Dans l’univers de la production audiovisuelle, la maîtrise du stockage partagé fait toute la différence entre un workflow laborieux et une chaîne de production fluide. Les besoins sont spécifiques dans cette industrie : traiter des fichiers vidéo volumineux, garantir la rapidité des transferts et permettre aux équipes de collaborer simultanément sur les mêmes projets. Pour répondre à ces exigences, la société néerlandaise Ardis Technologies a conçu les produits Dynamic Drive Pool (DDP), une solution SAN Ethernet (sur iSCSI) dont le cœur technologique est l’AVFS – un système de fichiers audio-vidéo développé en interne, pensé pour gérer la complexité de l’audiovisuel. « Notre enjeu, en créant AVFS et les baies DDP, était de sortir des recettes IT classiques et d’inventer un stockage partagé adapté aux réalités de la postproduction et de la diffusion », nous a indiqué affirme Jan de Vitt, CEO d’Ardis Technologies lors d’un récent IT Press Tour à Amsterdam. « C’est une niche exigeante, où il ne suffit pas d’additionner de la capacité à du débit, il faut repenser toute l’architecture pour garantir la synchronisation et la souplesse des accès, même lorsque des dizaines d’utilisateurs travaillent en simultané sur des flux 4K ou 8K ». La philosophie d’Ardis Technologies se distingue d’emblée par une volonté de contrôle, de simplicité et de pragmatisme. Selon Jan de Vitt, « le stockage partagé dans le monde audiovisuel doit permettre de déplacer les données au sein d’un SAN sans impacter le travail des équipes. Grâce à notre AVFS, chaque fichier ou dossier est géré de façon transparente, que sa source soit un disque dur de grande capacité ou un cache SSD ultra-rapide. Il est possible de déplacer des volumes, de réorganiser l’arborescence ou de basculer d’un mode cache projet à un stockage sur disques durs sans bouleverser les accès côté utilisateurs ».
Au centre de cet écosystème, on retrouve le concept de Project Caching : au lieu d’un cache global ou d’un simple cache disque dur, AVFS permet d’assigner des propriétés de cache à chaque dossier, en fonction du projet ou du workflow. L’administrateur peut choisir d’ingérer un rush directement en SSD pour un montage intensif, puis décider de le rapatrier sur des disques durs pour l’archivage, tout en gardant la même structure et les liens directs dans le système. Cette double entrée entre HDD et SSD, unique dans AVFS, garantit performances et flexibilité technique pour tous les formats (audio, vidéo, film, DPX, ProRes…), tout en simplifiant la gestion côté IT explique le CEO.
Développé depuis 2014, le système de fichiers AVFS (Ardis Virtual File System) d'Ardis Technologies est optimisé pour les environnements audio/vidéo et médias professionnels. (Crédit P.K.)
DDP : une gamme adaptée à tous les besoins
L'univers des baies DDP s’articule autour de plusieurs modèles, conçus pour répondre à la diversité des usages dans les sociétés de postproduction, la diffusion, les laboratoires de film, mais aussi les agences de publicité ou les sociétés de location. Les principales distinctions résident dans la capacité d’accueil de disques durs et SSD, les modes de connexion réseau – de 1GbE à 100GbE, la protection RAID et les options de haute disponibilité. Le microDDP offre une entrée de gamme idéale pour les équipes nomades, avec un format léger (5 kg), capable de stocker jusqu’à 64 To sur des SSD et de supporter un workflow collaboratif, même dans des environnements mobiles comme les festivals ou les tournages en conditions extrêmes. Ce modèle embarque pourtant le même logiciel AVFS que les grandes baies, et « rien n’empêche de le connecter à d’autres systèmes DDP pour augmenter la capacité ou le débit. Le microDDP est utilisé aussi bien par des équipes qui archivent de vieux films scannés en 8K que par des événements live comme les MTV Awards », détaille Jan de Vitt.
