Pour se mettre en conformité avec le droit européen, la loi Française évolue. Les mesures d'adaptation au droit de l'UE sont entrées en vigueur le 11 mars 2023. Certaines d'entre elles sont applicables dès à présent, d'autres attendent encore leurs décrets d'application. Ces mesures sociales auront un impact sur la gestion RH et paye. Concrètement, que change la loi d'adaptation au droit Européen ? Tour d'horizon des mesures !
1- La durée des périodes d'essai
Avant l'entrée en vigueur des mesures de la loi d'adaptation au droit Européen, les règles étaient les suivantes :
- Principe : la loi portant modernisation du marché du travail de 2008 a fixé des règles concernant les durées maximales de période d'essai. Celles-ci varient en fonction de la catégorie socio-professionnelle :
- Ouvriers et employés : 2 mois ;
- Agents de maîtrise et techniciens : 3 mois
- Cadres : 4 mois
- Dérogation : des durées de périodes d'essai plus longues pouvaient êtes appliquées lorsqu'elle était prévue par un accord de branche conclu avant le 26 juin 2008.
La loi d'adaptation au droit Européen supprime cette dérogation (article L.221-22 du Code du travail). Il ne sera plus possible de déroger à la durée des périodes d'essai fixées par le Code du travail, sauf si les durées prévues sont plus courtes. Ainsi le contrat de travail ne doit plus comporter de clause permettant de passer outre la nouvelle Loi d'adaptation.
Cette mesure entrera en vigueur le 9 septembre 2023, pour laisser le temps aux partenaires sociaux de modifier les accords collectifs concernés, puis de mettre à jour leur logiciel de paie afin de les rendre conformes avec la Loi.
2- Information des salariés
Dans l'objectif de rendre les conditions de travail transparentes et prévisibles, la loi DDADUE comprend des dispositions visant à renforcer l'information des salariés. Ces mesures n'entreront en vigueur qu'une fois les décrets d'application publiés. Il n'est envisagé que la fiche de paie soit modifiée en dehors des dispositions relatives au Net social qui sera déployé en Juillet de cette année.
Information du salarié lors de l'embauche
L'information des salariés lors de l'embauche fait l'objet de l'introduction d'un nouvel article au Code du travail (Article. L. 1221-5-1). Cette obligation implique de remettre au salarié nouvellement embauché un ensemble de documents écrits précisant les informations relatives à la relation de travail. Les informations à y faire figurer ne sont pas précisées dans la loi d'adaptation, c'est le décret d'application qui fixera la liste des documents, les modalités ainsi que des délais d'information, conformément à celle établie dans la directive Européenne. Une fois la liste connue, les employeurs déjà établis ou ceux en création d'entreprise pourront comparer les documents qu'ils remettent déjà aux nouveaux embauchés et compléter si nécessaire.
En l'absence de remise des documents obligatoires, le salarié pourra :
- Mettre en demeure son employeur de lui communiquer les documents manquants,
- Et c'est seulement à défaut de transmission des informations de la part de l'employeur en dépit de la mise en demeure que le salarié pourra saisir le juge compétent pour les obtenir.
Information des salariés en CDD et en intérim
La loi d'adaptation au droit Européen renforce l'obligation d'information des :
- Salariés en CDD,
- Intérimaires au sein de l'entreprise utilisatrice.
Dès lors qu'un salarié en CDD ou un intérimaire justifie d'une ancienneté continue d'au moins 6 mois dans l'entreprise (entreprise utilisatrice pour l'intérimaire), celui-ci peut demander à être informé des emplois en CDI à pourvoir. L'employeur a l'obligation de lui communiquer la liste de ces postes, tout comme lui remettre un certificat de travail lorsqu'il le sollicite. L'entrée en vigueur de cette mesure se fera par décret d'application.
