Rippling revient de loin. La jeune pousse californienne a en effet subi l’effondrement de la Silicon Valley Bank de plein fouet. « Il est tout simplement remarquable de penser que notre partenaire bancaire s'est effondré le jour où nous devions payer plus de 50 000 personnes » indique ainsi Parker Conrad, son CEO. Spécialisée dans la gestion des ressources humaines et fondée en 2016, elle offre une plateforme tout-en-un pour aider à gérer les RH, les opérations IT, la finance. En ce sens, elle s’occupe notamment des paies des entreprises clientes. Lorsque la SVB s'est effondrée le jeudi 9 mars et a été placée sous séquestre par la FDIC le lendemain, Rippling s’est retrouvée confrontée à une situation pour le moins inédite. « Ce même vendredi était le jour de paie pour de nombreux clients de Rippling. Tout se passait comme d'habitude : les fonds des clients avaient été versés sur le compte transitoire à la SVB et les instructions pour le paiement des employés avaient déjà été soumises à la banque » raconte ainsi Parker Conrad.

Et c’est là que les problèmes ont commencé. Certains employés de ses clients n’ont pas été payés comme prévu à la date indiquée. La nouvelle est alors tombée : la FDIC avait fermé SVB et gelé ses actifs. « Ceux-ci incluaient les fonds des salaires de nos clients, qui étaient déjà en transit vers les employés ». Un problème de taille puisqu’il concerne plus de 50 000 employés. « Bien que ce soit la banque de la « Silicon Valley » qui ait fait faillite, les victimes potentielles n'étaient pas de riches investisseurs en capital-risque. Il s'agissait d'Américains ordinaires de tout le pays, gagnant en moyenne 55 000 dollars par an. 80 % d'entre eux travaillaient en dehors de la Californie et 65 % en dehors du secteur technologique » constate Parker Conrad. Pour rappel, Rippling propose une gestion RH des employés grâce à sa plateforme cloud tout-en-un. La plateforme offre des fonctions pour effectuer les tâches d'administration de la paie et inscrire les employés à l'assurance maladie. De plus, elle comprend un outil de flux de travail pour automatiser les tâches de saisie de données connexes.

Rippling propose plusieurs fonctions liées à la gestion des ressources humaines, incluant la possibilité de créer des rapports - comme ici sur l'évolution des coûts salariaux. (Crédit : Rippling)

Une bascule sur JPMorgan Chase et une levée de fonds dans la foulée

Rippling a donc réagi en conséquence et a débloqué près de 130 millions de dollars de son propre capital pour financer les paiements de ses clients à leurs employés. Le problème est en partie résolu puisqu’une question subsiste : comment gérer l’émission des paiements. La start-up utilisait jusqu’alors l'infrastructure logicielle de SVB pour émettre ces paiements chaque mois. Devant l’impossibilité de le faire, la société s’est donc tournée vers JPMorgan Chase, banque auprès de laquelle Rippling avait ouvert des comptes récemment. Cette dernière était censée servir d’infrastructure de paiement redondante afin d'éviter un point de défaillance unique. S’appuyant sur ses ingénieurs, la société a donc mis en place un fichier de paiement à soumettre à JPMC afin que les dossiers soient traités et les employés reçoivent leurs paiements à temps.

Reste que l’argent des clients de Rippling est toujours bloqué à la SVB. Cela représente une somme conséquente : 545 millions de dollars. « Nous nous attendions à ce que la FDIC libère un certain montant de capital pour les déposants le lundi, mais nous ne pouvions pas compter dessus » poursuit son CEO. Dans la foulée, l’entreprise décide donc de procéder à un tour de table qu’elle considère comme sa meilleure option et se tourne vers Greenoaks. Pour rappel, ce dernier a participé à presque tous les tours de table de Rippling. Le tour de table a été clôturé trois jours plus tard, soit le lundi matin suivant, alors que la FDIC avait annoncé la veille qu'elle garantirait les dépôts. Parker Conrad admet qu’à cet instant précis, le besoin immédiat de capitaux pour protéger nos clients n'existait plus mais l’accord avec Greenoaks tient toujours. Fort d’une croissance à trois chiffres, Rippling admet qu’un tel financement – 500 millions de dollars en série E – n’aurait pas été possible si les conditions ne s’y prêtaient pas.

Aujourd'hui, l’entreprise a récupéré tous les fonds de SVB et son bilan s'élève à un peu moins d'un milliard de dollars en liquidités. En outre, elle a transféré ses opérations bancaires à JPMorgan Chase, réglant la problématique de versement des salaires une bonne fois pour toute. Avec ce tour de table, l’entreprise est valorisée à 11,25 milliards de dollars, soit le même montant que le financement de sa série D en mai dernier.