Une nouvelle fois, Amélie de Montchalin a insisté, à l'occasion d'un déplacement à l'Institut National de l'Information Géographique et Forestière (IGN) le 27 septembre 2021, sur la place de la data dans la stratégie du gouvernement. La ministre de la Transformation et de la Fonction Publique en a profité pour assister à des démonstrations de nouvelles technologies mises en oeuvre par l'IGN pour produire de la donnée géographique. Pas de rupture suite aux annonces précédentes mais bien une continuité : la présentation a été l'occasion de réunir tous les administrateurs ministériels des données, des algorithmes et des codes sources (AMDAC). Et la ministre a rappelé les investissements consentis : 142 millions d'euros issus du Fonds de Transformation, 80 projets financés dans le cadre de France Relance et 136 millions d'euros issus de France Relance sur le seul sujet de la sécurité des systèmes d'information. Sur ce dernier point, la ministre a rappelé l'importance de la stratégie cloud et l'obligation, pour les administrations, de n'utiliser que des « clouds de confiance » dès lors qu'il y a des données personnelles ou sensibles. « Par exemple, la Géoplateforme est hébergée par OVH » a rappelé Amélie de Montchalin.



La conférence a été l'occasion aux administrateurs ministériels des données, des algorithmes et des codes sources (AMDAC) de tous se rencontrer.

Les ambitions de la politique publique en matière de données reposent sur un large partage en plus d'une collecte de plus en plus efficiente et aussi sur une nouvelle gouvernance. Ainsi, chaque ministère a défini une « feuille de route » sur le sujet, sous la responsabilité d'un administrateur ministériel des données. La ministre souhaite également intégrer au mieux toutes les collectivités territoriales et services publics divers à cette politique. Elle a pris l'exemple de la justification des revenus pour les inscriptions à la cantine scolaire des enfants : le but est que la collectivité puisse récupérer l'information auprès de la DGFiP (Direction générale des Finances Publiques) sans avoir à demander un justificatif papier aux familles. Plusieurs objectifs sont poursuivis : simplifier les démarches administratives des Français, en systématisant le partage de données entre administrations pour ne pas demander des justificatifs ; stimuler l'innovation et la création de nouveaux services d'intérêt général et privés ; améliorer l'efficacité des politiques publiques, en renforçant le pilotage par les données, à l'instar du baromètre des résultats de l'action publique ; promouvoir la transparence de l'action publique ; et enfin faciliter le travail des chercheurs en simplifiant leur accès aux données publiques.

Des talents et des projets

L'ouverture des données (open-data) est donc un pilier de l'ambition gouvernementale. Cette ouverture sert bien sûr à décloisonner mais aussi à récolter des contributions citoyennes. Des citoyens peuvent ainsi compléter les données géographiques ou de bon état des infrastructures publiques à l'occasion d'une promenade dans un lieu donné. Les personnes handicapées peut confirmer ou au contraire amoindrir un score d'accessibilité d'un lieu en fonction de leur vécu propre.

Selon les relevés de l'INSEE et de la Dinum, les administrations emploient actuellement 2000 experts de la donnée. Mais ce chiffre est insuffisant face aux ambitions affichées. 400 recrutements sont donc prévus. Pour cela, malgré une forte tension sur le marché pour ces profils, plusieurs pistes sont étudiées. Bien entendu, il s'agit d'accroître les compétences de fonctionnaires en poste pour en faire des experts data. En termes de recrutement pur, l'État entend bien développer sa « marque employeur » autour de l'utilité des missions, correspondant bien à la recherche de sens qui est un gimmick pour les jeunes générations. Enfin, les experts data embauchés dans un ministère pourront consacrer 10 % de leur temps à des missions pour d'autres administrations.

Deux cartographies complémentaires du territoire

L'obsession demeure de livrer des réalisations concrètes et avec une utilité effective. L'automatisation et l'industrialisation permettent de baisser les coûts et ainsi de rendre possibles des projets qui auraient été trop onéreux. Deux projets de cartographies ont ainsi été présentés à la ministre. OCSGE-NG (Occupation des sols à grande échelle, nouvelle génération) s'effectue dans la prolongation de l'utilisation de la photographie aérienne classique. L'objectif est de définir avec une résolution élevée (un pixel pour un carré de 20cm) la nature du terrain (bâtiment, surface agricole, forêt, route, etc.) sur l'ensemble du territoire français avec un rafraîchissement des données tous les trois ans. L'intelligence artificielle permet de gagner beaucoup de temps dans le travail de catégorisation de chaque pixel.

De la même façon, une deuxième cartographie intégrale du territoire est opérée avec la technologie Lidar (« radar laser ») en 3D. Il s'agit ici de nuages de points à raison d'un point tous les 30 cm avec une précision d'altitude de 10cm. « La France est plutôt en retard en matière de Lidar par rapport à la Suisse, aux Pays-Bas ou à l'Espagne » a regretté Sébastien Soriano, directeur général de l'IGN, devant la ministre en pointant également que le projet n'était financé qu'à hauteur d'une seule passe. Là encore, l'intelligence artificielle permet la qualification des points. C'est peut-être contre-intuitif mais une catégorisation plus précise permet parfois à l'intelligence artificielle de commettre moins d'erreurs car la variation de la donnée source est moindre dans une catégorie donnée. Dans les deux cas, l'apprentissage machine en cours est long et constitue la grande difficulté.