Quelles solutions proposez-vous chez PerformanSe et pour quels objectifs RH ?
Melany Payoux : PerformanSe conçoit des solutions d’évaluation psychométrique pour le recrutement, la gestion de carrière et le développement des talents. Nos outils permettent d’évaluer les soft skills – autrement dit, les préférences comportementales en milieu professionnel, les motivations, les représentations et les habilités cognitives.
L’objectif est d’aider les professionnels RH à mieux comprendre leurs candidats et collaborateurs pour prendre les bonnes décisions. Par exemple, dans une logique de développement des talents, nos outils favorisent l’élaboration de parcours de progression personnalisés. Au-delà des tests, PerformanSe propose une véritable expérience d’évaluation qui stimule la prise de conscience, la réflexion et l’appropriation des résultats, aussi bien pour les évalués que pour les évaluateurs.
Quelles limites dans vos pratiques précédentes ont motivé ce projet de modernisation ?
Melany Payoux : Avant ce projet, plusieurs freins impactaient directement l’expérience utilisateur. D’abord, une restitution figée : les candidats recevaient un PDF statique, sans interaction ni feedback immédiat. Certains exprimaient frustration ou stress face à leurs résultats, notamment s’ils devaient attendre un entretien RH pour les interpréter. Nos supports étaient parfois jugés trop techniques ou difficiles à comprendre pour des non-initiés, ce qui freinait leur appropriation.
Le déclencheur a été notre volonté de rendre l’évaluation plus inclusive, autonome et interactive, tout en maintenant notre rigueur scientifique. C’est ainsi qu’est né le « Lab », un assistant IA qui transforme l’accès aux résultats psychométriques, en offrant une expérience augmentée et personnalisée.
« Le « Lab » est un assistant IA qui transforme l’accès aux résultats psychométriques, en offrant une expérience augmentée et personnalisée »
Quel impact concret l’IA générative a-t-elle eu sur l’expérience d’évaluation ?
Melany Payoux : C’est un vrai changement de paradigme. Grâce au Lab, les résultats ne sont plus simplement remis sous forme de rapport PDF : ils sont accessibles via une interface web intelligente, accompagnée d’un chatbot qui explique les résultats sans jargon, répond en temps réel aux questions sur le profil, illustre ses propos par des exemples concrets et propose des pistes de développement personnalisées.
Hugo Vassard : Ce n’est plus un rapport figé mais un véritable accompagnement dynamique. Le Lab crée une interaction continue qui facilite la compréhension, engage davantage l’utilisateur et limite la nécessité d’un passage systématique par un expert RH. C’est particulièrement utile quand les RH n’ont pas la possibilité d’accompagner chaque personne individuellement.
Comment s’est organisée la collaboration entre PerformanSe et Ippon ? Quelles ont été les grandes étapes du projet ?
Hugo Vassard : La collaboration entre PerformanSe et Ippon s’est structurée autour d’un mode de travail itératif et collaboratif, dans la droite ligne des principes agiles que nous privilégions chez Ippon. Concrètement, le projet a démarré par une phase de « discovery » : il s’agissait de recueillir les besoins, de clarifier les usages cibles, d’identifier les opportunités à forte valeur ajoutée, puis de formaliser un premier cadrage. Cette étape est essentielle pour poser les bonnes fondations, éviter les effets tunnel, et s’assurer que la technologie soit bien mise au service de l’utilisateur.
Une fois cette base posée, nous sommes entrés en phase de delivery avec un fonctionnement en sprints de deux semaines. À l’issue de chaque sprint, une revue permettait de présenter les avancées, suivie d’une rétrospective pour capitaliser sur les retours. Cette boucle de feedback continue a permis d’adapter en permanence le périmètre et les priorités en fonction des retours métiers, notamment sur la pertinence et le style des réponses générées par le LLM (ton, vocabulaire, niveau de discours, etc.).
En fin de projet, nous avons mis un point d’honneur à transmettre les compétences, une étape d’autant plus importante que PerformanSe souhaitait s’approprier durablement les briques mises en place.
« La collaboration entre PerformanSe et Ippon s’est structurée autour d’un mode de travail itératif et collaboratif »
Melany Payoux : Ce souci de montée en compétences des équipes internes a effectivement pesé dans le choix de notre partenaire. Dès que nous avons obtenu le feu vert pour ce projet, nous avons lancé un benchmark. Ippon a rapidement retenu notre attention non seulement pour sa maîtrise des technologies IA et cloud, mais aussi pour sa proximité géographique – Ippon étant présent à Nantes, à proximité de nos locaux.
Au-delà des aspects techniques, nous avions la volonté d’éviter toute dépendance à un prestataire extérieur. Cela implique que l’équipe soit outillée, formée et responsabilisée. Ce transfert de compétences, Ippon l’a parfaitement intégré dans sa démarche. Aujourd’hui encore, ils restent présents à nos côtés lorsque nous avons besoin d’un appui ponctuel, mais en parallèle, nos équipes gagnent en autonomie, un vrai plus pour une PME comme la nôtre.
Le cloud a-t-il été un levier clé dans la réussite du projet ?
Hugo Vassard : Absolument. Le cloud nous a permis de gagner du temps en nous appuyant sur des services managés (bases de données, orchestrateurs, fonctions serverless…), sans nous soucier de leur hébergement ou de la maintenance souvent chronophage.
Melany Payoux : Ce projet a été aussi un premier pas vers le cloud pour PerformanSe. Il nous a permis de tester, d’apprendre et d’identifier à la fois nos besoins techniques et les apports concrets du cloud.
