Kodak est l'exemple typique d'entreprise ayant connu un succès extraordinaire avant d'être balayée par la vague numérique. Le 25 mars 2014, Pascal Malotti, directeur associé en charge du marketing au sein du cabinet de conseil Valtech, a ouvert le séminaire sur la transformation digitale en citant cet exemple. Si le diagnostic est la première étape, il n'en demeure pas moins qu'il faut savoir passer aux étapes suivantes, pour survivre et se développer.

La révolution digitale des entreprises repose d'une part sur la transformation des offres produits en services, d'autres part sur une culture de la donnée et des techniques telles que le commerce omnicanal ou la GRC. Allianz, Orange et PMU ont témoigné de leurs expériences durant le séminaire organisé par Valtech.

Commencer par une prise de conscience et un recrutement approprié

« La direction générale a pris conscience que le digital allait toucher les assurances après avoir touché la banque et elle a donc décidé de préparer la mutation au lieu de la subir » se souvient Delphine Asseraf, Head of Digital chez Allianz. Cela a commencé par le recrutement externe d'équipes, la création d'une structure dédiée et l'attribution de budgets. L'important était que l'équipe recrutée maîtrise le digital : elle pouvait toujours apprendre le métier de l'assurance en interne.

Le numérique provoque des chocs culturels. Par exemple, le secteur de l'assurance est habitué aux systèmes conçu pour fonctionner une vingtaine ou une trentaine d'années. Mais, comme le mentionne Delphine Asseraf : « le jour où j'ai dit que j'allais créer une application mobile pour au plus dix-huit mois, ça a fait le tour de l'entreprise. »

Cette rapidité ne va pas se réduire avec l'émergence des produits connectés, y compris les automobiles. Bien au contraire. Les données qui vont être disponibles, de type big data (c'est à dire alliant volume, variété et vélocité), vont nécessiter des traitements de plus en plus divers dans le temps.

« Mais le traitement massif de données personnelles pose des problèmes réglementaires avec la CNIL » indique Arnaud Etevenard, responsable GRC digitale au PMU. Or le marketing produit des données analysées qui, en retour, influencent le marketing. La profondeur, et donc la durée de conservation des données, a un véritable intérêt pour bien comprendre les comportements. Il déduit donc : « il faut prévoir d'entrée de jeu de pouvoir anonymiser les données pour pouvoir les conserver ».

Réagir avec détermination ou mourir

Les entreprises « anciennes » doivent aussi affronter l'arrivée soudaine d'acteurs pure players. Ces acteurs n'ont pas, par définition, à gérer un historique. Surtout, quand les acteurs historiques accumulent les systèmes locaux dans les différents pays d'implantation, les pure players débarquent avec un système moderne centralisé à peine localisé et très agile. « Il faut parfois avoir le courage de rebâtir un SI de zéro au lieu de le patcher » déduit Stéphanie Hospital, ex-vice-présidente Digital du groupe Orange.

Orange a eu une attitude numérique très offensive au sein de ses cellules dédiées mais qui a dû passer au défensif lorsque le marketing classique a récupéré la démarche. Enfin, après digestion, le marketing digital est de nouveau très offensif chez l'opérateur. Celui-ci a créé ses propres start-up interne -telles que Sosh- et a su racheter des entreprises comme Dailymotion ou Deezer.

Au final, le marketing digital doit abandonner les 4 « P » traditionnels (produit, prix, place et promotion) au profit des 4 « E » : everywhere, exchange, experience et evangelisation.