En direct de San Francisco - « Le modèle actuel d’informatique sur site est intenable », a tout simplement posé Mark Hurd, CEO d’Oracle, dès les premières minutes de sa keynote lundi matin sur OpenWorld 2015 (25-29 octobre, San Francisco). Si l’on en doutait encore, cela établit clairement qu’Oracle voit son futur et sa survie dans le cloud. Les entreprises luttent pour durer et réduisent leurs coûts de structure, a rappelé Mark Hurd en l’illustrant par l’index S&P500, tandis qu’elles dépensent beaucoup pour sécuriser la IT et se conformer aux contraintes réglementaires, deux domaines dans lesquels le cloud apporte une réponse, selon lui. De surcroît, en 2020, 50% des effectifs seront des « millennials », nés après 80. « Les gens travaillent différemment ». C’est pour toutes ces raisons que le cloud est si important, a insisté le dirigeant. Il n’est plus seulement question d’opex et de capex, il faut réduire la complexité de l’environnement pour accélérer l’innovation. Ce discours du CEO, déjà en partie entendu à Paris le mois dernier, a cette fois-ci été complété de 5 prédictions autour du cloud d’ici 2025. 

Dans 10 ans, 80% des applications utilisées par les entreprises pour leur fonctionnement seront dans le cloud alors que le SaaS représente aujourd’hui 24% du marché et que 85% des applications sont maintenant conçues pour le cloud. A cet horizon, deux fournisseurs de suites applicatives se partageront 80% du marché des applications SaaS. Oracle est bien sûr sur les rangs pour occuper l’une de ces deux places, Mark Hurd soulignant que cela nécessitera un vaste portefeuille d’offres « best of breed » et que celui d’Oracle a été presque entièrement réécrit pour le cloud. Il n’a pas précisé qui pourrait occuper la 2ème place, mais « il lui faudra une suite SaaS complète », a-t-il pointé un peu plus tard lors d’un point presse. « Cela nous a pris 10 à 12 ans pour arriver où nous en sommes », a-t-il rappelé. La veille, Larry Ellison, CTO d'Oracle, avait cité Microsoft comme acteur couvrant lui aussi les trois couches du cloud avec ses propres technologies, SaaS, PaaS et IaaS.

Après quelques années affichées de scepticisme sur le cloud, notamment par le truchement de son co-fondateur Larry Ellison, en rivalité verbale avec Salesforce, Oracle se voit maintenant en haut de l'affiche.

Un cloud entièrement chiffré par défaut

Le CEO prédit ensuite que 100% des nouveaux développements et tests se feront en ligne en 2025 (un domaine qui représente 30 à 40% des dépenses IT). Sa 4ème prédiction porte sur les données des entreprises. D’ici 10 ans, elles seront pratiquement toutes stockées dans des clouds, en partie à cause du développement de l’IoT. Enfin, en 2025, les clouds constitueront les environnements les plus sécurisés. Et Oracle en est déjà là, selon Mark Hurd. La firme utilise ses propres technologies pour sécuriser ses environnements en ligne, avec des données entièrement chiffrés par défaut, qu'elles soient en mouvement ou stockées. Si d’aventure, le gouvernement américain réclamait des données clients à Oracle, l’éditeur ne transmettrait rien sans une décision de justice et, de toutes façons, ne fournirait que des données chiffrées, incompréhensibles, a expliqué Mark Hurd. Concernant la protection des infrastructures, les entreprises attendent souvent plus de trois mois pour appliquer les correctifs de sécurité, alors qu’ils sont immédiatement installés dans le cloud.

