Hier, en annonçant un nouveau type de mémoire dite RRAM (Resistive Random-Access Memory), la startup Crossbar fondée en 2010 est soudain sortie de l'anonymat. Le nouveau type de RAM pourrait succéder à la DRAM et au stockage flash. La startup compte fabriquer elle-même sa RRAM et en vendre la conception sous licence, expliquent nos confrères d'IDG News Service. « Cette mémoire non volatile dite Resistive Random-Access Memory est plus petite, plus rapide et plus économe en énergie que la mémoire flash NAND et la RAM », leur a expliqué le CEO de Crossbar, George Minassian. « Sa densité est plus grande... et son courant, beaucoup plus faible » et, du fait « de ses caractéristiques physiques et électriques, cette mémoire pourrait tout à fait servir de support de stockage dans les smartphones, les tablettes, les PC et les serveurs ».

Selon Crossbar, les performances en écriture de cette RRAM sont 20 fois plus élevées, elle est 20 fois moins gourmande en énergie et 10 fois plus solide que la mémoire flash NAND. « Les puces RRAM sont empilables, et un module de 1 To occupe à peu près la moitié de la taille d'un module flash NAND pour une capacité de stockage similaire », indique George Minassian. Il n'a pas donné de fourchette de prix pour ce module, mais selon lui, il sera moins cher que son équivalent NAND parce qu'il est moins coûteux à fabriquer. Crossbar vendra également sa technologie sous licence à d'autres fabricants. « Il faudra attendre environ deux ou trois ans avant de voir cette mémoire apparaître dans les produits, mais cela dépendra de la demande », explique le CEO de Crossbar. « On verra ce qui se passera à ce moment-là ».

Une approche multicouche pour stocker les données

Le fonctionnement de la RRAM est différent de la mémoire flash NAND et de la RAM. Contrairement à la mémoire flash NAND, la technologie Crossbar n'utilise pas de transistors ou de système pour piéger la charge. Elle utilise une approche multicouche pour stocker les données. Une cellule RRAM présente trois couches, dont une isolation intermédiaire qui permet de déterminer si la cellule stocke un 1 ou un 0. La couche supérieure comporte une électrode métallique, alors que celle du bas a une électrode non métallique. La supérieure oriente les ions métalliques vers la couche intermédiaire et vers la couche inférieure, créant ainsi une liaison pour maintenir les électrodes connectées, ce que George Minassian appelle un « filament court ». Le filament formé dans l'isolant permet la conduction, moyennant l'application d'une tension relativement élevée lors de la fabrication. L'application d'une charge négative casse le « fil » et laisse un espace entre les électrodes, sans résistance, en changeant l'état de la cellule mémoire. « Ce n'est pas une porte comme dans la technologie NAND et NOR. C'est une mémoire résistive. C'est de là que vient la RRAM », a encore expliqué le CEO de Crossbar.
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« La RRAM utilise des matériaux existants et peut être fabriquée en usine. D'ailleurs, des prototypes sont en cours d'élaboration dans des usines de TSMC (Taiwan Semiconductor Manufacturing Co.) », a déclaré George Minassian. « La RRAM de Crossbar ne contient pas de transistors, elle est donc facile à fabriquer, c'est d'autant plus appréciable que la taille des processeurs se réduit », a-t-il encore ajouté. « La technologie Crossbar est très intéressante et pourrait s'avérer très utile au moment où les technologies de fabrication évoluent et que les puces deviennent plus petites », a déclaré par courriel Jim Handy, analyste principal chez Objective Analysis. «  On sait qu'un jour - sans savoir vraiment à quel moment - les mémoires NAND et DRAM seront remplacées par autre chose, étant donnés les problèmes de mise à l'échelle de ces technologies », a-t-il déclaré.

D'autres designs de RRAM font l'objet de recherche

« Les mémoires NAND et DRAM deviennent de plus en plus complexes à réaliser alors que la technologie de fabrication s'améliore de plus en plus vite », a déclaré Jim Handy. Intel, qui possède les usines de fabrication de puces parmi les plus avancées au monde, va bientôt passer au processus de gravure à 14 nanomètres pour réaliser ses puces. Faire des puces plus petites avec plus de fonctionnalités nécessite beaucoup plus de précision, et le risque d'avoir des imperfections augmente. « Avec ces éléments à l'esprit, et sachant qu'une 3D NAND va succéder à la NAND 2D actuelle, il faudra peut-être cinq générations de fabrication, voire plus, avant que des technologies de mémoire alternatives viennent remplacer la mémoire flash NAND. Et c'est probablement la même chose pour la DRAM », a déclaré l'analyste.

« Mais, dès qu'on atteindra un plafond, des technologies comme la RRAM de Crossbar pourraient prendre rapidement des parts de marché aux acteurs établis », a déclaré l'analyste. D'autres designs de RRAM font l'objet de recherches dans des universités et des instituts. Il existe par exemple d'autres formes de mémoire NAND et DRAM comme la MRAM (une RAM magnéto-resistive) de Everspin et la PCM (mémoire à changement de phase), sur laquelle travaillent Micron et Samsung Semiconductor. Et Hewlett-Packard travaille aussi sur un type de mémoire appelé memristor.