Après avoir interrogé des chercheurs, des entrepreneurs, des élus, des autorités administratives, etc. le Conseil d'état vient de publier son rapport 2014 sur le numérique. Il se consacre en grande partie au respect des libertés fondamentales. Le numérique génère en effet à la fois de nouvelles opportunités voire étend des droits mais entraîne aussi de nouveaux risques et menaces.

Comme tout bon rapport de cet acabit, celui-ci reste aride. Après avoir étudié les évolutions des droits individuels impliquées par le numérique, les nécessités de refonte de la protection de ces droits et le besoin de soumettre le progrès technologique aux intérêts personnels et collectifs, le rapport comprend une synthèse sous la forme de cinquante propositions.

Un droit au Big Data

Et certaines propositions peuvent provoquer un certain débat si ce n'est une polémique.
Ainsi, le Conseil d'Etat propose d'instaurer une sorte de « droit au Big Data » permettant un usage libre à des fins statistiques de données personnelles sous réserve de leur anonymisation réelle. Dans le même temps, le rôle des autorités de type CNIL se verrait encore renforcé, notamment en assurant une sorte de certification de conformité des outils mis en place. Cette certification pourrait, dans les cas les plus sensibles, être obligatoire et périodique. L'automatisation de traitements de données personnelles pour prendre des décisions devrait, si les propositions du Conseil d'Etat sont validées, être nettement plus complexe. On pense notamment aux systèmes de scoring bancaire. La variabilité des prix en fonction des actions ou du profil serait également pourchassée, notamment dans le transport aérien. Côté secteur public, le Conseil d'Etat veut encourager l'open-data, pourvu que les données personnelles soient, encore une fois, anonymisées en suivant des procédures certifiées.

Par contre, la proposition 21 va sans doute faire hurler la CNIL. Cette proposition suggère en effet la création d'un identifiant national unique, ce que la CNIL a toujours cherché à éviter afin d'éviter les rapprochements inadéquats, avec une concession : cet identifiant ne devrait plus être signifiant, au contraire de notre actuel numéro de sécurité sociale (code sexe, code date de naissance, code lieu de naissance, etc.).
Des ajustements de la LCEN (Loi sur la Confiance dans l'Economie Numérique) sont également recommandés. Le caractère d'hébergeur serait ainsi pleinement reconnu à des plates-formes de services. Les pratiques numériques de la police et de la justice sont également visées par une série de mesure visant à renforcer la protection des droits des citoyens.

Prochain chantier la gouvernance d'Internet

La deuxième proposition risque de faire couler beaucoup d'encre (électronique) tant elle est ambiguë. D'un côté, le Conseil insiste sur le besoin de neutralité d'Internet mais, de l'autre, attend que des fournisseurs de contenus générant énormément de trafic (comme Google YouTube) contribuent au coût des réseaux. Enfin, le Conseil d'Etat s'attaque à un serpent de mer : la gouvernance d'Internet, encore trop américaine.