3- Congés parentaux et ancienneté
Congé paternité : prise en compte pour l'ancienneté
Avant l'entrée en vigueur de la loi d'adaptation, lorsqu'un salarié s'absentait dans le cadre d'un congé de paternité et d'accueil de l'enfant ; cette absence n'était pas considérée comme du temps de travail effectif et n'était donc pas comptabilisée dans le calcul de l'ancienneté sur le bulletin de paie remis au collaborateur. Sur le modèle du congé maternité, qui est une absence prise en compte pour l'ancienneté, la Loi d'adaptation assimile le congé paternité et d'accueil de l'enfant à une période de travail effectif pour la détermination des droits à l'ancienneté. Cette mesure est d'autant plus importante que la durée du congé paternité s'est allongée pour passer à 28 jours au 1er juillet 2021. Cette mesure s'applique à tous les congés paternité pris à partir du 11 mars 2023.
Congé parental d'éducation : prise en compte et appréciation ancienneté
Pour avoir le droit au congé parental d'éducation, total ou à temps partiel, le salarié devait justifier d'une ancienneté d'un an minimum à la date de naissance de l'enfant ou de l'arrivée d'un enfant adopté dans le foyer. Pour éviter qu'un salarié, même au SMIC, n'ayant pas l'ancienneté requise ne puisse pas bénéficier de ce congé, la loi d'adaptation déconnecte l'ouverture du droit à la prise du congé parental d'éducation de la condition d'ancienneté à la date de naissance ou d'arrivée au foyer d'un enfant adopté. Ainsi, désormais le congé parental est ouvert à tous les salariés justifiant d'au moins un an d'ancienneté dans l'entreprise au moment de la demande du congé parental d'éducation, ceci afin de pas exclure les salariés ayant acquis un an d'ancienneté après la naissance ou l'adoption de leur enfant.
Prise en compte de l'ancienneté
Le principe reste le même : la durée du congé parental d'éducation est prise en compte pour 50 % pour la détermination des droits à l'ancienneté. Cependant, il manquait une précision dans la loi concernant la forme du congé parental : total ou partiel. La loi d'adaptation a simplement modifié l'article L 1225-54 du code du travail afin de lever toute ambiguïté :
- Le congé parental d'éducation total est pris en compte pour 50 % dans la détermination des droits à l'ancienneté ;
- Le congé parental d'éducation sous forme de temps partiel est considéré comme du temps de travail effectif et compte donc à 100 % pour la détermination de l'ancienneté.
4- Congés parentaux et conservation des droits acquis
Il n'était pas prévu pour le salarié en congé paternité, en congé parental d'éducation ou congé de présence parental de retrouver son emploi précédent ou similaire assorti d'une rémunération équivalente.
En revanche, le Code du travail prévoyait :
- La conservation des droits à congés payés acquis avant le début du congé pour une salariée en congé de maternité ;
- Le maintien des droits acquis pour un salarié en congé de solidarité familiale ou en congé de proche aidant.
Ce droit au maintien des avantages acquis avant le congé est étendu par la loi d'adaptation au :
- Congé paternité,
- Congé parental d'éducation,
- Congé de présence parental.
Cette nouvelle disposition garantit à ces salariés de conserver leurs droits à congés payés acquis avant le congé. Ceci est important car le report des congés payés n'est pas toujours possible si la période de prise de congés s'est terminée durant la période d'absence du salarié.
Cette mesure est également entrée en vigueur le 11 mars 2023.
5- Congé paternité et participation aux résultats de l'entreprise
En vertu d'un accord de participation, les critères de répartition de la réserve spéciale de participation sont librement fixés par l'employeur. Celui-ci peut notamment décider de proratiser le versement de la participation selon la durée de présence effective du salarié dans l'entreprise. Ainsi, les absences non considérées comme du temps de travail effectif sont décomptées du temps de présence, et déclarées en DSN, entraînant la proratisation du versement d'une prime de participation pour ces salariés.
Pour ne pas pénaliser les salariés en congé paternité :
- La loi du 16 août 2022 pour le pouvoir d'achat a assimilé le congé de paternité et d'accueil de l'enfant à du travail effectif pour le versement de l'intéressement ;
- La loi d'adaptation au droit Européen assimile le congé de paternité et d'accueil de l'enfant à du travail effectif pour la participation.
Ainsi à partir du 11 mars 2023, le congé paternité compte comme du temps de travail effectif pour le versement de la participation comme pour l'intéressement. Certaines mesures sont applicables depuis l'entrée en vigueur de la loi DDADUE, pour d'autres nous sommes encore en attente des précisions portées par les décrets d'application.
Aurore R.