Tous les indices récoltés au cours de l'année 2007 concordent : après de long mois de tests, 2008 sera la première année de la conversion de l'informatique à la virtualisation. Contraints et forcés sous les effets conjugués de la mauvaise conscience écologique, de l'augmentation du coût de l'électricité et de la pression à la réduction des coûts d'achat et d'exploitation, les centres de données vont entamer en 2008 une profonde mutation pour aboutir, d'ici quelques années, à une totale transformation de l'environnement informatique professionnel. A terme, la virtualisation permettra de découpler totalement le matériel du logiciel et des données. Si elle touche en tout premier lieu les serveurs, elle va étendre ses mérites au stockage, à l'architecture réseau, aux postes de travail et même aux applications. Pour ces dernières, la notion d'appliance virtuelle qui pointe son nez tant chez Red Hat que chez Ubuntu - Canonical, peut passer pour un rêve d'administrateur : une application prête à l'emploi qui se pose au dessus d'un hyperviseur et qui se met à jour tout aussi simplement. Effacer les adhérences, les adresses physiques et tout ce qui rend difficile une reconfiguration automatisée ouvrent d'immenses perspectives, mais il y a toujours plus loin de la coupe aux lèvres. L'optimisation des ressources serveur risque ainsi de créer des goulets d'étranglement an niveau des entrées sorties ; de plus en plus de voix s'élèvent pour dénoncer l'opportunisme malsain des éditeurs qui revoient à leur avantages leur politique de licence dont le calcul reposait jusque-là sur des machines bien réelles. Ces deux exemples donnent un indice des difficultés qu'il va falloir surmonter. Un effort d'autant plus difficile à réaliser que ce qui manque le plus pour l'instant, ce sont les compétences. Or, elles sont cruciales pour mettre en place l'armada d'outils d'administration que requiert un centre de données qui se pilotera à partir d'une console qui ramènera le tableau de bord d'un avion de ligne au rang de jeu pour les 5-6 ans. Quoi qu'il en soit, le mouvement est lancé et il est irréversible. [[page]] Les acteurs avec une position clé pour 2008 : - VMware , bien sûr, que sa mirifique introduction en bourse a propulsé en pleine lumière . Cette société, toujours contrôlée par EMC, s'impose comme la référence de la virtualisation sur architecture x64, tant pour ses hyperviseurs que pour ses outils d'administration. Un dossier complet, publié à l'occasion du VMWorld 2007 de septembre dernier, fait le point sur ce qui est en passe de devenir un énorme écosystème. - Microsoft , dont le retard est tel que l'on finit par se demander s'il ne découle pas d'un choix délibéré, devrait livrer son hyperviseur Hyper-V six mois après la sortie de Windows Server 2008. Soit en juillet prochain. En attendant, le premier éditeur mondial pose des jalons (ou des chausse-trappes, c'est selon) un peu partout. Déjà, Microsoft a rendu quasi impossible la virtualisation au niveau des postes clients sous Windows. Au niveau des centres de données, il place Virtual Machine Manager en embuscade au niveau de l'administration et indique qu'il faut payer le prix fort pour installer Windows Server en environnement virtuel, - Citrix , spécialiste du client déporté, a pris une position clé en rachetant XenSource, l'entité commerciale du projet Xen, hyperviseur Open Source concurrent de VMware, très en vogue dans le monde Linux. Allié objectif de Microsoft, Citrix veut jouer un double jeu, un pied dans chaque camp. Plutôt que de maintenir une division Xen, Citrix a fait le choix de disperser le savoir-faire de Xen dans toute l'entreprise. Cette décision montre que cet éditeur propose une troisième voie qui va directement du serveur au poste client. - Oracle , avec son talent unique de trouble-fête, a annoncé une offre de virtualisation maison fondée sur Xen. L'éditeur de SGBD et d'applicatifs, qui avait déjà semé le trouble en pillant le Linux de Red Hat, en profite pour sous-entendre qu'il serait risqué d'utiliser VMware. Même si cela est faux, ce genre de propos laisse des traces. Il reste aussi à citer Cisco, IBM, HP et Sun. Cisco parle depuis fin 2005 de VFrame, son outil d'administration des ressources virtualisées. Cette société a fait le choix de s'allier avec VMware en entrant à son capital et en annonçant l'intégration de VFrame Datacenter à Virtual Infrastructure. Quant à IBM et HP , très en retrait au niveau des logiciels systèmes, ils disposent de deux bras de levier : à eux deux ils fournissent la majorité des serveurs x64, sur lesquels ils peuvent préinstaller en mémoire flash l'hyperviseur de leur choix, et ils disposent de la palette d'outils d'administration la plus large. Dans le trio des constructeurs historiques, c'est Sun qui a la stratégie la plus originale. Non seulement, il a annoncé son propre hyperviseur pour faire cohabiter Solaris avec les autres OS x64 (Windows, Linux), mais il se lance aussi dans l'administration avec xVM Ops Center. Etant le moins bien implanté des trois sur le marché x64, il est celui qui a plus à perdre.