Face au développement de l’IA, les entreprises reconfigurent activement leurs modèles d’organisation et modifient leur politique d’emploi. C’est le principal constat d’une étude réalisée par le cabinet IDC pour Deel, l’un des spécialistes de la gestion de la paie, auprès de 5 500 entreprises dans 22 pays, dont 250 en France. Sur le territoire national, 83 % d’entre elles observent déjà des transformations ou des suppressions de postes générées par l’IA. Cette technologie est de plus défavorable aux jeunes diplômés. En effet, 67 % des répondants prévoient de réduire leurs recrutements de profils juniors d’ici trois ans. Résultat : les viviers internes s’amenuisent, et les parcours de montée en compétences deviennent plus difficiles à structurer.
De plus, 75 % des dirigeants français reconnaissent qu’il devient plus complexe de recruter et de former des profils qualifiés, faute de parcours d’apprentissage adaptés aux enjeux posés par l’IA. En parallèle, 70 % constatent une raréfaction des opportunités de formation qui permettaient jusqu’alors aux jeunes talents d’apprendre par la pratique, désormais en partie automatisées. Pour s’adapter à cette mutation, les entreprises misent en priorité sur la requalification de leurs équipes. 62 % d’entre elles déclarent investir activement dans la formation à l’IA, afin de faire évoluer les savoir-faire nécessaires à leur compétitivité.

Les principaux freins rencontrés au niveau mondial par les entreprises pour recruter dans l'IA. (Source: IDC/Deel)
Des programmes d'intégration à l'IA
« Ce que nous observons en France s’inscrit dans une dynamique plus large à l’échelle européenne : les entreprises du continent font face aux mêmes arbitrages entre automatisation des tâches, raréfaction des profils juniors et besoin urgent de requalification », souligne Jeremy Mimoun, responsable France de Deel, dans un communiqué. Les entreprises françaises ont amorcé des actions pour ajuster leurs effectifs aux besoins que nécessite l’IA : 24 % ont déjà lancé des restructurations significatives pour intégrer l’IA à leurs process, mais seulement 3 % déployé des équipes transverses dédiées à la montée en compétences.
De leur côté, 35 % admettent ne pas savoir qui pilote cela en interne. A cela s'ajoutent plusieurs obstacles freinent le déploiement de ce virage vers l'IA : 55 % signalent un manque d’engagement des collaborateurs, 50 % évoquent des contraintes budgétaires alors que 57 % peinent à trouver des formateurs qualifiés.

Défis posés par les initiatives et les embauches des entreprises mondiales en matière d'IA. (Source:IDC/Deel)
Une redéfinition des critères à l'embauche
Le rapport souligne aussi une accélération de la transformation incitant les entreprises à revisiter leurs critères de recrutement : seules 4 % des organisations françaises considèrent encore les diplômes universitaires comme essentiels pour les postes juniors. Dans ce contexte, trois critères d’employabilité apparaissent comme prioritaires : certifications techniques ou bootcamps en IA (64 %), pensée critique et résolution de problèmes (59 %), et compétences en communication et collaboration (50 %). Dans le même temps, les employeurs font face à une tension accrue sur les profils IA : 49 % pointent leurs infrastructures IT comme frein au recrutement de profils spécialisés. De leur côté, 45 % souffrent d’une pénurie de talents IA et près de 50 % sont prêts à offrir aux experts des agents virtuels des salaires 25 à 100 % supérieurs à ceux des autres postes techniques.
À l’international, les pratiques face à l’IA sont contrastées : le Canada (77 %), le Brésil (76 %) et Singapour (74 %) sont en avance sur les investissements en formation. La nature des transformations diffère aussi selon les régions : la Nouvelle‑Zélande, l’Argentine et les États‑Unis affichent des taux parmi les plus élevés de suppression de postes liés à l’IA (jusqu’à 53 %), tandis qu’en Chine, seuls 11 % des postes sont supprimés mais 79 % redéfinis.

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