Comme l’avait déjà laissé entendre la veille Larry Ellison, en ouverture d’OpenWorld 2015, les questions de sécurité vont être au coeur des préoccupations d’Oracle. C’est d’ailleurs l’un des thèmes que le Chief Technical Officer va aborder dans son 2ème keynote de la semaine, prévu ce mardi après-midi. Dimanche, il avait insisté sur le fait que les fonctions de sécurité devaient être activées en permanence (« always on ») et qu’elles devaient être intégrées dans les infrastructures au plus bas niveau possible. De fait, Oracle a annoncé l’an dernier qu’il allait le faire au niveau du processeur, parlant alors de « Software in Silicon ». Cela se concrétise avec l’arrivée du Sparc M7, processeur entièrement conçu par la société depuis le rachat de Sun Microsystems en 2010 et qui embarque des fonctions pour protéger bases de données et applications. « Il est très difficile de pirater du silicium », a pointé Larry Ellison ce dimanche. En particulier, le Sparc M7 protège la mémoire des programmes malveillants en les empêchant de l’approcher. La technologie développée s’assure qu’une application n’accède qu’à la portion de mémoire qui lui a été allouée, ainsi que l’a expliqué lors d’un point presse Marshall Choy, directeur des solutions systèmes chez Oracle. Le processeur, cadencé à 4,1 GHz avec 32 coeurs (contre 12 sur le M6) et un cache par coeur multiplié par quatre par rapport au M6, va être présenté à la fois par Larry Ellison et John Fowler, vice-président responsable des systèmes chez Oracle, entre mardi et mercredi. La capacité de transfert de sa mémoire est également doublée.

En attendant les présentations officielles de Larry Ellison et John Fowler, vétéran de Sun Microsystems, Marshall Choy, directeur des solutions systèmes, est venu répondre à quelques questions sur le Sparc M7, fruit de sept années de travail. Outre une efficacité optimisée avec la version 12c de la base de données, il accélère la décompression des données lors des analyses en temps réel et présente de façon générale des performances nettement améliorées par rapport au M6 que les données soient ou non chiffrées. (crédit : LMI)

Des annonces IaaS au programme

Enfin, en conclusion de son keynote, Mark Hurd a aussi rappelé que les applications on-premise n’allaient pas disparaître. En 2025, il y en aura toujours, d’où l’importance de pouvoir utiliser les mêmes standards pour les applications sur site et en ligne, afin de pouvoir faire migrer les tâches que l’on veut d’un environnement à l’autre. Lors du point presse, au cours duquel il a présenté rapidement les différentes évolutions du portefeuille applicatif SaaS (*) et PaaS (**), le CEO a fait remarquer l’arrivée du service Data Integration qui servira à faire travailler ensemble les logiciels sur site et en ligne. « La migration vers le cloud se fera de façon modulaire », a-t-il indiqué en soulignant que les logiciels SaaS bénéficiaient de trois mises à jour fonctionnelles par an. « Les entreprises pourront également étendre les fonctionnalités d’une application cloud en développant leurs propres extensions, tout en bénéficiant des évolutions fonctionnelles des mises à jour régulières », a-t-il conclu.

En retraçant la stratégie cloud de sa société, Larry Ellison avait expliqué la veille comment Oracle était parti du SaaS pour s'apercevoir qu'il lui fallait obligatoirement mettre en place un PaaS pour que ses clients puissent étendre leurs applications en ligne et les intégrer avec d'autres logiciels SaaS, ainsi qu'avec leurs solutions on-premise. « Si nous voulions être dans le business SaaS, il nous fallait aussi être dans le business PaaS. Et puis, nous avons réalisé que si nous voulions être dans le PaaS, il nous fallait aussi être dans l'infrastructure as a service, parce que si les gens veulent utiliser notre base de données dans le cloud, ils ne le feront pas seulement avec nos applications. Il faut préserver les investissements des entreprises qui veulent aller dans le cloud ». Des annonces dans le domaine du IaaS sont prévues au programme du mardi d'OpenWorld 2015. Dimanche, Larry Ellison avait cité Amazon Web Services comme l'acteur de référence sur le IaaS et précisé son intention qu'Oracle soit toujours dans la roue d'AWS pour la tarification des services, voire moins cher.

(*) Oracle Supply Chain Management Cloud (Planning Central, Manufacturing Cloud, évolutions sur Order Management), ERP Cloud (Financials, Procurement, Project Portfolio Management), HCM (Learning).

(**) WebLogic Server 12.2.1 et Coherence 12.2.1, BPM Suite, WebCenter, Developer Tools, Data Integration et Visual Analyzer.