Parallèlement à ses innovations à plus courts termes, comme le navigateur Edge, les requêtes en langage naturel d’Excel et d’autres encore, Microsoft mène des développements intéressants qui prennent certainement plus de temps. C’est le cas de son Projet Silica de stockage de données sur du verre présenté lors de l’événement Microsoft Ignite organisé du 3 au 7 novembre à Orlando (Floride). L'entreprise de Redmond a expliqué comment elle avait développé, avec l'aide du studio de cinéma Warner Bros, un système d'enregistrement tridimensionnel pour stocker le film Superman dans un support en verre. Pour conserver la version numérique du film dans du verre, le Project Silica a utilisé des « voxels », une version tridimensionnelle des pixels qui affichent les images sur l’écran d’un PC. Une feuille de verre de 2 millimètres d'épaisseur peut stocker plus de 100 couches de « voxels ».

En 2016, Microsoft a commencé à montrer ses travaux de stockage de données sur des brins d'ADN, sorte d’équivalent biologique au stockage traditionnel sur disque ou sur mémoire flash. Comparativement, le stockage sur verre est sans doute plus pratique, car il résiste à une chaleur élevée, à l’érosion, et même aux micro-ondes, et ce, sans dégradation des données. Les couches infrarouges déforment le verre, un peu comme dans le cas des supports d'enregistrement DVD traditionnels, mais la déformation se produit à l'intérieur du verre et loin de l'air libre. « Les données sont relues à l'aide de lasers », a déclaré Microsoft dans un article de blog consacré au Projet Silica, et l'apprentissage machine est utilisé pour décoder la lumière lorsqu'elle se réfléchit sur le verre.

Le support en verre de Microsoft a passé plusieurs tests de résistance avec succès. (Crédit Photo : Microsoft)

Pour conserver durablement les films

Comme l’a précisé Microsoft lors de sa démo de Superman, cette technologie de stockage pourrait intéresser l'industrie cinématographique. En effet, on sait que les films analogiques sont fragiles, sujets à la décomposition et à d'autres dégradations. Beaucoup de films anciens ont été définitivement perdus parce que les négatifs originaux se sont détériorés à un point de non-retour. Les studios de tournage conservent plusieurs copies de leurs films à plusieurs endroits, séparant parfois les données couleur et les reconstruisant ensuite si nécessaire. Mais c'est un processus coûteux et laborieux.

Même si la démonstration de Microsoft montre que la solution n’en est plus au stade de projet théorique, elle n'est pas encore prête pour une mise en production. La revue Variety, qui a pu bénéficier d’une explication en détail de la technologie, indique que Microsoft n’a pas encore mis au point d’équipement de production commercialisable pour lire et écrire les données. Par ailleurs, on ne sait pas exactement combien de données peuvent être stockées par millimètre cube, ni quelle est la durée de vie de ces supports.

Les fabricants de supports de stockage essayent depuis longtemps de résoudre discrètement l’épineux problème de l’archivage des données. Des supports comme les CD et les DVD, longtemps utilisés pour le stockage des données, subissent une dégradation sûre et tranquille. De même, les disques durs ne peuvent pas tourner indéfiniment. Les fournisseurs de contenu doivent trouver un équilibre entre la maintenance constante de leur solution de stockage, des serveurs par exemple, et le coût de la préservation des données qu’il faut renouveler tous les 6 ans environ. Le verre est peut-être la solution, mais il y a encore du chemin à faire avant qu’elle n’arrive sur le marché.