L'Afdel (Association Française des Editeurs de Logiciels et Solutions Internet) et le Syntec Numérique ont de la suite dans les idées. Les deux syndicats patronaux replacent dans l'actualité la possibilité que leurs membres puissent bénéficier de manière plus large du Crédit Impôt-Recherche (CIR), ce qu'ils ne cessent de réclamer depuis dix ans au moins.

Le CIR est un dispositif fiscal avantageux dont le coût pour la collectivité est évalué à plusieurs milliards d'euros depuis sa création. Tous les ministres, de droite comme de gauche, ont jusqu'à présent toujours refusé. A l'occasion du changement de majorité, l'Afdel et le Syntec diffusent une lettre ouverte et mettent en avant l'argument du numérique que l'on étouffe en France.

Cette missive laisse également transparaître un léger agacement à l'égard du rééquilibrage envisagé du dispositif fiscal du CIR en faveur des PME et surtout des TPE. Les taux seraient plus avantageux, les remboursements du crédit plus fréquents pour soutenir la trésorerie, etc. L'Afdel et le Syntec répètent pourtant de manière récurrente combien les petits sont dans le même « écosystème » que les grands acteurs qui sont membres de ces deux syndicats patronaux.

Le sens du calendrier


Le moment est également bien choisi : le Crédit Impôt-Recherche (CIR) est actuellement en cours d'évaluation. D'une part, le sénateur de l'Essonne Michel Berson, apparenté socialiste, vient de remettre à la ministre de l'Enseignement Supérieur et de la Recherche, Geneviève Fioraso, son rapport sur le sujet mais sans avoir auditionné ni l'Afdel ni le Syntec Numérique. Ce qui a du faire grincer quelques dents.  D'autre part, la Loi de Finances 2013 va bientôt arriver en discussion au parlement. Cette loi serait le cavalier législatif idéal pour étendre le CIR.

Le CIR est un dispositif fiscal particulièrement intéressant mais ciblé. Son objectif est de financer la recherche. Il couvre notamment le salaire des doctorants ou les frais de construction des laboratoires. Le CIR concerne en premier lieu la recherche appliquée devant normalement déboucher sur des dépôts de brevet.

Son esprit est loin d'une prestation en régie d'ingénieurs de société de service informatique dans le cadre d'un développement logiciel, même si celui-ci peut être innovant et au bénéfice d'entreprises engagées dans la concurrence internationale. L'écriture d'un logiciel appliquant des principes de programmation bien connus n'est pas de la recherche.

Le CIR bénéficie déjà au numérique


Or, le CIR bénéficie déjà aux entreprises du numérique. A la seule condition que ces entreprises fassent effectivement de la recherche. Des firmes américaines comme Google et Microsoft ont implanté en France des laboratoires afin de bénéficier du très avantageux CIR. Des réussites franco-françaises comme Criteo ou Exalead en ont également bénéficié.

L'Afdel et le Syntec Numérique se plaignent sans doute à juste raison des divergences d'interprétation opposant l'administration fiscale et les entreprises sur ce qui est ou non de la recherche. Il serait bienvenu de préciser la frontière. Une voie de circulaire ministérielle pourrait convenir. De même, réclamer, comme le font les deux syndicats patronaux, que les experts sollicités en cas de litige avec l'administration fiscale connaissent le domaine informatique spécifique (l'algorithmie, les télécoms, ...) parait aussi justifié. Mais il faut admettre que le jeu consiste aussi pour les entreprises à tenter de décrocher un maximum de niches fiscales.

Les deux associations, anticipant un nouveau refus ministériel prévisible, réclament également un Crédit Impôt-Innovation. Changer le nom d'une niche fiscale pourrait permettre d'en bénéficier, mais à l'heure de la lutte contre les déficits publics, il n'est pas sûr que l'initiative soit mieux accueillie par le gouvernement.