Le décret portant création d'Edvige a beau dater du 1er juillet, la colère contre le fichier recensant de nombreuses données strictement personnelles ne cesse de grandir (voir notre article présentant les enjeux du fichier et les premiers mouvements de grogne ). Après les réserves exprimées par la Cnil et divers représentants de la sphère publique au coeur de l'été, de nouvelles voix s'élèvent en cette rentrée politique. A gauche, Martine Aubry s'interroge notamment sur les dérives d'Edvige (Exploitation documentaire et valorisation de l'information générale), en particulier en ce qui concerne l'accès aux emplois de la fonction publique. Beaucoup plus ferme, François Chérèque, le secrétaire général de la CFDT, insiste : « ce fichier ne doit pas exister dans un pays démocratique ». Le syndicaliste estime que le dispositif n'a d'autre utilité que « de contrôler de manière inadmissible les citoyens de ce pays. » En fin de semaine dernière, Michel Pezet, avocat et vice-président du conseil général des Bouches-du-Rhône, publiait une tribune dans le journal Le Monde, dans laquelle il qualifiait Edvige d'« embastillement électronique ». Il appelait la gauche à « s'extraire enfin du consensus politique aberrant qui consiste, au nom de la sécurité, à sacrifier chaque jour un peu plus de la liberté de chaque individu. » La semaine dernière, toujours, l'Union syndicale des magistrats se tournait vers le Conseil d'Etat pour obtenir l'annulation du décret de création du fichier. Ce recours devant le juge suprême portait à 13 le total des procédures intentées contre Edvige devant la justice administrative. Colère à droite aussi [[page]]Les récriminations ne s'arrêtent cependant pas aux frontières de la gauche. S'il n'est guère surprenant de compter François Bayrou parmi les opposants au texte, le président du Modem appelant à un « mouvement de refus républicain », il est plus étonnant de constater qu'Edvige met aussi à mal l'harmonie gouvernementale. Ce week-end, Hervé Morin, le ministre de la Défense et président du Nouveau Centre, faisait ainsi part d'un « certain nombre de questions ». Lors des Universités d'été de son parti, il se demandait notamment s'il était « bien nécessaire de ficher les personnes jouant un rôle institutionnel, économique, social ou religieux significatif. N'y a-t-il pas là un curieux mélange des genres ? » Ce lundi, c'est au tour de la traditionnelle alliée du gouvernement, Laurence Parisot, présidente du Medef, de partager ses interrogations et de réclamer des explications à la ministre de l'Intérieur : « c'est quelque chose qui me gêne beaucoup, a-t-elle indiqué. Je suis assez troublée par ce que nous sommes en train de découvrir. Je note que nous n'avons pas été consultés alors que nous sommes concernés en tant que militants de l'entreprise. » Toutes ces critiques issues de la classe politique s'accompagnent de toujours plus de récriminations montant de la société civile. Deux pétitions s'enrichissent chaque jour de nouvelles signatures : celle du collectif Malgré tout en compte 4145, dont celles de José Bové et de Noël Mamère ; le regroupement Non à Edvige recense quant à lui 123 378 paraphes.