Les relations de l'USF (association des Utilisateurs SAP Francophones) et de l'éditeur SAP ne sont pas toujours au beau fixe. Mais, à chaque Convention de l'USF, les deux reviennent ensemble, lors d'une conférence de presse, sur leurs sujets communs. L'édition 2019 à Nantes, les 9 et 10 octobre 2019, avec ses 1521 visiteurs uniques (2594 en cumulé sur les deux jours, 96 % des inscrits confirmés) n'a pas fait exception. « L'USF est, de très loin, le groupement d'utilisateurs des produits d'un éditeur le plus dynamique, et je me réjouis qu'elle soit réellement indépendante. On se dit les choses, même nos désaccords, avec cordialité. L'USF nous challenge et nous pousse toujours à nous améliorer », a indiqué Gérald Karsenti, PDG de SAP France. En lien avec le changement de modèle de SAP, Gérald Karsenti a tenu à changer largement les équipes commerciales dans l'Hexagone depuis son arrivée. Mais, désormais, l'équipe est stable.

La migration S/4 Hana est le sujet du moment et l'objet d'un livre blanc publié par l'USF à l'occasion de la Convention 2019 avec des partenaires dont SAP. Si certaines organisations y voient un intérêt métier, d'autres considèrent qu'il s'agit de back office sans intérêt, d'où des difficultés à le justifier budgétairement, et la majorité des organisations s'interroge. Gérald Karsenti a confirmé que l'arrêt de la maintenance de SAP ECC 6 aurait bien lieu en 2025. Annoncé dix ans en avance, le « ECCxit » n'aura aucune prolongation.

La difficulté de justifier la migration S/4

Les clients de SAP ont beaucoup investi depuis des années dans les solutions de l'éditeur et celui-ci veut convaincre les clients de poursuivre. Le PDG de SAP France a insisté sur la nécessité de ne pas tarder à lancer la migration car celle-ci ne se fera pas d'un claquement de doigts, d'autant qu'il y a une forte tension sur les compétences nécessaires disponibles. Mais Gianmaria Perancin a rappelé qu'il est difficile de montrer la valeur business de la migration, donc d'obtenir les budgets requis. « Si on ne migre que parce qu'on n'a pas le choix, c'est le pire pour tout le monde » a regretté Gérald Karsenti. Il a ajouté : « c'est aussi à nous à montrer l'apport business à nos clients. Parfois, cela n'est pas encore fait. Mais tous les clients que je rencontre veulent y aller. » Ce dernier constat est nettement nuancé par l'USF, inquiète que les clients SAP ne puissent pas préserver les investissements effectués. Le principal frein, pour l'USF, est bien le coût du projet sans preuve de ROI via des bénéfices métiers.

Eviter la migration pour motif purement technique

Gérald Karsenti a rappelé que SAP maintient ses investissements dans les deux lignes, on premise et cloud, laissant ainsi un vrai choix à ses clients, contrairement à la plupart de ses concurrents qui ne laissent pas ce choix et imposent le cloud only. La progression du chiffre d'affaires de SAP sur le cloud est cependant importante (+80 % sur le premier semestre 2019). Avec l'acquisition de Qualtrics, SAP a aussi renforcé son investissement dans l'expérience client. « La migration S/4 gérée comme une migration technique, c'est une double peine car, en gardant les spécifiques, on emmène sa dette technique », a déploré le président de l'USF. Pour Stéphane Moreau, il faut, en fait, bien positionner le curseur entre la migration purement technique, là où il n'y a pas de gisement de valeur business, et la refonte quand il y a valeur métier en lien avec les nouveautés technologiques. Cette approche a reçu l'assentiment de Gérald Karsenti qui a insisté sur le fait que les ERP actuels ne sont plus ceux des années 80 : les projets sont plus rapides et moins chers, sans oublier qu'il y a une vraie vague de sortie des spécifiques de la part des clients, ce qui réduit encore les coûts et les délais des projets.

La bascule S/4 étant un vrai projet, Gérald Karsenti a admis que « oui, cela rebat les cartes du marché ». Il y a donc un risque de fuite des clients vers des acteurs concurrents comme Salesforce, Workday ou Microsoft Dynamics. Mais l'émergence de nouveaux acteurs reste très complexe pour eux selon Gérald Karsenti. SAP sait très bien que beaucoup de clients ne choisiront pas du full SAP mais l'éditeur est capable d'être présent sur tous les domaines. Ce n'est pas forcément le cas des acteurs concurrents, même s'il y a des acteurs solides sur chaque segment du large périmètre de SAP, aucun n'est présent partout avec la même force. « Un jour ou l'autre, une entreprise quittera totalement SAP et le devoir de l'USF sera de l'accompagner jusqu'au dernier jour », a insisté Gianmaria Perancin.