Le marché européen des progiciels bancaires engage un mouvement de consolidation avec le rachat de la société française Viveo par le Suisse Temenos. Ce dernier est classé 11e au classement Truffle 2009 des éditeurs européens, juste derrière le Français Sopra, l'un de ses principaux concurrents sur son secteur. Quant à Viveo, il figure dans le Top 20 des éditeurs français, à la 18e place de l'EuroSoftware 2009 établi par PwC et PAC (à noter que les 2e, 4e, 11e et 19e places de ce classement sont occupées par Sopra, Murex, Sophis et Sab Ingénierie, autres spécialistes du progiciel financier qui font apparaître le poids de ce segment dans l'industrie logicielle en France). L'acquisition de Viveo s'est scellée à la fin du mois de décembre pour un montant de 81 millions de dollars. « Ce rachat apporte à Temenos un très gros portefeuille de clients, souligne Vincent Gelineau, consultant senior chez PAC, spécialisé sur les marchés de la banque. L'éditeur suisse a des positions européennes très fortes, notamment sur la zone germanophone. Il a besoin de prendre du poids et de consolider ses positions en Europe pour aller plus loin au niveau mondial. Temenos a une carte à jouer face à des concurrents présents à l'échelle internationale comme Oracle, avec son offre i-flex [héritée du rachat en 2006 d'un éditeur indien], ou encore SAP. » De fait, Viveo compte plus de 750 clients dans quelque 35 pays, dont 400 en France, parmi lesquels BNP Paribas, la Caisse d'Epargne, Société Générale, Crédit Agricole ou encore Banques Populaires. Sur les 46 millions d'euros de son chiffre d'affaires 2008, 26 M€ ont été réalisés en France, selon l'EuroSoftware (qui estime aussi que 80% du CA provient de l'activité d'édition de la société). Viveo compte 410 collaborateurs répartis entre la France, la Roumanie, la Belgique et la Suisse. L'éditeur dit avoir investi plus de 100 M€ dans sa R&D depuis 2000. Peu d'acteurs 'pure players' globaux dans le monde financier « En France, il n'y a plus vraiment de place pour un trop grand nombre d'éditeurs spécialisés dans le monde bancaire, considère Vincent Gelineau, de PAC. Les grandes banques sont de plus en plus concentrées et ont de plus en plus de projets à l'international, dans le cadre de la mutualisation et de l'harmonisation de leurs systèmes. » Pour Temenos, le rachat de Viveo constitue sa plus importante acquisition à ce jour. En 2008, l'éditeur suisse a engrangé un chiffre d'affaires d'environ 293 M€ (407 M$). Il compte 700 clients dans 120 pays. En décembre dernier, il avait déjà noué un partenariat avec GFI Informatique pour fournir son logiciel T24 en France et dans d'autres pays d'Europe du Sud. [[page]] « Dans le monde financier, certains logiciels ont une portée internationale, explique Eric Menard, directeur d'études chez PAC. C'est le cas des logiciels de bourse -terrain sur lequel GL Trade a été racheté par Sungard ou des logiciels destinés aux banques d'investissement et d'affaires. Peu d'éditeurs 'pure player' [exclusivement spécialisés dans le monde bancaire] sont globaux, comme Sungard, alors qu'il en existe de nombreux à l'échelle locale ou régionale, en Europe, mais aussi sur d'autres marchés. Des éditeurs indiens, par exemple, comme Tata notamment, ont développé leurs propres logiciels bancaires. » A l'inverse, les logiciels de 'retail banking', destinés à gérer l'activité de Back-Office des banques de détail, restent adaptés à des marchés nationaux. « Il y a encore des différences de gestion entre les banques, suivant les différents pays, justifie Eric Menard. C'est pourquoi il existe des éditeurs locaux dans ce domaine. » Difficile de maintenir l'effort en R&D Sur le marché de la banque de détail, les éditeurs français proposent des approches intégrées. Outre Viveo, on retrouve celle de Sab Ingénierie, qui a racheté plusieurs sociétés ces derniers temps (notamment Samic qui proposait une solution intégrée), ou encore Sopra (avec son offre Evolan), cite Vincent Gelineau. Sur l'Hexagone, Oracle a réalisé plusieurs signatures avec son offre i-flex. SAP France est également présent sur le marché de la banque autour des fonctions support. Pour un éditeur comme Viveo, il devenait sans doute difficile de maintenir l'effort important consenti dans sa R&D, estime le consultant. Si l'on considère le mouvement de regroupement et de concentration qui se fait au niveau des banques, l'harmonisation européenne qui s'opère au niveau des règlementations bancaires et la montée en puissance d'acteurs comme SAP ou Oracle, ou encore le fait que des éditeurs locaux étendent leur présence aux pays frontaliers (comme Sopra), les analystes de PAC décèlent l'amorçage d'une phase de concentration sur ce marché qui va se confirmer dans les années à venir (sans précipitation, les banques n'ayant pas de pression pour changer de SI). « Pour l'instant, ce marché reste encore très morcelé », insiste Eric Menard.