La légende dit qu'il fut un temps où les attentes des PDG en matière d'informatique étaient issues des magazines de bord fournies par les compagnies aériennes - une source d'inspiration qui est passée du statut d'irritant pour les DSI à celui de souvenir nostalgique à mesure que ces magazines disparaissent.

Aujourd'hui, les PDG sont plus susceptibles de nourrir leurs visions de l'informatique d'articles écrits par des rédacteurs crédules travaillant pour les médias économiques en ligne. Dans le meilleur des cas. A défaut, c'est parfois la capacité de Tony Stark à concevoir des solutions high-tech en gesticulant sur une interface tactile 3D tout en se disputant avec l'IA qui dirige le laboratoire d'Iron Man qui sert de source d'inspiration principale.

C'est donc à vous, les DSI et autres décideurs IT en entreprise, qu'il incombe de tempérer les attentes des Pdg en les ramenant de l'univers cinématographique de Marvel à la réalité de 2024. Pour ce faire, encore faut-il s'assurer que vous êtes le principal confident informatique du PDG, afin qu'il soit satisfait de ce que votre DSI parvient à sauver de ses espoirs, rêves et visions inspirées par les films diffusés par les compagnies aériennes.

En tant que meilleur confident du dirigeant de votre entreprise en matière de technologies, voici cinq déceptions potentielles que vous pouvez aider le chef d'entreprise à surmonter.

1. L'IA générative reste éloignée de l'IA façon Marvel

Dans l'univers de Marvel, sans parler de Star Trek et des publicités Alexa, les utilisateurs d'ordinateurs disent à l'IA de faire quelque chose, et l'IA le fait. Dans l'état actuel de la technologie, le PDG peut également demander à une IA générative de son choix de faire quelque chose. Si ses attentes proviennent des mythes entretenus par le cinéma d'anticipation, ou même de l'article le plus récent de la presse économique, l'IA devrait infailliblement prendre la bonne mesure ou donner la bonne réponse même à la demande la plus vague ("Dis-moi comment augmenter le cours de nos actions de 20 % d'ici à la semaine prochaine").

Dans la réalité, lorsque même l'analyste le plus talentueux n'arrive pas à comprendre ce que demande le Pdg, rien de bon n'en sortira. L'IA générative, en tout cas sa version de 2024, permettra de renverser le vieux dicton affirmant : "Il n'y a pas de questions idiotes". Celui-ci deviendra : "Certaines questions sont trop idiotes pour que même la meilleure IA puisse les résoudre".

2. La réalité augmentée se heurte à la dure réalité

Nous approchons du moment où les experts du secteur IT, à la recherche de la prochaine grande nouveauté, pourraient commencer à s'enthousiasmer pour cette technologie vraiment passionnante. Pour illustrer de manière simpliste ce que la réalité augmentée a à offrir, imaginez que vous assistiez à un événement industriel dont l'ordre du jour prévoit un cocktail. Vous avez déjà rencontré la plupart de ces personnes lors d'événements précédents, mais vous n'êtes pas très doué pour retenir les noms et les associer à des visages. Mais n'ayez crainte, la réalité augmentée est là ! Vos lunettes dédiées viennent à la rescousse, en faisant flotter des noms sous des visages. Et si vous regardez un visage pendant quelques secondes, vos lunettes vous suggéreront un sujet de conversation basé sur une discussion que vous avez eue lors d'une précédente rencontre.

Le potentiel de la technologie paraît impressionnant. Et les chefs d'entreprise pourraient vouloir tirer parti de ce potentiel dès maintenant. En 2024, cependant, le seul endroit où ils pourront la toucher du doigt sera au sein de quelques démos et bien-sûr dans l'univers de Marvel.

3. Les vêtements et accessoires connectés ne sont pas porteurs d'une révolution

"Delay in Transit" est une nouvelle vieille de 70 ans écrite par l'écrivain de science-fiction F.L. Wallace. Elle décrit un ordinateur portable contrôlé par des commandes "subvocalisées", auxquelles la machine répond par des signaux audio transmis par les os.

Depuis que j'ai lu cette histoire, j'en veux un. Maintenant que je l'ai décrit, vous en voulez probablement un aussi. Bien sûr, il est possible d'acheter ce que l'on appelle des wearables. Mais comme ils n'offrent pas grand-chose de plus que la radio de poignet de Dick Tracy, ne décrivez pas la vision de Wallace, vieille de 70 ans, à votre PDG. Il se pourrait qu'il en veuille un aussi, probablement avec des capacités de réalité augmentée, et 2024 se révélera assez décevant sur ce terrain.

4. La réalité réelle est assiégée

À l'heure actuelle, vous, vos parents, votre cousin Felix, le futur influenceur des médias sociaux, sans parler de votre PDG, savez tous ce qu'il en est des deepfakes. Ce à quoi personne ne s'attend, parce que les sources d'information crédules sur lesquelles vous comptez ne l'ont pas encore compris, c'est qu'en 2024, le contenu deepfake commencera à s'infiltrer dans les ensembles de données d'entraînement qui permettent de construire l'IA. Oui, au cours de l'année à venir, nous risquons d'avoir affaire à de faux deepfakes.

Ainsi, même si votre PDG espère que l'IA générative et sa capacité à rechercher dans de vastes volumes d'informations l'aideront à mieux comprendre son coin du monde, il sera déçu. Il obtiendra peut-être de meilleures informations basées sur des données. Ce dont il a réellement besoin, mais qu'il n'obtiendra probablement pas, ce sont des détecteurs de deepfake basés sur l'IA, afin de ne pas être dupé par les tromperies induites par l'IA générative.

5. Le cloud n'est pas une source d'économies sur le budget IT

In fine, peu de chefs d'entreprise se laisseront séduire par ces descriptions semi-fantaisistes de l'avenir des technologies de l'information. Ils continueront à avoir des préoccupations pratiques, comme de savoir où se trouve tout l'argent que le cloud était censé leur faire économiser. Certaines déceptions, en effet, sont à la fois éternelles et ancrées dans la réalité. Dans la mesure où le cloud existe dans une certaine réalité, sa promesse d'économiser de l'argent est l'une d'entre elles.

Pourquoi décevra-t-elle à nouveau en 2024 ? Parce que le cloud n'a jamais eu de sens en tant que mesure de réduction des coûts. Et qu'il n'en aura pas davantage en 2024. En effet, vous pouvez acheter des serveurs aussi bon marché que les fournisseurs de cloud, et ces derniers devront toujours ajouter une marge bénéficiaire lorsqu'ils vous facturent l'utilisation de ces serveurs.

Ce que vous devriez promettre à la place ? Contrairement à l'infrastructure sur site, le cloud permet d'augmenter facilement la capacité par petits incréments lorsque la demande l'exige. Et - et c'est là le plus important - il permet également à la DSI de réduire la capacité lorsque celle-ci n'est pas nécessaire. Résultat ? Lorsque la demande est saisonnière ou imprévisible, le cloud permet réellement d'économiser de l'argent. Mais lorsque la demande est stable ou que son augmentation est prévisible, l'infrastructure sur site coûte moins cher.

Avec le cloud, les coûts fixes sont faibles, mais les coûts incrémentaux sont importants. On-premise, cette logique est inversée. Pas sûr toutefois que le Pdg ait pas la patience d'écouter vos explications défensives. Il sortira peut-être de la pièce pour regarder Iron Man une fois de plus.