En s'associant pour créer des applications d'entreprise qui tourneront sur les terminaux iOS d'Apple, avec possibilité pour les services informatiques de prendre en charge leur administration et leur sécurisation, IBM et Apple ont frappé un grand coup. Ce partenariat sonne d'ailleurs aussi comme un défi direct aux projets de Microsoft. Comme le précise l'annonce, Apple et IBM comptent proposer plus d'une centaine d'applications d'entreprise pour iPhone et iPad. De plus, IBM s'engage à vendre des iPhone et des iPad, et les applications pros, à ses clients. Big Blue a précisé qu'il ferait en sorte que ces applications puissent être gérées et déployées en toute sécurité sur les appareils Apple.

L'offre des deux entreprises vient contrer très frontalement Microsoft qui a appelé à la création d'applications Windows universelles pour les machines exécutant son système Windows, en clair, proposer des applications pouvant tourner à la fois sur des machines sous Windows 8.1 (ordinateurs de bureau, ordinateurs portables, tablettes) que sous Windows Phone 8.1. Le problème, aussi bien pour le couple Apple-IBM que pour Microsoft, est que, jusqu'à présent, il n'y a pas beaucoup d'applications capables de répondre à ces contraintes. Pourtant, Microsoft ne ménage pas ses efforts pour inciter les développeurs à créer ce type d'applications, leur proposant notamment des outils dans Visual Studio qui permettent de créer des applications ayant une interface utilisateur déclinable sur PC, smartphone et tablette. Big Blue a déclaré qu'il lancerait son armée de 5000 développeurs mobiles pour soutenir le projet. Apple et IBM ont baptisé leur partenariat IBM MobileFirst for iOS, en réponse au cri de guerre « mobile first, cloud first » lancé par le nouveau CEO de Microsoft, Satya Nadella.

Apple a pris l'avantage sur Microsoft en l'empêchant de s'imposer sur le marché de la téléphonie mobile

De son côté, Apple s'est engagé à créer un AppleCare pour les utilisateurs professionnels qui renforcera le support technique d'IBM. Par ailleurs, Big Blue s'est engagé à proposer des packs logiciels « du berceau au tombeau » pour les terminaux iOS, qui couvriront des domaines allant de l'approvisionnement au management. IBM proposera aussi des services cloud pour iOS, dont des services d'analyse. Microsoft laboure aussi le terrain sur ces fronts, avec son service d'analyse dans le cloud Azure HDInsight. Le succès de telle ou telle solution dépendra en partie de la performance respective de ces services. Apple s'est octroyé un sérieux avantage en empêchant, dès le départ, Microsoft de capturer une grande partie du marché de la téléphonie mobile.

La firme du Cupertino a aussi la réputation d'être très réactive. De plus, son portefeuille de produits étant limité, elle est davantage centrée sur ses objectifs. C'est justement cette réactivité et cette concentration que le CEO de Microsoft a réclamées la semaine dernière à ses salariés dans un message rendu public. Celui-ci appelle à un changement de culture radical afin de mieux cerner l'attente des clients et leur offrir ces produits le plus rapidement possible. Le défi que représente l'initiative IBM MobileFirst for iOS rend cette révolution encore plus nécessaire.

Microsoft a concédé quelques ouvertures vers les appareils iOS. La firme de Redmond a notamment livré un Office pour iPad au printemps, une version réclamée et attendue depuis des années par les utilisateurs. Dans son courriel, Satya Nadella promet d'inclure les appareils iOS dans certains de ses projets. « Par exemple, avec notre nouvelle suite Enterprise Mobility, les entreprises peuvent maintenant gérer et sécuriser les périphériques Windows, iOS et Android de leurs employés, de façon à se protéger contre les risques de la mobilité », écrit le CEO de Microsoft. « Nous facilitons aussi l'adoption par les entreprises d'applications SaaS sécurisées (aussi bien les nôtres et que des applications de tierce partie) et leur intégration indolore à leur infrastructure de sécurité et de management existante ». Mais, ces solutions n'ont pas le même impact qu'un partenariat avec Apple pour créer des packages d'applications prêtes à déployer en entreprise. Cependant, la bataille est loin d'être gagnée. Comme l'admet lui-même Tim Cook, le CEO d'Apple, les déploiements de terminaux iOS sont à la traîne. « La réalité est que la pénétration des terminaux iOS dans les entreprises et dans le commerce en général reste encore faible », a-t-il reconnu dans une interview à la chaîne américaine CNBC. « Si nous réussissons à apporter à l'entreprise ce que nous avons apporté aux consommateurs, je pense qu'il y a là un potentiel énorme », a-t-il ajouté.