Martin Rogard, directeur de Dailymotion, et son directeur juridique et réglementaire monde Giuseppe de Martino, ont adressé un courrier à Nathalie Kosciusko-Morizet le 24 février dernier, pour lui demander de mieux défendre Internet en France face à un courant de pensée qui le dénigre. Dans cette lettre dévoilée par LeFigaro.fr, ils interpellent la secrétaire d'Etat au Développement de l'économie numérique sur son silence face à plusieurs actions en cours. Le courrier évoque en particulier la proposition du député des Hauts-de-Seine Frédéric Lefèbvre de créer une commission paritaire appelée à enquêter sur les plateformes vidéo. Le porte-parole de l'UMP stigmatisait ainsi le "piratage industriel" qui se développe avec certains sites diffusant en streaming des contenus protégés. Dans leur missive à Nathalie Kosciusko-Morizet, les responsables de Dailymotion se disent "surpris par l'absence de communication de votre ministère sur ce sujet et regrettons qu'en laissant ce courant de pensée anti-Internet prospérer, vous ne concouriez pas à donner une image de notre industrie plus proche de la réalité". « Tu as une idée, je te taxe, je te régule. » C'est sur ce ton que le courrier continue, décrivant l'atmosphère qui règne autour du business Internet dans l'Hexagone. « Pour nous, entrepreneurs du net, c'est là une conjugaison bien malheureuse, déconnectée du temps numérique, celui des nouvelles générations. » Dans un entretien à l'AFP, Martin Rogard a estimé que "la France est le seul pays où on parle d'Internet en le décriant, alors qu'outre-Atlantique, il est considéré comme un vivier pour la croissance". Martin Rogard est « le moins bien placé pour écrire cette lettre », estime la secrétaire d'Etat [[page]] Nathalie Kosciusko-Morizet a réagi mercredi 18 mars, entre autres dans un communiqué à l'AFP, estimant que Martin Rogard était "l'acteur de l'Internet le moins bien placé pour écrire cette lettre, ou dénoncer (mon) soi-disant silence". La ministre assure en effet avoir rencontré le patron de Dailymotion à plusieurs reprises. "A l'heure où Internet est trop souvent et injustement mis en cause, comme un havre de brigands et de criminels, ou comme le responsable de toutes les faillites, les défenseurs d'Internet, de son bon usage, comme moi et, j'en suis sûre, comme Martin Rogard, feraient bien mieux de s'unir, plutôt que de polémiquer, on se demande bien pour le bénéfice de qui", conclut NKM. Mais c'est aussi avec un ton très direct et exaspéré que la ministre s'indigne sur son profil Facebook : Martin Rogard « a été invité à dîner avant même que je sois nommée à l'économie numérique, alors que j'étais encore à l'écologie ; Il faut des couverts en or pour recevoir Martin Rogard ? » Pour NKM, le discours sur Internet porte trop souvent sur les risques Dans un entretien accordé au MondeInformatique.fr le 4 mars, la ministre avait en effet expliqué combien elle était frappée par une forme de « schizophrénie, un peu étrange, dans laquelle on est tous utilisateurs d'Internet. Et en général utilisateurs plutôt heureux [...]. Mais le discours public qui se développe aussi bien dans l'ordre du politique que dans l'ordre du médiatique [...] porte beaucoup sur les risques. En fait, de manière très exclusive sur les risques. » Selon elle, il est important de voir aussi des exemples positifs de l'usage d'Internet : « Les réseaux sociaux, ce n'est pas que la déchéance de l'humanité. Ça peut être aussi des mises en relation sympathiques ou du lien social. Ce que je veux, c'est simplement rééquilibrer le discours. Qu'on parle d'Internet comme on le vit, c'est-à-dire avec les mêmes inquiétudes parfois vis-à-vis de l'usage qu'en font nos enfants, mais avec le même intérêt, le même goût pour ces nouveaux services, ces nouveaux modèles qui se développent qui sont extrêmement attractifs, intéressants ». Sur la loi Création et Internet et la Haute autorité Hadopi, interrogée par nos confrères de CIO-online, la ministre s'était quelque peu défaussée sur sa collègue de la Culture : « Le secrétariat d'État n'est pas très fortement impliqué sur cette loi, parce qu'en fait la loi était écrite, était travaillée avant que j'arrive et c'est vrai qu'elle est beaucoup portée par le ministère de la Culture », avant d'évoquer de nouveaux modèles économiques pour le téléchargement légal tels que l'abonnement par exemple.