Après une longue et fructueuse période de collaboration, la relation entre Oracle et Hewlett-Packard s'est nettement détériorée, et il est difficile de trouver entre les anciens partenaires quelque chose qui n'a pas mal tourné au cours des deux années passées. Aujourd'hui, les protagonistes vont à nouveau s'affronter à coup d'arguments pour soutenir des accusations de mensonge, de trahison, d'engagements non tenus, de manoeuvre et de diffamation dans le procès qui démarre devant la Cour Supérieure du Tribunal de Santa Clara à San Jose, Californie.

HP devrait faire valoir qu'Oracle a rompu son engagement en abandonnant le développement de ses produits pour les serveurs Integrity basés sur la plateforme Itanium d'Intel. Oracle va soutenir pour sa part que cette dernière est vouée à une mort imminente. Certains témoins de haut-rang vont être appelés à la barre, à commencer cette semaine par Ann Livermore, l'ancien directeur du secteur entreprise de HP, toujours membre du conseil d'administration du groupe (en photo).

Le rachat de Sun Microsystems crée les conditions d'une situation explosive

Le différend porte sur le matériel et les logiciels qui doivent satisfaire à des charges de travail de plus en plus exigeantes. La plateforme Itanium a été développée par HP et Intel il y a plus d'une dizaine d'années. L'architecture devait répondre aux besoins en performances, en fiabilité et en disponibilité que les systèmes standards x86 ne pouvaient garantir. « La plateforme Itanium a montré qu'elle était bien adaptée aux bases de données de grande envergure, une spécialité d'Oracle », selon Charles King, analyste chez Pund-IT. « Mais Itanium n'a pas fait de nombreux émules dans le secteur des serveurs au-delà de HP. Il était donc crucial pour HP d'avoir Oracle à ses côtés et que ses logiciels, très répandus dans l'entreprise, puissent tourner sur sa plate-forme », a t-il déclaré. « Si bien que pendant de nombreuses années, HP a été un très proche partenaire d'Oracle », a ajouté l'analyste.

Mais l'avidité du géant du logiciel et sa décision d'acheter en janvier 2010 le fabricant de serveurs Sun Microsystems, techniquement en avance, mais en difficultés financières, a sans doute poussé les partenaires vers l'affrontement. Cette incursion soudaine de l'éditeur dans le secteur du hardware ne pouvait que bousculer les relations entre Oracle et les entreprises qui fabriquaient des serveurs pour faire tourner ses logiciels. Mais, dans le cas de HP, d'autres éléments entraient en jeu, créant les conditions d'une situation explosive.

L'accord « Hurd Agreement » met un terme au conflit... temporairement

En août 2010, HP pousse son PDG Mark Hurd à la démission. Celui-ci est pris dans un scandale de fausses notes de frais couvrant une relation avec une femme qui travaille pour un sous-traitant de HP. Un mois plus tard, celui-ci devient co-président d'Oracle. HP entame alors une action judiciaire contre Mark Hurd, l'accusant d'avoir violé un accord de confidentialité et cherchant à l'empêcher de travailler pour Oracle. Finalement, les deux entreprises parviennent rapidement à un accord, désigné dans le procès sous le nom de « Hurd Agreement » : HP abandonne sa plainte contre son ancien PDG et les entreprises réaffirment leur partenariat. Mais, au lieu de s'apaiser, le conflit s'envenime. En mars 2011, Oracle annonce qu'il mettra un terme à tout développement logiciel pour les systèmes Itanium.