Ceux qui ont des critiques à faire envers le cloud ne sont pas à cours d'arguments pour pointer son manque d'interopérabilité, le risque de verrouillage de la part des vendeurs, ou les dangers liés à la sécurité. Parmi eux, Vinton Cerf, l'un des pères fondateurs de l'Internet et chef évangéliste de l'Internet chez Google, compare l'état du cloud computing actuel aux premiers jours du courrier électronique.

« Aujourd'hui, le cloud computing, ressemble à l'email des années 1980. A l'époque, les choses n'étaient pas reliées entre elles, et il n'était pas possible d'échanger des éléments entre les systèmes de messagerie. Aujourd'hui, il n'est pas possible d'échanger des choses entre les clouds. C'est cela qui doit changer », a déclaré Vint Cerf, lors de la conférence Interop qui s'est tenue cette semaine. « La nécessité d'avoir des clouds capables d'interagir entre eux est de même nature, » a-t-il ajouté.

Mark Deibert, responsable de l'architecture globale au sein d'un groupe pharmaceutique - il a demandé à ce qu'il ne soit pas nommé - se dit d'accord avec l'évangéliste. « Soit le cloud va évoluer, soit il va disparaître, » a-t-il déclaré. Celui-ci penche toutefois vers l'hypothèse la plus positive. « Je crois, d'une part, que la promesse liée aux coûts va devenir un facteur de plus en plus convaincant, et d'autre part que le marché va pousser le cloud à évoluer, » a-t-il commenté. La preuve : son entreprise s'est lancée dans la création d'un cloud privé, un choix, pour, en quelque sorte, valider le concept. « C'est une opportunité pour l'entreprise de s'y mettre de manière progressive, » a-t-il poursuivi.

Une alliance avec des poids lourds

Mais comment le marché pourra-t-il forcer les vendeurs de solutions cloud à interagir entre eux ? L'Open Data Center Alliance, qui compte parmi ses membres BMW, Deutsche Bank, JPMorgan Chase, Lockheed, Marriott, Shell, Terremark, UBS, Baidu, eBay et Kraft Foods, en est un des éléments. « Depuis sa mise en place l'an dernier, l'Alliance a vu le nombre de ses membres doubler, et compte aujourd'hui plus de 150 entreprises qui représentent environ 85 milliards de dollars de dépenses annuelles en IT, » a déclaré Kirk Skaugen, vice-président d'Intel et directeur général de son groupe de datacenters.

C'est Intel qui a contribué à créer l'Alliance, mais le fabricant de puces y joue un rôle consultatif, sans droit de vote, comme l'explique le vice-président. « Les feuilles de route et les recommandations qui émaneront de l'Open Data Center Alliance seront agonistiques en terme de logiciels et de matériels, » a t-il déclaré. « Le groupe n'a pas vocation à établir des standards. Par contre, il va travailler avec des organismes existants chargés de la normalisation, comme le Distributed Management Task Force, et aider au développement des standards, » a indiqué Kirk Skaugen. « Certains membres de l'Alliance contribuent à construire la feuille de route, » a ajouté le vice-président d'Intel.

Pousser les normes pour faciliter les échanges

Intel gagne, semble t-il, à travailler étroitement avec l'Alliance, afin de mieux comprendre les besoins des utilisateurs. « Nous souhaitons être à la pointe en matière de normes, et nous voulons aussi pouvoir orienter l'industrie à mesure que celles-ci évoluent, » a déclaré le responsable d'Intel. « Notre objectif est de devancer les exigences et d'être à la pointe des propositions. » Le fondeur a créé, pour les vendeurs qui travaillent avec lui, un programme nommé Cloud Builders, qui leur permet de s'assurer que leurs produits répondent aux nouvelles exigences technologiques. Les vendeurs « essaient de réaliser en parallèle » ce qui émane de l'Alliance, a indiqué Kirk Skaugen.

La technologie processeur va traduire certains objectifs dans des réalisations comme la Trusted Execution Technology mise au point par Intel, une fonctionnalité de sécurité basée sur le matériel, qui vise à assurer que le code s'exécute dans un environnement protégé. Un autre objectif de l'Alliance sera de veiller à l'interopérabilité des clouds entre eux. « Nous voulons faire en sorte que les données puissent être protégées aussi bien au repos que pendant leur utilisation - que l'on déplace un cloud privé vers un cloud public, ou entre clouds publics», a ajouté le responsable d'Intel. Cela, tout en restant « indépendant de l'infrastructure sous-jacente du vendeur au sein de ces clouds, » a t-il encore précisé.