La nouvelle a été confirmée hier après-midi. Les magasins Surcouf ont été placés en liquidation judiciaire, faute d'avoir trouvé un repreneur. Après 20 années d'existence, l'enseigne créée par Olivier Dewavrin et Hervé Collin devra donc fermer les portes de ses six magasins le 30 novembre et licencier les 380 personnes qu'ils emploient. Chez les salariés de l'entreprise, qui étaient déjà informés hier de l'absence de repreneur, c'est l'écoeurement et le sentiment d'un énorme gâchis. Plus que la crise, certains n'hésitent pas à expliquer le mauvais scénario qui se déroule sous leurs yeux par la « gestion calamiteuse » d'Hugues Mulliez, le propriétaire de Surcouf.

Un jeune entrepreneur dynamique

En 2009, le petit neveu du fondateur d'Auchan fait l'acquisition des magasins Surcouf en les rachetant au groupe PPR qui les avait lui-même repris en 2000. A l'époque, Hugues Mulliez est également propriétaire des magasins Youg's qu'il fera ensuite fusionner avec Surcouf. L'opération semble être alors une bonne affaire pour le jeune entrepreneur. Surcouf accuse, certes, un repli constant de son chiffre d'affaires (225 M€ en 2008) depuis plusieurs années et deux années de pertes nettes consécutives. Mais PPR aurait accepté de céder sa filiale de distribution d'Electronique grand public pour 1 € symbolique tout en dotant la mariée de 50 M€ pour éponger ses dettes et de 20 M€ pour faire évoluer son système informatique. Pour Hugues Mulliez, c'est, pense-t-il, le point de départ d'une aventure qui doit donner naissance à un groupe doté de 8 magasins et de 700 salariés qui réaliseront 300 M€ de chiffre d'affaires.

Du rêve à la réalité

A l'aune de la liquidation judiciaire prononcée aujourd'hui, ces projets ont donc fait long feu. Surcouf n'a jamais été en mesure de les mener à bien sous l'ère d'Hugues Mulliez. En mai 2010, un conflit éclate entre la direction et les salariés. Celle-ci souhaite modifier le mode de rémunération de plus de 300 d'entre eux (sur 550 environ) avec pour effet de baisser globalement les salaires de 10 à 30% selon les intéressés. Plus de 170 salariés qui n'ont pas acceptés cette mesure ont été licenciés. Prise pour redresser la situation financière du groupe, cette évolution du mode de calcul de la rémunération et les nombreux départs qu'elle a entraîné n'a pas porté ses fruits. En 2010, l'enseigne réalise 168 M€ de chiffre d'affaires, contre environ 200 M€ l'année précédente, et perd 20 M€. En mai 2011, la direction de Surcouf annonce la fermeture de deux des neufs magasins (Strasbourg et Belle-Epine) qu'il exploite. La situation économique de l'entreprise a pris une telle tournure qu'une recapitalisation de 20 M€ est rendue nécessaire en octobre 2011. Cela s'avérera loin d'être suffisant pour redresser la barre puisque Surcouf se déclare en cessation de paiement à la fin février 2012 et est placé dans la foulée en redressement judiciaire.

Surcouf invendable, ni en partie ni en totalité

Une partie des meubles auraient peut-être encore pu être sauvée si le plan de cession partielle proposé par la direction de Surcouf et accepté par le tribunal de commerce avait porté ses fruits. Le plan d'Hugues Mulliez consistait à céder trois magasins (Lille Molinel, Paris Haussmann et Bordeaux Mérignac) et à recentrer son activité autour du magasin historique de Daumesnil à partir duquel les autres magasins et le site web seraient approvisionnés en marchandises. Problème, les acquéreurs sont loin de s'être précipités sur l'offre de la direction de Surcouf. Face à cet échec, le tribunal de commerce a pris la décision d'étendre le plan de cession à l'ensemble des magasins de l'enseigne. Là encore, les repreneurs ont été aux abonnés absents, laissant aujourd'hui le navire Surcouf sombrer.