Elles sont rares les entreprises à accepter de témoigner sur leurs problèmes avec le Crédit impôt recherche. Infotel fait partie de ces exceptions. En publiant ses résultats semestriels fin août, la société avait mentionné une provision de 800 000 euros pour un redressement que lui inflige l'administration fiscale sur le CIR.  Cette provision correspond au tiers de la somme que réclame le fisc : 2,5 millions d'euros (ME).

Infotel a recours au CIR depuis 2005. Elle est redressée en 2013 pour les années 2009, 2010, 2011. Un redressement qui demande à la société de passer des jours avec les contrôleurs, de produire les documents remontant à plusieurs années  et de se mettre à leur disposition, au plus haut niveau pour s'expliquer.

Ce qui est intéressant dans ce dossier, outre les sommes en jeu, c'est le fond. Infotel exerçant deux activités, celle d'éditeur et celle de société services, le CIR n'a pas le même effet dans les deux cas. Autant l'activité d'édition peut assez facilement se retrouver dans le cadre du CIR, autant celle de services est plus difficilement intégrable. C'est du moins la critique portée par nombre de contestataires du processus qui reprochent aux ESN (ex SSII) d'exagérer et de tirer parti trop facilement du CIR.

Les services informatiques sur la sellette


Infotel , pour son activité d'édition, n'est donc pas remise en cause par le fisc, en revanche pour la partie services elle l'est, et cette contestation aboutit au redressement.   Or, explique Michel Koutchouk directeur général, « nous avons passé du temps à remplir notre dossier. Une demande de CIR c'est 150 pages à remplir. Nous sommes aidés par un cabinet spécialisé. Nous avons donc suivi toutes les demandes de l'administration et respecté son processus. Je rappelle également que les services informatiques sont parfaitement intégrés dans le concept de R&D, c'est clairement défini par le manuel de Frascati, un document de l'OCDE qui fait foi dans ce domaine ».

Infotel conteste donc le fond, le fait que la notion de services informatiques ne soit pas, ou ne soit plus, admise par le fisc dans la R&D. Elle conteste évidemment la somme en jeu. Un cabinet d'avocats porte cette contestation. Et au-delà des faits, Michel Koutchouk s'étonne de la méthode. Du fait qu'un dossier de cette taille soit remis en cause des années après : « on nous reprend d'une main ce qu'on nous a donné de l'autre ». Il déplore le manque d'expertise du redressement en cours, la R&D en entreprise n'est pas comprise par l'administration et ses contrôleurs. « C'est même une remise en cause du CIR par l'administration ».

Comme un malheur n'arrive jamais seul, l'URSSAF a également contrôlé et redressé Infotel(*), une double inspection qui est devenue, si l'on ose l'écrire, monnaie courante. En tout cas, Infotel ne se laisse pas intimider : « Nous sommes sûrs de notre bonne foi, nous irons jusqu'au bout » souligne Michel Koutchouk. 

 (*) L'URSSAF a envoyé une "proposition" de rectification de 676 000 euros principalement composée de la remis en cause de primes de repas attribuées à ses salariés consultants. Infotel conteste la totalité de cet autre redressement mais n'a pas constitué de provision.