'La dénonciation pour les nuls'. C'est le sous-titre que le gouvernement pourrait apposer sur la page d'accueil du site qu'il vient de mettre en ligne pour offrir aux internautes la possibilité de signaler les « contenus ou comportements illicites » sur Internet. Le portail Internet-signalement.gouv.fr propose ainsi un moyen simplissime aux citoyens français pour rapporter ce qu'ils auront repéré sur le Web, et qui présenterait un caractère illégal. Un bouton 'Signaler', qui reste accessible en permanence, donne accès au formulaire de dénonciation. Il est alors possible de faire état d'un contenu ou d'un comportement « interdit et puni par une loi française ». Le gouvernement reste flou sur la description des contenus susceptibles d'être signalés : de fait, il les définit en précisant ce qu'ils ne sont pas. Il précise ainsi qu'il ne s'agit pas de mettre en lumière des propos « immoraux ou nuisibles », de régler une affaire privée ni de traiter une urgence nécessitant un appel au 17. Pour le reste, tous les contenus vraisemblablement illégaux sont les bienvenus, qu'ils aient été repérés sur un « site Internet, blog, forum », ou qu'ils prennent la forme « d'un propos sur un 'tchat' ou d'un agissement d'un 'rôdeur' anonyme sur une messagerie ». De l'escroquerie à la diffamation, en passant par la pédopornographie et le trafic d'organes, le champ des possibles est vaste. A l'issue du signalement, les informations sont traitées par la plateforme Pharos (Plateforme d'harmonisation, d'analyse, de recoupement et d'orientation des signalements) par des policiers et des gendarmes qui vérifient le caractère illégal du signalement. Ils font alors suivre le dossier aux services concernés : police ou gendarmerie nationale, DGCCRF, Interpol, etc., qui décideront éventuellement de transmettre au Parquet pour l'ouverture d'enquêtes. L'anonymat, refuge des dénonciateurs [[page]] Si le principe d'associer les internautes à la lutte contre les crimes comme la pédopornographie peut paraître légitime, la généralisation à toutes les activités illégales risque de faire grincer des dents. D'abord parce que les pouvoirs publics se déchargent d'une partie de leur mission - la constatation des infractions - sur les citoyens. Ensuite, et surtout, parce que le portail fait la part belle aux dénonciations anonymes : l'identification n'est qu'une « possibilité », « pas obligatoire » ; les signalements sont traités avec la même importance, qu'ils émanent d'une source anonyme ou nommée. Paradoxe quand, dans la rubrique 'Internet prudent', le site précise que « la prudence sur Internet, c'est aussi [...] se méfier du sentiment d'anonymat ». Une piqûre de rappel contre le téléchargement illégal Parmi les autres bons conseils distillés par le site, signalons également quelques allusions faites au téléchargement illégal. Toujours dans un souci de prudence, il est donc recommandé de « résister aux tentations du téléchargement ». Il convient aussi de se méfier du 'peer to peer', un protocole sur lequel « la plupart des films et des musiques téléchargeables sont protégés par des droits d'auteur ». Un système qui « prive les artistes du juste revenu de leur travail et nuit à la diversité de la création artistique ». Ultime conseil, adressé aux enfants : « Supprime, sans les ouvrir, les mails que tu n'as pas demandés ou qui te sont envoyés par des personnes en qui tu n'as pas confiance. » Rappelons que le mécanisme de la riposte graduée prévoit l'envoi de courriels destinés à encourager les 'pirates' à mettre fin au téléchargement illicite. Des courriels justement non sollicités...