Yahoo vient d'annoncer le départ de son co-fondateur Jerry Yang. Ce dernier, qui a connu la période de gloire du portail (de 1995 à 2000) et les difficultés de ces dernières années, a démissionné mardi dernier du conseil d'administration. Il abandonne également sa place au sein du board de Yahoo Japan et du groupe chinois Alibaba, les deux grands partenaires asiatiques du portail.

«Mon temps passé chez Yahoo, depuis sa fondation jusqu'à nos jours, m'a permis de vivre les expériences les plus passionnantes et enrichissantes de ma vie », a simplement déclaré Jerry Yang dans une lettre adressée à Roy Bostock, président du conseil d'administration. « Toutefois, j'ai décidé  de poursuivre d'autres intérêts en dehors du groupe. » Cette annonce intervient deux semaines après la nomination de l'ex-patron de Paypal, Scott Thompson, aux commandes de Yahoo, pour remplacer Carole Bartz, limogée en septembre dernier.

«C'est triste, parce que Jerry Yang a été une telle institution dans la Silicon Valley depuis si longtemps, mais son départ permettra à  Scott Thompson de prendre toutes les décisions sans être remis en cause »  a estimé Charlene Li, analyste chez Altimeter Group, « Yang a été une figure dominante chez Yahoo, après avoir été non seulement son co-fondateur, mais aussi son PDG », a-t-elle ajouté. « Il est difficile d'opérer dans l'ombre de quelqu'un comme lui. Son départ libèrera réellement  Scott Thompson ». Greg Sterling,  analyste chez Sterling Market Intelligence pense que Jerry Yang pourrait être l'agneau sacrifié et s'attend à d'autres démissions et changements au sein du board de Yahoo.

Une page se tourne pour Yahoo

De son côté Allen Weiner, du Gartner, voit le départ de Yang comme un vote de confiance qui pourrait laisser entendre que le groupe est suffisamment fort pour réussir dans le monde numérique, sans ses conseils. « Compte tenu de l'avenir du portail en tant que média numérique, le manque d'expertise de Yang en la matière peut faire de lui un rouage inutile», considère-t-il.

Mais pour  les analystes, peu importent les événements internes qui ont conduit au départ de Jerry Yang. Ils estiment que sa démission est le signe d'un nouveau départ pour Yahoo et son récent PDG.  « Le signal très clair est qu'une nouvelle page se tourne pour Yahoo, et que tout ce qui est arrivé précédemment ne sera pas nécessairement le chemin que le groupe prendra à l'avenir », prévoit Charlene Li.

Jerry Yang a co-fondé Yahoo avec David Filo en 1995, mais il  toujours été le plus visible des deux. Après son lancement en tant que répertoire web et moteur de recherche, Yahoo a évolué en un vaste portail fournissant des services de communication comme la messagerie et une variété de contenus, tels des news, des informations financières et du  divertissement.

Yahoo a été leader jusqu'au milieu des années 2000, mais Google a alors commencé à gagner en force, grâce à la puissance de son moteur de recherche, ce qui lui a  permis d'asseoir sa domination sur le marché très rentable des annonces publicitaires.

Une image ternie par l'échec du rachat par Microsoft

Terry Semel, qui était PDG de Yahoo depuis 2001, a finalement été limogé à la mi-2007. C'est à ce moment là que Jerry Yang a pris les rennes du groupe, en promettant le grand retour du portail. Mais après six mois de mandat, il a dû faire face à une OPA hostile de Microsoft au début de 2008.

Cette tentative de rachat est devenu un feuilleton qui a généré beaucoup de gros titres dans la première moitié de 2008, mais Jerry Yang et les membres du conseil d'administration ont résisté à la reprise par la firme de Redmond, arguant différents points, notamment que Yahoo valait plus que ce que Microsoft offrait. L'éditeur a finalement décidé de renoncer, après une dernière offre d'environ 47 milliards de dollars.

Yang, qui avait jusqu'alors été un personnage charismatique et surtout apprécié, en est ressorti avec une image ternie, et les analystes financiers et les actionnaires de la société lui ont longtemps reproché l'échec de ce rachat.