Pour les besoins plus intensifs, la gamme DDP 24DF, DDP 16EX ou DDP 78EXR propose des architectures hybrides, associant SSD cache projet et disques durs grande capacité, dans des boîtiers rackables supportant de 120 To à plusieurs pétaoctets. Sur ces modèles, plusieurs LUN (Logarithmic Unit Numbers) permettent de répartir intelligemment les fichiers : chaque LUN est limité à 96 To, mais la multiplication des boîtiers ou des volumes virtuels autorise une scalabilité sans collage de fichiers sur plusieurs noeuds, préservant la logique du SAN. La version DDP 10EF, de type full flash, monte jusqu’à 270 To en NVMe, et peut garantir 40 Go/s de bande passante, soit suffisamment pour ingérer ou monter plusieurs flux 8K DPX en temps réel.

La gamme DDP se compose de différents systèmes : HDD, hybride et full flash. (Crédit P.K.)
La double disponibilité (dual HA DDP Head) est un choix clef pour les chaînes de télévision et les sociétés qui doivent garantir la tolérance aux pannes. Ici, deux contrôleurs de métadonnées synchronisés assurent le failover, qu’il s’agisse du contrôle ou de l’accès aux données. Le système reste opérationnel en cas d’avarie sur l’un des éléments, sans impact sur les utilisateurs ou les workflows. L’offre DDP comprend aussi des modèles spécifiques pour la vidéo (miniDDP24DF, miniDDP24EX) et l’audio (DDP10EF), où le choix entre full flash, hybride (SSD et HHD) ou HDD est déterminé par la nature des fichiers manipulés et la fréquence d’accès requise. Sur le front des connexions, Ardis Technologies propose l’iSCSI, le NVMe over Fabrics, le RDMA pour les environnements Windows et Linux, avec des liens 25GbE et 100GbE.
AVFS : une architecture pensée pour l’audiovisuel
Au-delà du hardware, la vraie marque de fabrique des DDP réside dans AVFS. Là où la plupart des concurrents agrègent des systèmes tiers (XFS, ZFS, NTFS), AVFS assure une gestion fine des volumes, dossiers et droits d’accès, mais aussi une compatibilité totale avec les outils du marché : Avid Media Composer, Resolve, Premiere Pro, Blackmagic, ProTools. Le verrouillage des fichiers, la gestion des partages, la définition de folder-volumes et la granularité des permissions sont pensées pour garantir aux opérateurs la possibilité de travailler ensemble, sans intervention permanente d’un administrateur IT. « Développer notre propre système de fichiers était un pari technique majeur. Mais c’est le meilleur choix que nous ayons fait : cela nous permet de garantir un support ultra-réactif et d’adapter AVFS en temps réel aux retours des clients », résume Jan de Vitt. « En postproduction et broadcast, les besoins évoluent vite – on ne peut pas dépendre d’un système tiers dont le code ou les mises à jour sont hors de notre contrôle. Le choix AVFS, c’est ce qui fait que nos clients restent fidèles depuis plus de 15 ans ». La sécurité des données est également au cœur du dispositif avec authentification via contrôleur de domaine, HTTPS, double authentification, suivi des actions utilisateurs, verrouillage physique des baies, intégration native d’outils d’archivage et de backup (bande ou cloud) : tout a été pensé pour répondre à la sensibilité croissante autour de la protection des contenus originaux et de la lutte contre les ransomwares.
Enfin, Jan de Vitt insiste sur l’approche résolument on-premise d’Ardis Technologies : « Nous avons souvent été tentés d’ajouter des fonctions d’asset management, de MAM ou de cloud, mais nos clients nous demandent de la solidité, de la rapidité et la maîtrise des processus en interne. Le SAN DDP permet d’être cloud- et AI-ready, mais en gardant la pleine gestion des données localement, ce qui demeure essentiel pour des productions sensibles ». Avec près de 1000 systèmes en circulation dans le monde, DDP et AVFS se sont imposés dans les structures qui font du stockage partagé le cœur de leur process, qu’il s’agisse de longs-métrages, de séries, de pub ou d’archivage patrimonial.


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