En direct de Val de Reuil - Après plusieurs reports successifs, la presse a enfin été conviée le 1O octobre dernier à une visite du datacenter Orange à Val de Reuil, près de Rouen. Cette ville nouvelle qui est l'une des neuf fondées par Georges Pompidou au début des années 70, accueille déjà les centres de calcul d'EDF et d'Altitude dans la zone d'activité Pharmaparc II à l'entrée de la ville. Le maire de la bourgade, Marc-Antoine Jamet, a profité de l'occasion pour retracer le travail réalisé avec Orange : participation au jury d'architecture, création d'un mur végétal et pas de cheminées dépassant du toit.



Le maire de Val de Reuil, Marc-Antoine Jamet, la directrice exécutive d'Orange France, Delphine Ernotte, et le directeur d'Orange Haute-Normandie, à l'occasion de la visite du datacenter le 10 octobre dernier.

La pose de la première pierre du datacenter d'Orange a été effectuée le 8 avril 2010. Trois ans après et une centaine de millions investis, Delphine Ernotte, directrice exécutive d'Orange France, nous a expliqué sur le site même pourquoi l'entreprise avait finalement choisi Val de Reuil pour poser son datacenter free cooling ou refroidissement par air. Des sites à Rennes, à Reims et dans le nord de la France avaient également été envisagés, mais le choix de la Normandie s'est imposé, car « les conditions météorologiques sont parfaites pour le free cooling et nous ne sommes pas sur une zone sismique», a indiqué la dirigeante. « La qualité de l'air - ni trop froid, ni trop chaud, ni pollué - rend le système de refroidissement très efficace avec l'air ambiant. [..] La mise en place du free cooling nous permet de réaliser d'importances économies sur le plan énergétique ». Selon la dirigeante, les économies réalisées permettraient d'alimenter en électricité une ville de 30 000 habitants pendant un an. Sur une parcelle de 18 hectares, Orange a érigé trois bâtiments pour une superficie totale de 5 000 m2 : un poste de sécurité, des bureaux et le datacenter dédié à l'hébergement informatique et au cloud. Trois autres centres de calcul - et les bâtiments associés  - pourront encore être construits sur le même terrain dans les prochaines années. Chaque bâtiment peut supporter jusqu'à 12,5 mégawatts quand toutes les salles seront remplies.

Un datacenter encore sous-exploité

Aujourd'hui quatre salles informatiques de 1 200 m2 chacune - dont deux sont actuellement actives - composent le premier ensemble du complexe. Au total 16 salles informatiques pourraient être construites sur le site. Une opération cruciale pour Orange qui a commencé à consolider ses datacenters en France pour arriver à moins d'installations en France (16 aujourd'hui avec Rennes, Aubervilliers, Paris, Lyon...) et dans le monde (une cinquantaine actuellement). Laurent Benatar, DSI et directeur technique d'Orange France, nous a expliqué que son but était aujourd'hui d'améliorer l'efficacité énergétique des datacenters existants mêmes si ce n'est pas toujours possible. « Beaucoup de nos datacenters sont installés dans des bâtiments qui étaient à l'origine destinés à accueillir des centraux téléphoniques. Il ne sera donc pas possible d'obtenir les mêmes performances qu'à Val de Reuil ». La datacenter normand fonctionne dans une plage de température comprise entre 17 et 22 degrés avec 400 baies par salle et 40 serveurs par armoire. Et jusqu'à présent, le freecooling n'a pas été pris en défaut. Un test a toutefois été réalisé cet été pour vérifier que le système de refroidissement par eau fonctionnait bien.



Même si le climat Normand est particulièrement témpéré, des climatiseurs géants sont toujours nécessaires pour assurer une témpérature comprise entre 17 et 22 degrés. Crédit Stéphane Coulon

En visitant les deux salles informatiques, on tombe sur des serveurs x86 HP Proliant de type blades mais également des System Power 795 d'IBM, pour répondre aux besoins de certains clients nous a expliqué Régis Marilleau, expert infrastructure datacenter et chef de projet extension chez Orange. Les équipements réseau reposent sur la solution QFabric de Juniper et les firewall sont fournis par BlueCoat, ce qui n'a l'air de déranger personne dans le centre. Interrogé sur l'intérêt de passer au SDN, le DSI d'Orange France nous a confié que les technologies sur le marché n'étaient pas encore matures et qu'aucun choix n'avait été fait. « Nous pensons que nos clients désirent utiliser des solutions éprouvées. Nous sommes confiants dans les capacités de nos fournisseurs, notamment VMware pour nous accompagner dans nos besoins », a ajouté sans s'étendre le DSI.

Des ressources pour Orange et ses clients

Le centre de Val de Reuil est en effet destiné aux propres besoins du groupe Orange (3 à 4 pods sont réservés au SI d'Orange), mais également à son activité infogérance et services cloud portée par OBS. CloudWatt bénéficie aussi de deux pods (une salle informatique avec 24 armoires en fait) mêmes si une seule est aujourd'hui occupée. Si des entreprises sont déjà hébergées dans le centre, Orange ne peut livrer que quelques noms pour cause de clauses de confidentialité. On saura ainsi que la société britannique Woseley, spécialisée dans la distribution de produits sanitaires, de chauffage et de canalisations bénéficie des facilités du centre. Un autre client possède une salle totalement fermée et sécurisée avec barrières infrarouges pour détecter toute présence près des grilles et son propre système biométrique. En plus des systèmes de sécurité du centre qui profitent à tous : double grillage, vidéosurveillance, capteurs de mouvement, systèmes biométriques, présence 24h/24h, pompiers au bout de la rue et, cerise sur le gâteau, un centre d'essais de la DGA tout proche avec en permanence une trentaine de gendarmes. Une quarantaine de personnes travaillent sur le centre : 20 personnes d'Orange et 20 autres pour les travaux ponctuels.



Une des deux salles informatiques en service à Val de Reuil avec les pods accueillant les batteries d'équipements. Crédit Stéphane Foulon

Dans la petite classification des datacenters, celui de Val de Reuil atteint le niveau T3+, la norme T4 est en effet inaccessible en France faute de second fournisseur d'électricité. Cinq groupes électrogènes de 2500 kW, épaulés par 600 000 litres de fuel stockés dans six citernes, permettent d'assurer le fonctionnement du centre informatique pendant 72 heures en cas de coupure de courant. Trois liens réseau avec différentes plaques raccordent le centre aux datacenters voisins (Rennes et la région parisienne) pour assurer la sauvegarde et la réplication des données.

Prêt pour le cloud hybride

Avec ce datacenter, Orange est bien armé pour accompagner la croissance du cloud public, privé et hybride (+ 46 % en 2012 pour le marché français), notamment avec son satellite CloudWatt où des passerelles sont attendue en 2014 entre les deux plates-formes techniques : VMware chez Orange, OpenStack chez CloudWatt, comme nous l'a indiqué Philippe Laplane, vice-président senior en charge de l'activité cloud chez Orange. Interrogé sur le HPC, ce dernier nous a avoué sans détour que le centre de Val de Reuil n'était pas équipé pour supporter une très haute densité de serveurs, nécessitant de grosses capacités de refroidissement.



Le toit du datacenter de Val de Reuil pourrait également accueillir des panneaux solaires pour encore améliorer le bilan carbone. Crédit Stéphane Coulon