« La haute performance tire les technologies du numérique qui vont forger la société du futur », a lancé Gérard Roucairol, président de Teratec en ouverture de la 11e édition du forum Teratec mardi matin qui se tient en ce moment (28-29 juin) sur le campus de l'Ecole Polytechnique, sur le plateau de Saclay à Palaiseau (dans l'Essonne). Réunissant les acteurs mondiaux du HPC (High Performance Computing), le forum Teratec est l'occasion de prendre la température de l'avancée des projets et de la recherche dans le domaine du calcul haute performance. Pour cette édition 2016, l'ouverture vers la simulation numérique et le big data - deux domaines ayant beaucoup à gagner à s'appuyer sur le calcul haute performance - a été de nouveau mis en avant.

Comme toujours, les forces en présence étaient nombreuses à être réunies au même moment, au même endroit pour ce forum, dont en particulier les fournisseurs HPC et les supercalculateurs à commencer par Bull (groupe Atos), Cray, Eolen, Fujitsu, Altair... Teratec comptant par ailleurs différents membres dont Airbus, Air Liquide, ArcelorMittal, CEA, Dassaut Aviation, EADS, EDF, Faurecia, Michelin, L'Oreal, Safran et Total dans le secteur industriel, ou encore l'Inria, l'Onera, l'ENS, Genopole, le CSTB et Genci dans l'enseignement et la recherche. 

La France, futur élève modèle du HPC ?

Loin de se reposer sur ses acquis, Teratec - qui regroupe sur son site de Bruyères-le-Chatel des laboratoires et des entreprises de toutes tailles développant des composants et systèmes jusqu'au logiciels et applications liés au HPC - semble être arrivé aujourd'hui à la croisée des chemins. « Tous les paramétres qui définissaient le champs de notre domaine sont en train d'exploser : politiques publiques mondiales, technologies, structure de l'industrie, domaines d'usage, structure du marché, acteurs et méthodes », a expliqué Gérad Roucairol. « Le sens de ce 11e forum et notre mission, avec tous ces paramètres en train d'être modifiés, est d'être un phare qui éclaire le futur. » Un objectif louable et qui pourrait bien être atteint en dépit des difficultés rencontrées. « Les efforts consacrés par la France dans le HPC se sont un peu cassé la figure dans les années 90 et il a fallu attendre que l'industrie française se réveille lorsque Bull est revenu dans la course suivi par les appels à projets des fonds uniques interministériels (FUI) en 2005 et du plan supercalculateur de 2013 », a analysé Gérard Roucairol, président de Teratec.

Teratec 2016

Gérard Roucairol, président de Teratec, à l'occasion de son discours d'introduction du Forum Teratec 2016 mardi 28 juin. (crédit : Dominique Filippone)

« Je me rappelle de votre premier forum il y a 11 onze ans à l'Ecole Centrale avec 11 entreprises. Aujourd'hui Teratec a changé de braquet mais également de perspectives, en se concentrant sur les applicatifs et en creusant les défis de la simulation numérique. Que de chemin parcouru par l'écosystème », a de son côté réagi Thierry Mandon, secrétaire d'Etat l'enseignement supérieur recherche. Avant d'embrayer : « La France aborde la compétition du HPC avec des atouts extraordinaires et a tout pour être au 1er rang. Elle a les technologies, les infrastructures et n'a pas à rougir de la comparaison avec la Chine et les Etats-Unis », a poursuivi Thierry Mandon. « Le contrat en cours entre le CEA et Atos-Bull autour du centre de calcul recherche et technologie (CCRT), la recherche sur les supercalculateurs quantiques, la recherche neuromorphique et l'intelligence artificielle sont une priorité pour le président de la république qui a promis un effort budgétaire. »

Diffuser la simulation numérique dans les TPE-PME

Parmi les principaux enjeux autour du HPC, le forum Teratec a été l'occasion de se rendre compte à quel point la diffusion des technologies de calcul haute performance, mais également de simulation numérique et de big data auprès des plus petites entreprises, apparaît comme une clé de développement. « Nous avons lancé avec le Genci l'initiative Simeso sur la diffusion de la simulation numérique dans le tissu des PME et des start-ups qui vont pouvoir disposer dans le futur de techniques permettant de se différencier par rapport à leurs concurrents », a expliqué Gérard Roucairol lors de son discours d'ouverture du forum Teratec mardi matin. Une initiative loin d'être anodine qui doit permettre d'accompagner les PME-TPE - voire les micro-entreprises - dans la simulation numérique qui apparaît plus que jamais comme un élément moteur de leur développement. Annoncée en 2014, les premiers fruits de cette initiative se font toutefois encore attendre, même si 2016 devrait être l'année de son décollage, dans un contexte où ces technologies pointues (simulation numérique et HPC en tête) commencent à devenir plus accessibles en termes de coûts pour les petites structures et ne seraient plus l'apanage des grands comptes et centres de recherche.

A l'heure où la rupture de la loi de Moore est entérinée et que le recours au parallélisme massif arrive à maturité, vers quelle évolution de rupture l'industrie du HPC va-t-elle aller dans les années à venir ? A cette question également soulevée sur le forum Teratec, les regards sont nombreux à s'être tournés vers le calcul quantique. Mais pas seulement : « On a voulu créer des machines universelles archi-complexes et on se demande aujourd'hui s'il ne faut pas des machines spécialisées. Le socle de Teratec a toujours été de modéliser de manière mathématique des modèles physiques pour savoir prédire des comportements et des modèles futurs mais une autre culture est à ajouter », a pointé Gérard Roucairol. « L'enjeu est de faire évoluer la culture de la simulation numérique pour savoir intégrer les nouvelles techniques de big data et d'autoapprentissage, mais dans le même temps les modèles en big data et intelligence artificielle ont besoin de toute une puissance de calcul que seule le HPC est en mesure de fournir ».