Le temps est venu pour les applications professionnelles et les systèmes de stockage de travailler plus étroitement ensemble, et les disques SSD pourraient même fournir de la puissance de calcul pour faire tourner les applications, selon Samsung Semiconductor. Le constructeur voudrait que l'industrie établisse des normes pour permettre une meilleure coordination entre ces éléments, l'objectif final étant d'améliorer l'efficacité des datacenters. Toujours selon le constructeur, un des avantages à court terme serait que les processeurs pourraient mieux communiquer avec les disques SSD et, plus tard, les contrôleurs SSD pourraient même prendre en charge une partie des tâches d'exécution des applications. La société coréenne n'a donné aucun calendrier pour ce travail de développement, forcément à long terme, mais elle appelle plusieurs groupes de l'industrie à coopérer pour que ce projet devienne réalité.

« Par rapport à l'informatique et à la mémoire, les supports sur disques durs et le stockage en général, sont historiquement en retard sur le plan de la performance, et les fonctions à accomplir sont restées distinctes. Mais l'arrivée de nouveaux supports de stockage SSD et de nouveaux types de mémoire a changé la donne », a déclaré Bob Brennan, vice-président senior en charge du Memory Solutions Lab chez Samsung Semiconductor. « Il existe aujourd'hui des disques plus rapides avec plus de puissance de calcul intégrée et des connexions plus rapides », a-t-il ajouté. « Les serveurs ne profitent pas autant qu'ils le pourraient des performances des systèmes de stockage », a-t-il encore déclaré mardi, lors du Flash Memory Summit qui se tenait du 5 au 7 août à Santa Clara, Californie.

Allouer un stockage spécifique à certaines tâches

Samsung travaille dans deux directions pour avancer dans ce domaine. La première consiste à développer des applications capables de mieux communiquer avec le système de stockage et notamment à les rendre capables d'exprimer leurs besoins en mémoire. « Par exemple, toute application devrait être en mesure de dire à un disque SSD quand elle a besoin de toute la performance du contrôleur », a expliqué Bob Brennan. Grâce à cette information, le contrôleur pourrait à tout moment allouer un stockage spécifique à certaines tâches, par exemple pour récupérer de la mémoire (garbage collection) ou réorganiser à l'avance les bits sur les SSD afin d'optimiser les performances futures.

« Pour un SSD à pleine charge, si l'on arrive à contrôler le « garbage collection » au niveau de l'application, on peut réduire la latence d'un facteur de 1000, ou réduire le délai de mise à disposition des bits à l'endroit où ils sont nécessaires pour le traitement », a évoqué le vice-président senior. Mieux encore, une meilleure coordination pourrait permettre aux entreprises de puiser de la puissance de calcul dans les contrôleurs SSD et de l'utiliser comme ressource informatique supplémentaire dans leurs datacenters. Selon Nathan Brookwood, chercheur pour Insight64, «  souvent, ces processeurs ne tournent pas à plein régime et quelle que soit la vitesse à laquelle les médias flash peuvent libérer leurs bits, le silicium spécialisé et finement programmé des contrôleurs SSD peut travailler beaucoup plus rapidement », a-t-il déclaré.

Samsung aimerait que l'industrie propose des API standards

De plus, en confiant des tâches de traitement informatique aux contrôleurs SSD, les données se retrouveront juste à côté, réduisant les retards dus au déplacement des bits. Le vrai défi pour faire en sorte que ce système fonctionne tient à la spécialisation des contrôleurs qui les rend très adaptés à leurs tâches. Contrairement aux puces serveurs qui manipulent beaucoup  de données chiffrées dans les datacenters, les processeurs des contrôleurs ne sont pas des processeurs x86. « Chacun dans l'industrie choisit une architecture légèrement différente pour ses contrôleurs », a expliqué Bob Brennan lors une interview à nos confrères d'IDG News Service accordée pendant le Flash Memory Summit.

La répartition des tâches entre un CPU x86 et un contrôleur SSD n'a rien à voir avec une distribution entre plusieurs puces et coeurs. « Ce n'est pas trivial », a souligné de son côté Arun Taneja, fondateur et analyste consultant du Taneja Group. « Le chemin pour y arriver n'est pas encore très clair », selon lui. Pour réduire la difficulté, Samsung aimerait que l'industrie propose des API standards, agnostiques vis à vis de l'architecture du contrôleur. « Avec une API, l'application pourrait communiquer avec n'importe quelle architecture », a encore déclaré le vice-président senior en charge du Memory Solutions Lab chez Samsung Semiconductor.

Samsung veut lancer l'initiative Storage Intelligence

L'initiative que Samsung veut lancer sous le nom de Storage Intelligence, impliquerait la SNIA (Storage Networking Industry Association), l'INCITS (International Committee for Information Technology Standards) et NVM Express, un groupe à l'origine de l'interface commune NVMe pour les SSD. Le constructeur considère que « cela pourrait arriver au cours de la prochaine décennie ». «Toutes les personnes ici présentes doivent travailler ensemble pour que les applications et les systèmes de stockage communiquent entre eux », a déclaré Bob Brennan lors de sa conférence. « La coopération sera un élément clé de la réussite », a renchérit Nathan Brookwood.

« Si Samsung avait essayé d'introduire ses propres solutions, il n'aurait pas eu beaucoup de supporters », a estimé le chercheur d'Insight64. « Les objectifs de Samsung pour Storage Intelligence sont équivalents à ce que l'industrie informatique a essayé d'accomplir ces dernières années avec la virtualisation de serveurs et autres innovations », a déclaré Arun Taneja. « Il s'agit d'une quête commune », a-t-il ajouté. « Cette industrie a déjà gaspillé trop de capacités ».