ISACA-AFAI, association internationale pour un digital de confiance, a publié, via son programme SheLeadsTech, la deuxième édition de son baromètre annuel. Celui-ci dresse un état des lieux de l’emploi des femmes dans le secteur du numérique et apporte des pistes pour attirer, garder les meilleurs profils féminins et les encourager à évoluer dans ces métiers. Si dans l’ensemble la mixité de ces métiers s’est améliorée, l’évolution reste toutefois extrêmement lente, les femmes demeurant fortement sous-représentées dans le monde de l’IT. Gina Gullà-Menez, responsable du programme SheleadTech et administratrice ISACA-AFA, indique ainsi que la sous-représentation des femmes est surtout visible au niveau des postes à responsabilité.

« Les postes de comité de direction dans la tech ne sont représentés qu’à 17 % par des femmes. Les chiffres montrent une forte variabilité selon les pays, les secteurs et les postes » indique-t-elle, avant de poursuivre « Les femmes représentent globalement toujours moins de 20 % de la main-d’œuvre totale dans le secteur de la technologie. Il y a seulement 11 % de femmes dans les équipes de développement, contre 82 % parmi les fonctions support ». Et cette sous-représentation début dès les études supérieures. Ainsi, dans les programmes universitaires en informatique, en ingénierie et en mathématiques, seulement 17 % de l’ensemble des étudiants sont des jeunes femmes. Ce qui impacte directement leur accès à des emplois dans la technologie.

Créer et financer sa propre entreprise, un défi de taille

Au niveau des créations d’entreprises, peu de femmes décident de se lancer. Pour mémoire, en 2018, seules 10 % des entreprises dites innovantes ont été fondées par des femmes. Effet boule de neige ou non, le fait est que l’accès au financement est tout aussi compliqué. En 2021, 88 % du montant total levé par les start-ups françaises revient à des équipes de fondateurs. Elles lèvent en moyenne 4 millions d’euros de plus que les équipes composées d’au moins une 1 femme.

De même, un homme lève 1,6 fois plus et une femme 3,4 fois plus en s’alliant avec un homme plutôt qu’avec une femme. « Ces chiffres soulignent l’importance de promouvoir la mixité dans la tech et de travailler à réduire les disparités de genre dans le domaine. Ceci est non seulement une préoccupation sociétale, mais également un enjeu de disponibilité de main-d’œuvre, compte tenu de la pénurie critique de professionnels de la technologie qualifiés dans de nombreuses entreprises » rappelle Gina Gullà-Menez. « Il serait extrêmement bénéfique pour le numérique d'accroître la représentation féminine et d'encourager les femmes à entreprendre dans ce domaine », souligne-t-elle, avant d'ajouter : « La diversification de l’écosystème de l'IT revêt une importance éthique critique. En outre, en assurant la pérennité de ces perspectives d’emploi, l’expansion économique serait favorisée. »

Les entreprises ont pris des mesures pour encourager les femmes

SheLeadsTech a donc envoyé un questionnaire sous forme de questions ouvertes et/ou fermées auxquelles ont répondu les entreprises participantes. Le baromètre porte sur quatre axes : attirer les femmes vers le numérique, garder les talents féminins du numérique, encourager les femmes à évoluer dans le secteur et, enfin, ouvrir la cybersécurité aux femmes. L’analyse des réponses apportées au questionnaire met en lumière une dizaine de pratiques mises en place par les entreprises technologiques pour améliorer la mixité de leurs équipes. Cela inclut notamment des mesures concernant le recrutement, mais aussi des actions pour améliorer les conditions de travail, ou en amont, pour améliorer l’image des métiers du numérique. Notons par exemple que 80 % des répondants déclarent avoir aménagé des conditions de travail propices au bon équilibre vie privée/vie professionnelle. De même, 75 % des répondants déclarent sensibiliser en interne sur le thème du sexisme tandis que 72 % ont mis en place un réseau féminin interne ou externe. Pour attirer davantage de femmes vers les métiers du numérique, 68 % des entreprises sondées ont également décidé de revoir leurs pratiques de recrutement.

En outre, 62 % des déclarants disent avoir mené des actions auprès d’écoles pour faire connaître les métiers du numérique, insistant sur le fait que le numérique n’a pas de genre, et que de nombreuses opportunités de carrière sont possibles. 56 % mènent également des campagnes de communication et de recrutement pour lutter contre l’impact des stéréotypes de genre. Cette action a pour effet en interne de faire disparaître une incompréhension genrée des métiers. En externe cette dynamique permet d’affirmer un accueil des jeunes filles dans les métiers du numérique, comme un axe central de développement, et une garantie de perspective de carrière, propre à attirer les profils les plus compétents. Enfin, 45 % sensibilisent le public féminin sur les avantages des métiers du numérique. Il s’agit ici de ne pas décourager les jeunes filles et de leur proposer des métiers qui au contraire sont accessibles. En outre, les entreprises rappellent que l’immense variété de métiers aux salaires attractifs, et aux conditions de travail confortables, donne accès rapidement à des postes d’encadrement. La diversité dans la cybersécurité fait également partie de l’agenda des entreprises puisque 15 % des répondants ont mis en place des politiques de recrutement de femmes dans la cybersécurité, afin d’ouvrir à la mixité les recrutements dans ces postes en pénurie de candidats.

Poursuivre la sensibilisation pour une prise de conscience collective

Et si la liste des actions d’ores et déjà mises en œuvre s’allonge, celle qui restent à mettre en place est tout aussi longue. En effet, le baromètre recense six axes d’actions complémentaires prioritaires identifiés : la formation et l’accès à l’emploi, le recrutement, les mesures salariales, la sensibilisation aux agissements sexistes et aux violences sexuelles, l’écoute de la parole des femmes et de leur expérience, et, enfin, le soutien des femmes dans la prise de postes de direction. « Dans notre ère où les décisions reposent sur les données, l'écart entre les données collectées chez les femmes et chez les hommes est extrêmement préoccupant car il reflète une méconnaissance de notre société dans toute sa diversité et sa complexité », souligne Gina Gulla Menez, qui conclut : « Afin de promouvoir un éco système numérique équitable et inclusif, il est essentiel de sensibiliser et de stimuler à une prise de conscience de la situation actuelle ainsi que de ses répercussions : la santé et le bien-être au travail, la productivité des collaborateurs, l'efficacité des organisations. »