Alors que les hyperscalers comme AWS ou Google se concentrent sur l’accès à des ressources électriques toujours plus importantes allant jusqu’à envisager la construction de mini-centrales nucléaires à proximité de leurs sites les grandes entreprises, notamment celles du Fortune 500, doivent quant à elles faire face à une autre difficulté : la gestion de la puissance à l’échelle de leurs infrastructures.
Selon les dernières analyses du cabinet Dell’Oro Group, la consommation énergétique par rack, qui s’élevait en moyenne à 150 kW il y a quelques années, atteint désormais jusqu’à 1 mégawatt dans certains environnements fortement équipés en GPU. Cette hausse spectaculaire s’explique par trois facteurs : l’augmentation de la consommation des CPU, désormais autour de 500 watts, l’ajout massif de GPU dédiées aux traitements IA, et une densification accrue des équipements pour réduire la latence entre les composants.
L’essor des modules externes d’alimentation
« Les GPU doivent être alimentés en données en continu, et ils doivent échanger entre eux de manière très rapide. C’est ce besoin de proximité, plus encore que la puissance elle-même, qui bouleverse aujourd’hui les architectures des data centers », explique Alex Cordovil, directeur de recherche sur les infrastructures physiques et le refroidissement liquide chez Dell’Oro Group.
Face à ces contraintes, des solutions émergent. Certaines entreprises adoptent une architecture reposant sur des modules d’alimentation externes, appelés side-cars, installés à côté des racks. Ces unités peuvent alimenter jusqu’à quatre racks, tout en libérant de l’espace dans les baies pour plus de capacité de calcul et en réduisant les distances entre les équipements, afin de minimiser la latence. Mais ces architectures ultra-denses restent encore largement expérimentales. « Nous entrons ici sur un terrain inconnu. Il n’existe pas de manuel expliquant comment gérer efficacement un rack consommant 1 MW. Cela demande de repousser les limites et de concevoir de nouvelles approches », prévient Alex Cordovil.
Pénurie de compétences techniques
À cette complexité s’ajoute une problématique de compétences. De nombreux datacenters d’entreprise utilisent encore des prises proches de celles que l’on trouve dans le résidentiel. Historiquement, il n’était pas nécessaire de disposer de techniciens certifiés en électricité. Ce n’est plus le cas aujourd’hui.La manipulation sécurisée de ces installations requiert des compétences en électricité, révélant ainsi un important déficit de main-d’œuvre qualifiée.
Les certifications IT de base, comme le CompTIA A+, ne suffisent plus face à la complexité croissante des centres de données. « Le manque de personnel qualifié était déjà un enjeu important. La hausse de la densité énergétique ne fait qu’aggraver ce déséquilibre structurel », constate Alex Cordovil. Pour y faire face, il appelle à une montée en compétences des techniciens, une simplification des infrastructures physiques par les fournisseurs et adoption de systèmes plus intelligents et automatisés pour alléger la charge opérationnelle.
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