L'accord entre Intel et la Federal Trade Commission, agence américaine indépendante qui traque les pratiques anticoncurrentielles, a été annoncé le 4 août. Il interdit au fabricant californien de processeurs d'octroyer aux constructeurs d'ordinateurs des avantages liés à l'utilisation exclusive de ses puces. De même, il interdit au plus grand producteur de puces au niveau mondial, de pénaliser les fabricants quand ils font appel à d'autres fournisseurs. En outre, l'accord comprend la mise en place d'un fonds de 10 millions de dollars, à échelonner sur une période de deux ans, destiné à aider les éditeurs de logiciels à recompiler leurs produits en vue d'améliorer leurs performances avec des puces concurrentes. La FTC fait valoir en effet que les logiciels compilés sur un compilateur Intel s'exécutent plus lentement sur des processeurs d'autres fondeurs. « C'est une affaire extrêmement importante », a déclaré Jon Leibowitz, président de la FTC, qui indique que la Commission a été profondément troublée par les agissements d'Intel. Il précise que la FTC  « a accepté cet accord car il va dans le sens de l'intérêt des consommateurs ».

L'interface PCI Express Bus en standard ouvert

En outre, la proposition impose à Intel de revoir ses accords de licence liés à la propriété intellectuelle avec les concurrents Advanced Micro Devices, Nvidia et Via Technologies. L'objectif est de leur donner plus de liberté pour envisager des fusions ou réaliser des co-entreprises avec d'autres acteurs, sans qu'ils soient menacés de poursuite pour violation de brevet. Intel doit également proposer à Via Technologies de prolonger de cinq ans l'accord de licence actuel sur le x86 qui arrive à expiration en 2013.
Par ailleurs, la FTC demande à Intel de laisser l'interface PCI Express Bus en standard ouvert d'une manière qui ne limite pas les performances des processeurs graphiques pendant les six prochaines années. Selon le président de la FTC, l'accord devrait « ouvrir la voie » à une nouvelle concurrence.

Consultation publique jusqu'au 7 septembre 2010

La Commission a accepté d'ouvrir le document de l'accord aux commentaires. Celui-ci prendra valeur définitive après une période de consultation publique de 30 jours. « Cet accord fournit un cadre qui va permettre à Intel de continuer à soutenir la concurrence et à fournir aux clients les meilleurs produits au meilleur prix », a indiqué le fondeur. « Il permet aussi de mettre un terme aux dépenses et aux perturbations liées au litige engagé par la FTC. »[[page]]
C'est en décembre 2009 que la Federal Trade Commission, une agence indépendante du gouvernement, dont la mission principale est de veiller à l'application du droit de la consommation et à contrôler les pratiques commerciales anticoncurrentielles, avait déposé plainte contre Intel, accusant la compagnie d'abuser de sa position dominante sur le marché des processeurs et d'avoir mené une campagne soutenue, alternant menaces et récompenses, pour contraindre les fabricants d'ordinateurs comme IBM, Dell et Hewlett-Packard à utiliser moins de composants d'AMD et de Via Technologies. Selon la FTC, il s'agissait pour Intel de « freiner la concurrence de produits de meilleure qualité » menaçant son monopole. La plainte mentionne notamment les processeurs AMD Opteron pour serveurs, sortis en 2003. Selon la FTC, ces actions, entreprises par Intel au cours des dix dernières années, ont favorisé une augmentation des prix et une réduction des choix pour les consommateurs.

La FTC avait déjà déposé une plainte en 1998

C'est la deuxième fois que la FTC instruit une plainte antitrust contre Intel. Déjà en 1998, l'agence avait accusé le fabricant de puces de profiter de sa position dominante pour forcer d'autres fournisseurs à soutenir Intel dans des litiges liés à la propriété intellectuelle et obtenir des conditions favorables. Intel avait mis fin au litige en 1999, un jour avant la tenue du procès.

La dernière action de la FTC contre Intel est intervenue quant à elle un mois après que le fondeur a accepté de verser 1,25 milliard de dollars à AMD pour suspendre les plaintes antitrust intentées par ce dernier. Le fabricant de puces concurrent se plaignait de tactiques semblables à celles qui figurent dans la plainte de la FTC, à savoir qu'Intel fournissait des remises aux fabricants de PC qui acceptaient de renoncer à utiliser des puces concurrentes. Dans l'accord avec la FTC, Intel n'a pas reconnu de fautes, mais en mai dernier, la Commission européenne a jugé Intel coupable d'avoir abusé de sa position dominante pour fermer le marché à des concurrents de plus petite taille, lui infligeant une amende de plus de 1 milliard d'euros (1,45 milliard de dollars), la plus lourde décidée par la Commission dans toute son histoire. Intel a fait appel de cette décision.

Des pratiques qui affectent aussi le marché des GPU

Si la plupart des affaires précédentes ne concernaient que les processeurs, la FTC dit avoir été cette fois troublée par les agissements d'Intel sur le marché des cartes graphiques et note dans sa plainte que des entreprises comme Nvidia et la division ATI d'AMD développent des processeurs graphiques en leur conférant des capacités équivalentes aux processeurs, mettant à mal la position dominante d'Intel. La FTC accuse Intel de méthodes illégales visant à entraver le développement des puces graphiques de ses rivaux, y compris en leur interdisant l'interopérabilité avec ses propres processeurs, ou encore en vendant de façon groupée ses processeurs et ses puces graphiques (GPU) au-dessous du prix. Depuis l'an dernier, Intel et Nvidia sont en procès sur la question de l'interopérabilité. L'affaire devrait passer en justice en septembre.

« Depuis dix ans, Intel concentre 75 à 85 % du marché des processeurs desktop et serveur, indique  la FTC, ce qui lui donne un pouvoir de monopole ». Des chiffres publiés par IDC indiquent que les parts d'Intel sur le marché du processeur se sont élevées à 81% au premier trimestre 2010, contre 18,8 % pour AMD et 0,2% pour Via Technologies. « Quant à la part d'Intel sur le marché des puces graphiques, elle s'élève à plus de 50 % », indique la FTC.