Alors que de nombreux développeurs ont juste retravaillé leurs applications Android et iOS pour qu'elles fonctionnent sous Windows Phone 7, quelques indépendants ont choisi de se concentrer exclusivement sur l'OS mobile de Microsoft. Certains expliquent que la concurrence dans le monde WP7 est moindre comparé aux autres OS. D'autres s'y sont lancés parce qu'ils connaissent bien les outils de Microsoft. D'autres encore ne s'intéressent pas au fonctionnement d'iOS ni à celui d'Android. Quelle qu'en soit la raison, Microsoft cherche à les recruter. De son succès sur ce terrain dépendra celui de sa plateforme mobile.

Avec un peu plus de 30 000 applications disponibles pour Windows Phone 7, et seulement 2% du marché américain des smartphones, Microsoft est un très petit poisson dans un environnement très concurrentiel, rappellent nos confrères de PC World. Mais il grossit. Selon le décompte fait par l'éditeur, WP7 a récupéré près de 5 000 « apps » au cours des deux derniers mois. Bien sûr, ce n'est rien comparé au demi million d'apps sous iOS, ni même aux 200 000 que l'on peut trouver sous Android. Malgré tout, l'augmentation du nombre d'apps pour WP7 montre que certains développeurs jugent que la plateforme vaut la peine de s'y intéresser.

Un millier « d'évangélistes » WP7 dans le monde

Quand l'OS mobile est arrivé l'an dernier sur le marché, on disait que Microsoft offrirait l'équipement gratuit, garantirait les revenus et, même, rétribuerait les développeurs pour bâtir des apps pour sa plateforme, chose qu'Apple et Google n'ont jamais eu à faire avec iOS et Android. Chez Microsoft, on ne fait aucun commentaire sur l'éventuelle rétribution de développeurs. En revanche, l'éditeur ne cache pas qu'il cherche à attirer ces derniers avec l'aide de plus d'un millier de personnes chargées d'évangéliser sur la question à travers le monde, selon Matt Bencke, responsable des apps Windows Phone chez Microsoft. Ces « globe-trotters » vont chercher des recrues dans les conférences développeurs iOS et Android, dans les écoles, ou en organisant des concours de développement. « La dure réalité de notre monde concurrentiel fait que nous devons aller les chercher où ils se trouvent », souligne Matt Bencke. « Nous avons réalisé qu'il s'agissait un peu d'une course aux armements et que le nombre d'applications totalisées avait de l'importance ». 

Cette méthode d'évangélisation obtient un certain succès. Elle a donné lieu à Thumba, une application de retouche photo qui concurrence la plupart des outils équivalents sur iOS et un bon nombre de ceux disponibles pour Android. Il y a quelques années, ses développeurs, Pieter Voloshyn, ainsi que Luiz Thadeau et Jhun Iti, travaillaient sur le prototype d'un logiciel d'édition de photos utilisant Silverlight, à l'Université Méthodiste de Sao Paulo. Un évangéliste de Microsoft installé au Brésil a entendu parler de leur projet et les a contactés, fournissant à chacun un terminal sous Windows Phone 7 et leur permettant de proposer leur application avant l'ouverture de la boutique en ligne, en 2010. 

Microsoft a de la puissance sous le pied

Pieter Voloshyn indique que l'équipe n'a pas reçu d'argent de Microsoft pour développer l'application. Néanmoins, ils ont réuni une somme importante en la vendant (elle coûte 0,99 dollar). Les développeurs sous WP7 gardent généralement 70% des gains provenant de la boutique en ligne. Même s'il ne peut pas vivre de cette application, Pieter Voloshyn relate que ce qu'il a perçu l'a aidé à payer son mariage et sa lune de miel. Il ne s'émerveille pas de la position de Microsoft sur le terrain du smartphone, mais avoir été recruté par l'éditeur a constitué une expérience positive. « Je pense que les trois acteurs principaux du marché vont se partager le leadership ». Selon lui, si Microsoft arrive tard dans le jeu, il le fait bien et il a encore de la puissance sous le pied. Cela dit, lui-même n'utilise pas de téléphone sous WP7, arguant du prix trop élevé de ces modèles au Brésil, en raison des taxes. Etonnamment, même parmi les développeurs, Microsoft doit se battre pour que l'utilisation quotidienne d'un smartphone sous WP7 passe au rang des priorités.

L'histoire de Calum McLellan est un peu différente. Ce Néo-zélandais vivant en Allemagne travaille pour un éditeur local sur un système de gestion de données. Il a voulu essayer de créer des applications mobiles et pensé avoir assez de temps libre pour coder un peu le soir. « J'envisageais de le faire sur Android l'an dernier, puis WP7 est sorti », a-t-il expliqué à PC World. « Je connaissais bien Windows Presentation Foundation, Windows Communication Foundation et Silverlight. Je m'étais détourné d'Android en raison du nombre d'apps disponibles, de leur qualité moyenne assez pauvre et du manque de support aux développeurs. Je ne voulais pas travailler avec Apple parce que c'est très difficile pour quelqu'un qui ne dispose pas d'un Mac. Et, selon moi, ces trois plateformes mobiles sont les seules méritant d'être prises en considération actuellement ».

Des gains plutôt modestes

Malgré un emploi du temps professionnel de 45 heures par semaine, Calum McLellan a conçu l'application Feed Me, un lecteur de flux RSS qu'il a livré début 2011. Il indique qu'il passait environ 10 heures par semaine sur l'app et près de 30 à 40 heures juste avant la livraison d'une mise à jour. Il prévoit d'en sortir une nouvelle avant l'arrivée de Mango, la version 7.5 de l'OS, attendue pour cet automne.

Mais a-t-il gagné de l'argent ? « Pas encore », avoue-t-il en ajoutant qu'il espère en récupérer d'ici deux ans. Les publicités qui apparaissent sur son application gratuite lui ont permis de récupérer un peu d'argent, mais il lui faut un compte dans une banque américaine pour pouvoir le retirer (jusqu'à ce que le service de placement de publicités atteigne l'Europe, ce qui devrait se faire dans quelques mois). Quoi qu'il en soit, les gains sont modestes, si l'on considère la part de marché de Windows Phone. Il considère toujours que WP7 est une meilleure plateforme parce que, à l'instar de l'iPhone, il ne s'agit pas d'un environnement Open Source susceptible d'ajustements (cf les risques de fragmentation autour de l'OS de Google). « J'ai passé pas mal de temps avec Android l'an dernier, comparant les deux OS », explique-t-il, indiquant s'être débattu avec Android. « Windows Phone m'a fait gagner du temps ».  Malgré tout, les faibles gains financiers sont préoccupants, pas uniquement pour les développeurs, mais aussi pour Microsoft, qui veut clairement que les concepteurs d'apps gagnent gros. L'éditeur prévoyait une ruée vers l'or des développeurs. Mais où est-elle cette ruée ? « Nous voyons de nombreux signes positifs et nous avons déjà des développeurs qui gagnent beaucoup d'argent. Nous nous situons au début de la ruée vers l'or ».