En 1997, IBM avait fait une percée avec Deep Blue, qui était parvenu à vaincre le champion mondial d'échecs Gary Gasparov. En 2011, la société revient à la charge avec un autre ordinateur, Watson, nommé en l'honneur du fondateur d'IBM, Thomas J. Watson.

Cette fois-ci, l'ordinateur se mesurera aux deux plus grands gagnants de l'histoire de Jeopardy, soit Ken Jennings et Brad Rutter. Ken Jennings détient le record du plus grand nombre de parties consécutives gagnées à Jeopardy, soit 74. Ses gains à vie se chiffrent à 2,5 millions de dollars. Brad Rutter détient quant à lui le record des gains à l'émission, soit 3,2 millions de dollars.


Ken Jennings et Brad Rutter, les deux lauréats du jeu Jeopardy

Autopsie d'un superordinateur

Le Watson est particulièrement impressionnant. Cet ordinateur est composé de 10 racks contenant chacun 9 serveurs Power 750 montés en réseau. Chaque serveur, dont la valeur se chiffre à environ 300 000 dollars, possède 32 coeurs qui peuvent gérer un total de 128 tâches en parallèle. L'ordinateur dans son ensemble compte 2 880 coeurs, peut effectuer 11 520 tâches en parallèle, possède une mémoire vive de 15 000 gigaoctets (Go) et une puissance totale de 80 téraflops. Selon les dirigeants d'IBM, ces performances placent Watson dans le Top 100 des ordinateurs les plus puissants au monde en ce moment.

À titre comparatif, Deep-Blue avait une puissance totale de 1 téraflop et celle de la salle des serveurs de l'usine d'IBM Canada à Bromont frôle les 4 téraflops. Pour chaque téraflop de puissance, un ordinateur peut effectuer mille milliards d'opérations à la seconde.

Une intelligence artificielle de plus en plus fine

Si le matériel qui compose Watson est imposant, le vrai défi pour l'équipe d'IBM fut tout autre qu'avec Deep Blue, selon Éric Paradis, spécialiste consultant en technologies de l'information chez IBM Canada à l'usine de Bromont. « En matière de logiciel, les échecs, c'est relativement simple. Avec Deep Blue, en 1997, il s'agissait surtout d'un exploit matériel. Il s'agit d'une planche de 64 cases avec des règles et des pièces qui ont toutes un rôle limité. L'algorithme était assez simple: à chaque coup, il fallait prévoir le prochain mouvement de l'adversaire et ensuite établir quel serait le meilleur mouvement à partir de toutes les combinaisons possibles », dit-il.

Dans le cas de Watson, le défi est de traiter le langage naturel. L'ordinateur est équipé d'une série d'algorithmes qui ont nécessité plusieurs années de recherche et même certains partenariats avec des universités. M. Paradis précise que contrairement à la croyance populaire, Watson n'entend pas et ne peut donc reconnaître la voix. Il reçoit les questions en texte, de même que les réponses de ses concurrents. À défaut d'entendre, il doit donc comprendre les questions : « Les questions de Jeopardy peuvent contenir des jeux de mots, des farces, des doubles sens... Par exemple, si vous cherchez Mercury dans un moteur de recherche Internet, vous pouvez obtenir des résultats sur un métal, sur une planète, sur une vieille marque de voitures et même sur le chanteur Freddy Mercury. Un seul mot peut donc avoir différents sens, ce qui rend le défi de la compréhension très complexe », dit-il.


Entretien réalisé par Denis Lalonde, rédacteur en chef du magazine Direction informatique.