Si certains accusent Internet de tous les maux, de la disparition de l'industrie culturelle au réchauffement climatique en passant pas la chute d'un pot de fleur sur un passant, d'autres y voit la solution à tous les problèmes, même ceux auxquels personne n'avait pensé. Cette dernière tendance est nommée le « solutionnisme technologique » par l'essayiste, chercheur et éditorialiste Evgeny Morozov. Né en Biélorussie, il a vécu à Berlin et est désormais installé aux Etats-Unis. Cela ne l'empêche pas de critiquer fortement certaines tendances malsaines que l'on rencontre dans la Silicon Valley.
En 350 pages, il détaille ainsi la tendance à confondre le joujou technologique et la solution à un problème réel. Il s'agit donc bien de se poser la question du sens avant de valoriser les délires d'ingénieurs. Pour lui, certains « geeks » (ou prétendus tels) font du « défaitisme technologique », c'est à dire que la vague du numérique va tout submerger, tout changer, sans que la moindre résistance soit possible, sans que la moindre question puisse être posée.
Si les thèses défendues ici relèvent souvent de l'évidence pour qui a une petite culture philosophique, les rappeler ne peut qu'être sain. Le numérique n'est justifié que par les usages et ne doit exister que s'il améliore la situation des humains de chair et d'os. L'accumulation des exemples rend cependant le livre certes pertinent mais aussi un peu pesant à lire.
Pourquoi il faut se méfier de l'ère du tout numérique
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Dans son ouvrage « Pour tout résoudre, cliquez ici », Evgeny Morozov s'alarme de la montée en puissance d'une nouvelle forme de scientisme technologique qu'il nomme le solutionnisme.
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"Le numérique n'est justifié que par les usages et ne doit exister que s'il améliore la situation des humains de chair et d'os."
Signaler un abusOn peut en dire autant du principe de notre activité économique dont la finalité n'est que de faire croître le volume des échanges. "L'eldorado numérique" est bien de cette nature, un "gisement de croissance" comme on dit.
L'usage actuel du numérique est lié à cette pensée consumériste confondant l'être et l'avoir. Si tout est marchandise, chaque action, chaque solution, est une consommation, c'est le solutionisme marchand qui est l'instigateur du solutionisme technologique.
Il n'est donc pas question de faire du numérique un outil générique disponible en fonction de nos besoins, et permettant à notre travail et notre créativité de s'exercer, mais plutôt un catalogue de produits spécialisés, s'appuyant les uns sur les autres, dont la consommation répond à chaque fois à un "besoin". Ces besoins s'enrichissant rapidement de besoins nouveau liés aux produits eux mêmes. Chaque fois que les usages numériques étendent leur rayon d'action ils condamnent les autres méthodes à court ou moyen terme, rendant ainsi encore plus indispensable leur généralisation.
Les géants économiques qui sont à l'origine de ces produits investissent sans cesse dans cette surenchère, usant pour cela de toutes les ressources du système financier, que nous travaillons tous à pourvoir en capitaux. Il y à sujétion de la technologie à des impératifs économiques privés, eux mêmes totalement dissociées de nos besoins réels.
Travailler pour payer ses terminaux et abonnement, puis y passer la majeure partie de son temps libre, faire du numérique un monopole sans lequel notre existence même devient aléatoire, voilà le mode de vie que collectivement nous avons accepté de nous laisser imposer par l'économie de marché. Voilà à quoi nous servent ces merveilleuses inventions, à sauver un systéme et un mode pensée pour lequel la fuite en avant est la seule hypothèse de survie.