L'éventualité d'un rachat de Yahoo par Microsoft n'a pas manqué, outre-Atlantique, de susciter des réactions enflammées de la part des défenseurs des libertés individuelles, notamment du CDD (Centre pour la démocratie numérique, une association d'avocats) et de l'EPIC (Electronic privacy information center), deux des organismes qui s'étaient déjà insurgés, aux côtés d'US PIRG, contre la fusion Google/DoubleClick. Cette alliance pourrait « affecter de manière significative la confidentialité en ligne », selon Jeff Chester, directeur exécutif du CDD. Pour lui, il était évident que la fusion entre Google et DoubleClick ferait réagir Microsoft, « mais nous ne pensions pas que ce serait aussi rapide », commente-t-il. Dans le collimateur des deux organismes, on retrouve toujours les mêmes problématiques : la protection des données et de la vie privée des citoyens, le statut de l'adresse IP et le respect des règles de la concurrence. Pour Joseph Turow, doyen associé de l'école de communication Annenberg de l'Université de Pennsylvanie, « l'OPA de Microsoft est une réponse naturelle à l'incapacité du gouvernement américain à réglementer le rôle des conglomérats du Web. » Il déplore [[page]]l'approbation, par les autorités fédérales, du rapprochement entre Google et DoubleClick, une fusion qui, rappelons-le, n'a toujours pas été approuvée par Bruxelles. Course à la publicité ciblée Pam Dixon, directrice exécutive du World privacy Forum a quant à elle soulevé un autre point. Elle estime que Microsoft et Yahoo pratiquent des politiques de protection de la vie privée des internautes très différentes, Yahoo étant « moins transparent », avant de s'interroger « qui adoptera l'approche de l'autre en cas de fusion ? ». Le CDD et l'EPIC craignent que l'internaute soit finalement le grand perdant de cette bagarre sans pitié que se livrent les colosses d'Internet pour marquer leur suprématie sur le marché de la publicité et des services en ligne. « Microsoft et Google ont chacun la capacité d'emmagasiner une quantité phénoménale d'informations sur les internautes, puis de les revendre à tout un panel d'annonceurs », prévient encore Jeff Chester. Selon lui, cette acquisition ne fera que renforcer cette course à l'e-surveillance et à la publicité comportementale ciblée. Les deux organismes encouragent donc la FTC à ouvrir une enquête pour déterminer les implications de ce rachat sur le respect des données personnelles des utilisateurs. Marc Rotenberg, directeur de l'EPIC, confirme : « la FTC doit intervenir, et ne pas commettre la même erreur que lors de l'affaire Google/DoubleClick ».