Le club des agilistes français (French Scrum User Group, ou SUG) a produit la première enquête sur les retours d'expérience des méthodes agiles dans les entreprises françaises. Principalement Scrum et XP, qui instaurent un mode de développement bien éloigné du traditionnel cycle en V. Et si tout n'est pas rose, le bilan apparaît plus que satisfaisant. D'abord en ce qui concerne le taux d'adoption. Luc Legardeur, qui a fondé le SUG français en février dernier, voit dans les résultats de l'enquête « un véritable engouement : on est passé de la phase 'early adopters' à une phase de large adoption ». De fait, les représentants de 150 entreprises - « dont la moitié d'entreprises utilisatrices », complète Luc Legardeur - ont bien voulu répondre sur leur expérience avec les méthodes agiles. Dans 51% d'entre elles, les méthodes agiles sont « en cours de généralisation ». On note également une grande diversité dans la taille des entreprises, « alors que l'idée reçue veut que cela ne concerne que les petites structures ». Ainsi, 31% des répondants sont dans des organisations de plus de 1000 personnes. Des livraisons qui suivent le rythme des directions métier « L'autre bonne nouvelle, commente Luc Legardeur, c'est l'implication du management. Avant, c'était quelque chose d'un peu clandestin. Là, on constate une implication des plus hautes strates de la hiérarchie, on sent que les entreprises ont compris qu'il s'agit d'un enjeu stratégique. » De fait, dans la mesure où les méthodes agiles préconisent des livraisons fréquentes, cela coïncide avec les demandes des directions métier qui exigent des cycles de développement beaucoup plus courts. La capacité à s'adapter au changement figure d'ailleurs au premier rang des motivations pour la généralisation des méthodes agiles, avec 78% de réponses, et les livraisons plus fréquentes emportent 49% des suffrages. Motiver les équipes de réalisation est également cité dans 61% des cas. « C'est une bonne nouvelle, explique Luc Legardeur, cela montre que les DSI se soucient de la motivation de leurs équipes. » C'est aussi bon pour les directions informatiques, puisque la productivité augmente (sensiblement dans 41% des cas, légèrement dans 37% des cas), et que les délais se réduisent (sensiblement dans 40% des cas, légèrement dans 30% des cas). Les méthodes agiles s'inscrivent dans une démarche globale d'amélioration de la qualité [[page]] Dans tous les cas, faire partie d'un projet agile apparaît gratifiant. Dans 62% des cas, les répondants à l'enquête notent que l'amélioration de la qualité des développements est une motivation forte. Ce qui est en phase avec une autre question de l'enquête, où 76% des gens disent avoir adopté la démarche CMMI pour l'amélioration de la qualité. Et dans les faits, cela se vérifie : « plus des trois quarts des personnes interrogées constatent une amélioration de la qualité » (sensible pour 57%, légère pour 26%). Pour le SUG, cette amélioration est due à l'intégration des tests dans les itérations, ainsi qu'à la collecte des avis des utilisateurs à chaque itération. Logiquement, la satisfaction des utilisateurs est donc au rendez-vous : l'amélioration est sensible dans 56% des cas, légère dans 20%. « La cohabitation est difficile avec les entités non agiles » Les difficultés se retrouvent donc surtout au niveau de l'intégration des projets agiles dans le fonctionnement normal des entreprises. Avec 53% de réponses, « l'interaction avec les entités non agiles » est citée au premier rang des soucis expérimentés. De fait, un projet agile ne peut exister en vase clos. Il faut trouver un « product owner », un responsable au sein des directions métier, qui devra être formé à l'agilité. Il faut aussi pouvoir communiquer avec d'autres équipes de développement, qui ne suivent pas les mêmes cycles. Or, constate Luc Legardeur, « la cohabitation est difficile », et du coup « il n'est pas évident, du moins au début, de faire de bonnes estimations sur les délais et le calendrier ». Même s'il est dépeint par des gens a priori adeptes des méthodes agiles, le bilan est donc clairement encourageant. Ce qui n'empêche pas Luc Legardeur de vivre avec la hantise « de voir des échecs, une contre-référence majeure ». Cela arrivera certainement, mais il n'est pas sûr que cela handicape la généralisation des méthodes agiles, dans la mesure où des éditeurs de poids les ont massivement adoptées. IBM et SAP, par exemple, emploient chacun plusieurs centaines de personnes dans des équipes de développement agile.