hurd. HP s'est engagé à dépenser 1 Md$ par an dans Itanium pendant cinq ans. Les autres acteurs de l'écosystème EPIC devraient quant à eux apporter la même somme pendant cinq ans. Ce qui permet à Intel de s'engager sur une roadmap de quatre générations de puces d'ici l'horizon 2010. En attendant les prochains développements, HP se retrouve contraint de lancer sa nouvelle génération de serveurs Integrity avec l'actuelle puce Itanium Madison. Intel a en effet pris près de neuf mois de retard sur la livraison de Montecito, le premier Itanium bi-coeur qui devait à l'origine motoriser la 3e génération de serveurs Itanium HP. Du fait de leurs performances, ces nouveaux serveurs devraient permettre à HP de séduire une large partie de sa base installée PA-Risc. De là à les rassurer sur les capacités d'Intel à tenir ses promesses en matière de roadmap Itanium...