« Le cloud nous a permis de gagner du temps en nous appuyant sur des services managés »
Quelles briques AWS avez-vous mobilisées dans cette refonte ?
Hugo Vassard : Le projet a mobilisé deux grands types d’architectures sur AWS : d’un côté, le socle technique du produit IA destiné aux utilisateurs finaux, et de l’autre, une plateforme data plus structurante, conçue pour évoluer au fil des projets et s’interfacer avec le système d’information de PerformanSe.
Côté produit IA, nous avons opté pour une architecture totalement serverless. Le point d’entrée est assuré par Amazon API Gateway, qui sert de passerelle entre le front-end hébergé chez PerformanSe et le back-end hébergé sur AWS. Deux types d’API ont été mis en œuvre : une API REST classique et une API WebSocket, cette dernière permettant d'assurer une expérience utilisateur plus fluide grâce au streaming des réponses. Plutôt que de livrer la réponse du chatbot d’un bloc, les mots apparaissent progressivement, simulant une conversation naturelle et évitant les temps d’attente trop longs.
Ces APIs dirigent les requêtes vers une série de fonctions Lambda, codées en Python, un choix motivé par la richesse de ses bibliothèques IA et sa popularité pour des cas d’usage génératifs. Ces lambdas orchestrent ensuite les appels vers différents services AWS, comme DynamoDB pour le stockage des messages et métadonnées, ou AWS Bedrock, qui permet d’exploiter des modèles de langage de pointe hébergés en Europe, un prérequis important pour PerformanSe compte tenu de leurs exigences de conformité ISO.
Côté data platform, l’ambition était de construire un socle réutilisable pour d’autres projets. Nous avons mobilisé des services comme Redshift pour l’analyse de données, Step Functions pour l’orchestration des workflows, AWS Batch pour l’exécution de traitements lourds, Amazon Quicksight pour la datavisualisation, et bien sûr Amazon S3 pour le stockage massif. Cette plateforme constitue en quelque sorte une colonne vertébrale technique qui pourra facilement évoluer en fonction de nouveaux cas d’usage métiers.
« La plateforme Amazon constitue une colonne vertébrale technique capable d’évoluer facilement au fil des nouveaux cas d’usage métiers. »
Quels bénéfices avez-vous retirés d’un fonctionnement en full serverless ?
Hugo Vassard : Le choix du full serverless a été structurant. Il nous a permis de réduire la complexité technique tout en maximisant la valeur apportée. Premier bénéfice immédiat : le coût. Avec le modèle « pay per use », on ne paie que ce qu’on consomme. Si le chatbot n’est pas utilisé, aucune ressource ne tourne inutilement. C’est particulièrement pertinent pour des PME qui ont des pics d’usage irréguliers.
Deuxième bénéfice : la scalabilité native. Le système peut absorber une montée en charge importante sans avoir à repenser l’architecture. Que l’on ait dix utilisateurs ou mille, l’infrastructure s’adapte automatiquement, sans intervention humaine.
Troisième avantage, et non des moindres : les bénéfices du “modèle de responsabilité partagée” dans un contexte serverless. En déléguant à AWS la gestion des serveurs, nous nous affranchissons d’un bon nombre de préoccupations comme celles liées à la maintenance, la disponibilité ou la sécurité. Ainsi, la mise en place de patchs correctifs, les montées de versions ou le maintien en condition opérationnelle (respect des SLA) est directement gérée par le cloud provider et non par PerformanSe.
Cela permet de concentrer nos efforts sur ce qui crée réellement de la valeur : la qualité de l’expérience utilisateur, les fonctionnalités du produit et l’alignement avec les besoins métier. On assemble des briques sur étagère, on construit rapidement, et on itère. C’est un mode de fonctionnement particulièrement adapté aux cycles courts et aux projets IA où l’expérimentation est constante.
Quelles innovations projetez-vous désormais avec l’IA dans vos outils et services ?
Melany Payoux : Nous sommes aujourd’hui à un moment charnière. L’intégration de l’IA générative dans nos outils d’évaluation nous a permis d’ouvrir une nouvelle voie vers des expériences plus personnalisées, engageantes et utiles pour l’utilisateur final, qu’il s’agisse du candidat évalué ou du professionnel RH.
À court terme, nous cherchons à enrichir l’interactivité et la finesse des retours générés. Cela passe par une adaptation dynamique du contenu : en fonction du rôle de l’utilisateur, de sa maturité en matière d’évaluation, ou de son besoin d’autonomie, le système pourra proposer des analyses plus ou moins approfondies, avec différents niveaux de langage ou de conseils. L’objectif étant d’augmenter la pertinence et l’appropriation, sans complexifier l’outil.
Hugo Vassard : Pour aller plus loin, nous envisageons d’intégrer un mécanisme de RAG (Retrieval-Augmented Generation). Concrètement, cela signifie que le chatbot ne s’appuiera plus uniquement sur son modèle de langage, mais aussi sur une base documentaire spécialisée (contenus experts, documents scientifiques, etc.) pour enrichir ses réponses.
Melany Payoux : À plus long terme, nous souhaitons étendre ces innovations à d’autres domaines RH : le développement des compétences, l’accompagnement managérial ou encore l’analyse collective. L’IA pourra proposer des pistes d’action concrètes, contextualisées, mais toujours sous le contrôle de l’humain. Car c’est bien là notre conviction : l’IA doit enrichir la relation humaine, pas la remplacer !