( Source EuroTMT ) En donnant, fin septembre, son feu vert au projet de réseau à très haut débit dans les Hauts-de-Seine, THD seine, financé partiellement par le Conseil Général, la Commission européenne ne vient-elle pas de mettre à bas la délicate architecture réglementaire bâtie par l'Arcep pour inciter les opérateurs privés à investir dans le FTTH ? Si l'intervention des collectivités locales dans les télécoms est jugée légitime dans les zones où l'investissement privé fait défaut, le projet des Hauts-de-Seine est d'une tout autre nature. Ce département est l'un des plus riches de France et il a été intégré dans la zone 1 (la zone très dense) définie par l'Arcep dans le cadre de son projet de décision sur les conditions de déploiement des réseaux à très haut débit. Il s'agit d'une zone présentée comme rentable et où les opérateurs peuvent investir dans les infrastructures pour se concurrencer. Cette incitation à investir dans les réseaux répond d'ailleurs à deux objectifs principaux : éviter de recréer un monopole sur la boucle locale en fibre optique et favoriser l'emploi et la croissance économique. Corollaire: l'intervention des collectivités publiques dans cette zone n'y est pas jugée comme nécessaire. Cette philosophie semblait avoir été entérinée par la Commission européenne quand elle a émis ses propres recommandations sur les aides publiques pour déployer les réseaux FTTH. Elle estimait aussi que l'intervention des pouvoirs publics dans les zones très denses n'était pas utile. Une évolution attendue de la Commission européenne Quelques jours plus tard, Bruxelles a donc paru se déjuger en autorisant le projet des Hauts-de-Seine. D'où la stupéfaction de certains opérateurs, comme France Télécom, qui juge l'action de la Commission incohérente. « L'Arcep a proposé une réglementation précise dans les zones très denses où on est sûr qu'il y aura une concurrence par les infrastructures jusqu'au pied des immeubles. En même temps, la Commission européenne approuve un service d'intérêt économique dans ce département au motif qu'il peut y avoir de zones blanches. Cela pose un problème majeur de cohérence entre les décisions nationales et communautaires, et constitue de fait une grave remise en cause du cadre national en cours de définition par l'Arcep » souligne Eric Debroeck, le directeur de la réglementation de l'opérateur historique. France Télécom estime que la Commission européenne n'aurait pas dû accepter ce projet si elle avait appliqué ses propres lignes directrices. De leur côté, le conseil général et les opérateurs qui participent au consortium ayant obtenu la délégation de service publique pour le réseau du 92 justifient le projet par l'existence de zones peu denses à l'intérieur du département. Mais en privé, l'un des responsables du projet reconnaît que cet investissement public peut provoquer le trouble dans le secteur. S'il est encore trop tôt pour savoir comment les opérateurs vont réagir et s'ils vont revoir leur plan d'investissements dans les Hauts-de Seine, ce projet pose un certain nombre de problèmes. Alors que certains opérateurs notent que même dans Paris certains quartiers (comme le 16ème arrondissement) ne seront pas rentables, le risque est donc grand de voir maintenant d'autres collectivités locales pourtant classées en zone 1 réfléchir à des projets d'investissement public pour garantir la couverture en FTTH des « zones blanches » qui peuvent exister en leur sein. D'où une incertitude nouvelle pour les opérateurs qui souhaitent investir. Face à cet enjeu, l'Arcep ne doit-elle pas corriger son projet de décision ?