Depuis plusieurs mois, un marronnier revient régulièrement dans les conversations et les conférences de presse : le miracle de la nouvelle économie emmené par les Uber, Netflix, Spotify ou encore AirBnB. Toutes les industries ou activités de services (distribution, banque, assurance et même presse) semblent être subitement devenues ringardes face aux chantres de South Bay. Pas de salut hors de ce nouveau stade des relations économiques grâce au marketing collaboratif mobile dopé par un carburant unique : les consoacteurs. Salarié de la Poste le matin, chauffeur UberPop l’après midi en attendant l’arrivée des voitures autonomes qui supprimeront le dernier maillon faible de l’entreprise. 

Dans ce cœur de louanges peu de voix s’élèvent pour signaler qu’on assiste à un simple transfert de rentes et à une redistribution des marges grâce à une utilisation astucieuse - et parfois aux limites de la législation fiscale et sociale – des nouvelles technologies. Concurrent de DVD Rental aux États-Unis et de Vidéo Futur en France, Netflix propose par exemple un simple service de streaming vidéo avec un algorithme maison pour recommander des séries et des films à ses abonnés. Génial mais où est donc installée cette société qui propose son service sur le territoire français, au Luxembourg bien sûr. AirBnB, qui vient concurrencer les hôtels traditionnels avec des tarifs sans commune mesure pour des familles, a généré un tout nouveau business avec des appartements qui sont sortis du marché locatif pour atterrir sur celui beaucoup plus lucratif du meublé pour bobo, hipster ou yuccie (comme il vous plaira) en goguette. Et bien sûr, il n’est pas question de reverser de taxes d’habitation, on est dans le business 4.0 et les infrastructures urbaines (voie publique, parcs, éclairage, transports…) sont financées par tous ceux qui n’ont encore rien compris à l’économie collaborative.

Bientôt tous auto-entrepreneurs 

Vous me direz qu’aujourd’hui tous les moyens sont bons pour faire des économies et partir en vacance le plus loin possible. Pourquoi acheter ou louer une perceuse dans une grande enseigne si on peut trouver un voisin qui loue la sienne. Pourquoi acheter une voiture, si on peut emprunter celles des autres… mais au final qui seront les gentils couillons qui continueront à payer au prix fort tous ces objets de la vie courante pour les louer aux autres. Et n’oublions pas les sites de co-voiturage avec des spécialistes des allers-retours Paris-Marseille avec 4 sièges à la location dans une Clio. On assiste impuissant à une hyper marchandisation des relations sociales. Tout se monnaye.

Loin de moi, l’idée de jouer les fossoyeurs de l’innovation mais l’économie numérique s’accompagne d’un déclassement à marche forcée, doublé d’une paupérisation de certains salariés reconvertis par nécessité en auto-entrepreneurs multi-activité. La transition numérique a commencé à la fin des années 80, mais l’accélération est indéniable. Désormais aucune filière n’est épargnée. L’impact est toutefois bénéfique à l’industrie IT avec une multiplication des mètres carrés dans les datacenters, et des recherches intensives sur les algorithmes. Alors bienvenue aux uberstart-ups.