Les eurodéputés viennent d'adresser un carton jaune à l'une des mesures phares du rapport Olivennes : la suspension de l'abonnement des internautes coupables de s'être adonnés au téléchargement illégal. Réunis à Strasbourg le 10 avril, les parlementaires européens ont ainsi adopté par 314 voix contre 297 un amendement à un rapport sur les industries culturelles en Europe, lui-même adopté. L'amendement avait été déposé notamment par Michel Rocard. Le texte presse les Etats membres et l'exécutif européen d'« éviter l'adoption de mesures allant à l'encontre des droits de l'Homme, des droits civiques et des principes de proportionnalité, d'efficacité et d'effet dissuasif, telles que l'interruption de l'accès à Internet ». Un avertissement adressé à Paris C'est précisément ce que prône le rapport remis en novembre 2007 par Denis Olivennes au Président de la République. Le document rédigé par l'ex patron de la Fnac vise à livrer une série de mesures pour endiguer le téléchargement sauvage et développer une offre légale. Parmi les mesures évoquées, on y trouve la mise en place d'un « mécanisme permettant d'avertir les internautes contrevenants et, le cas échéant, de les sanctionner, notamment par une suspension ou une rupture de leur contrat d'abonnement ». Selon l'auteur du rapport adopté jeudi par les députés européens, le socialiste français Guy Bono, ces mesures répressives « sont dictées par des industries qui n'ont pas été capables de changer leurs modèles économiques faces aux nécessités imposées par la société de l'information ». Toutefois, si cette position a recueilli l'approbation d'une majorité de parlementaires, elle n'acquière pour autant aucune valeur normative. Le rapport duquel elle est issue n'a en effet pas force de loi et ne renferme que des constats et des suggestions. Il n'en reste pas moins qu'avec son allusion directe au rapport Olivennes, il peut être lu comme un avertissement adressé à la France, quelques semaines avant que le Palais Bourbon ne se penche sur le projet de loi chargé de transposer en droit les propositions de la mission Olivennes. L'adoption d'une mesure jugée contraire aux droits de l'Homme par Strasbourg risquerait en effet de susciter quelques remous. C'est précisément ce qu'affirme l'UFC-Que choisir, qui encourage le gouvernement à « répondre à l'appel des eurodéputés et renoncer à un projet de loi à contresens de l'histoire numérique ».