Et de deux. Les conséquences judiciaires de l’incendie ayant touché le datacenter d’OVH à Strasbourg commencent à se concrétiser sur le front judiciaire. En février dernier, nous évoquions une première condamnation du fournisseur roubaisien par le Tribunal de Commerce de Lille métropole à plus de 100 000 euros de réparation. Une société de courtage de travaux avait perdu ses données dans l’incendie. OVH a depuis fait appel de ce jugement.
Des serveurs localisés au même endroit
Le 9 mars dernier, la même juridiction vient de condamner à nouveau l’hébergeur dans une autre affaire liée à l’incendie de Strasbourg à hauteur de 144 836 euros. En l’occurrence, l’affaire a été portée par la société Bluepad à Metz, éditeur de logiciel en mode SaaS de gestion de projet sur tablette et smartphone dans le secteur de la construction. Il avait souscrit à des offres OVH avec des serveurs localisés dans les bâtiment SBG1 et SBG2. Dans le premier, il disposait d’un serveur de production et dans le second un serveur de sauvegarde (pour une restauration rapide). Mais à la suite de l’incendie OVH a averti l’éditeur que les deux serveurs étaient en fait localisés dans le bâtiment SBG2 entièrement détruit. En conséquence, l’éditeur a perdu ses données.
Il a donc saisi le tribunal de commerce de Lille métropole en estimant qu’OVH a commis une faute dans la localisation des serveurs. Suite à l’incendie et à la perte de ses données, Bluepad réclamait un préjudice estimée à 330 155 euros pour « différents postes ayant induits des coûts tant matériels et techniques que financiers et humains ». Dans sa défense, OVH a excipé plusieurs arguments comme le fait que la mention « serveur se trouvant dans le datacenter SBG1 » indiquée dans un test est une simple référence interne sans valeur actuelle. Il considère aussi que l’incendie est un cas de force majeure exonératoire de toute responsabilité.
Le serveur de sauvegarde récupéré, puis effacé
Le premier argument sur l’aspect contractuel de la mention, le juge estime qu’elle « contient des informations contractuelles », corroborées par des capture d’écran établie par huissier de l’espace client OVH montrant que le serveur de production se trouvait dans le datacenter SBG1. En complément, le tribunal souligne qu’OVH échoue à justifier l’erreur de localisation, en se référant à l’article 8.2.3, relatif à la localisation et transferts des données des conditions générales. Ce dernier stipule qu’ « OVH s’interdit de modifier sans l’accord du client, la localisation ou zone géographique prévue à la commande ». « Ce qui démontre que la localisation est contractuelle », précise le juge.
Dans cette affaire, Bluepad a résolument joué de malchance, car dans le jugement on apprend qu’OVH a finalement pu récupérer le serveur de sauvegarde. Mais sans avertir le client, il a redémarré le serveur a l’arrêt depuis un mois a exécuté des scripts de purge système et a effacé les données anciennes. C’est donc un serveur vide qui a été transmis à Bluepad. Une faute estime le tribunal.
Près de 145 000 euros de préjudice
Avec ces deux fautes caractérisées, le tribunal de commerce de Lille métropole a établi le montant des préjudices de Bluepad à 144 836,69 euros. Dans le détail, plus de 21 600 euros sont liés à la reconstitution de la base de données clients, plus de 36 900 euros sont consacrés à la chute des ventes de prestations, 29 574 euros se réfèrent au recours à des moyens externes supplémentaires, 6 000 euros pour la reconstitution des données internes, 6 555 euros relatifs à des frais divers exposés, 2 165 euros au titre des frais de justice, 12 000 euros au titre de perte de clients et de chiffre d’affaires et enfin 30 000 euros au titre de préjudice moral.
Il faut ajouter à cela 9 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile. OVH peut faire appel de cette décision. A noter par ailleurs qu'il existe toujours une action collective contre OVH concernant des entreprises victimes de l'incendie du datacenter de Strasbourg.
MAJ : OVH nous a indiqué par mail, "Nous avons pris connaissance de la décision du Tribunal de Commerce de Lille Métropole dans le cadre du contentieux qui nous oppose à Bluepad. Cette dernière doit encore nous être signifiée. Dès que ce sera le cas, nous entendons faire appel de cette décision afin de faire valoir l’ensemble nos arguments".
Faire appel est particulièrement indécent de la part d'ovh. L'indemnisation est bien faible à mon sens.
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