Chaque année, France Digitale prend le pouls des start-ups IT dans l’Hexagone et pour la première fois cette année des structures d’accompagnement. Le dernier baromètre réalisé avec EY montre qu’en 2025, l’écosystème continue de croître, mais à un rythme plus faible, face aux incertitudes politiques et économiques. L’un des faits marquants est le décrochage des levées de fonds observé sur le premier semestre 2025. Après plusieurs années de hausse, le capital-risque en France a connu un net repli, les start-ups IT françaises ayant levé près de 2,8 Md€ en six mois. Soit une baisse de 35 % en valeur et de 24 % en volume par rapport à la même période l’an dernier. Or, lever des fonds reste une option prioritaire et nécessaire pour les jeunes entreprises.
Les dossiers des structures les plus jeunes qui cherchent des financements en seed ou série A sont les plus impactés. Pour France Digitale, si cette tendance venait à se confirmer dans les prochaines années, elle risquerait d’engager un réel ralentissement de la capacité d’innovation française. À l'échelle européenne, la France cède sa première place au profit de l'Allemagne, qui creuse l'écart avec 3,6 Mds € levés, portée par un marché du growth equity en hausse de 17%, malgré un léger recul global. La France, elle, subit une forte chute des tours de table supérieurs à 100 M€, en baisse de 87 %.

Levées de fonds en France vs en Allemagne et au Royaume-Uni en 2025. (Source: France Digitale)
Des investissements en hausse dans l'IA
Néanmoins dans certains secteurs, tels que les logiciels, les jeunes pousses montrent une certaine résilience et continuent de séduire les investisseurs. « La faculté des entreprises à innover et à s’adapter, en particulier dans les domaines comme l’intelligence artificielle, pourrait transformer profondément le paysage entrepreneurial français dans les années à venir » analyse Franck Sebag, associé chez EY, dans un communiqué. L’IA représente 12% des dépenses IT des start-ups, et pour 81%, elle génère des gains de productivité (contre 10% qui ne voient aucun gain de productivité, et 9 % qui n'ont pas intégré l'IA).
Les start-ups de l’IT ont vu leur chiffre d'affaires global augmenter de 16% entre 2023 et 2024, en net ralentissement par rapport à la période 2022-2023 (+27%). Pourtant, elles sont 1 200 de plus sur la même période avec un total de 16 200 structures sur le territoire. Si le nombre de créations d’entreprises reste supérieur aux fermetures, cette tendance est toutefois en baisse par rapport à la période 2023-2024, qui avait vu la création nette de 3 500 jeunes pousses IT d'une année sur l'autre. Par ailleurs, une donnée retient l’attention : dans certaines régions, le nombre de jeunes entreprises diminue. C’est notamment le cas en Île-de-France, qui accuse une baisse nette (-200) en un an.

L'écosystème des start-ups IT en France en 2025. (Source: France Digitale)
150 000 emplois créés en un an
Sur le front de l’emploi, les start-ups IT françaises représentent 1,45 million d’emplois (dont 500 000 internes), en progression de 11,5 % en un an, signe de leur capacité à se développer malgré le contexte économique incertain. L'activité du secteur a permis de générer 150 000 emplois en 1 an. Le rythme de création d'emplois est toutefois inférieur à la période 2023-2024, qui avait vu les chiffres augmenter de 18 %. Si on regarde l'emploi interne, l'écosystème a surpassé ses propres prévisions, avec 50 000 recrutements réalisés en un an, soit 10 000 de plus que l'objectif initial. Quant à l'emploi direct et indirect, bien qu'en augmentation de 11,7 % sur un an, il ralentit fortement par rapport à la période précédente (+21 %), sous l’effet du ralentissement économique et la baisse de la demande.
Les structures d'accompagnement ne sont pas épargnées par la conjoncture : 55% ont observé une baisse de leurs ressources au cours des derniers mois, en particulier pour celles issues de financements privés, ce qui a un effet direct sur la capacité d'accompagnement. Les structures dont les ressources baissent ont réduit le nombre d’entités accompagnées d'environ 32%, alors que celles dont les ressources sont stables ou augmentent ont vu ce chiffre augmenter de +42 %.
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Situation de l'emploi dans les start-ups IT françaises en 2024 et 2025. (Source: France Digitale)
Des inquiétudes face aux arbitrages financiers
Interrogé sur ses perspectives, le secteur juge le contexte économique et politique national comme particulièrement risqué dans les 12 prochains mois. Les principales craintes portent sur les arbitrages défavorables dans le prochain projet de loi de finances. Moins de six mois après l’adoption de la loi de finances pour 2025, les start-ups témoignent de l’impact lourd et immédiat des coupes dans plusieurs dispositifs de soutien à l’innovation, en particulier le Crédit impôt innovation, le Crédit impôt recherche et le Statut JEI : perte de trésorerie, réduction des investissements et gel des embauches représentent les principaux ajustements des start-ups face à cette nouvelle donne fiscale. De ce fait, les projections sur l’emploi dans les 12 prochains mois sont tendues : 14 % des start-ups du numérique envisagent de réduire leur masse salariale (contre 5 % l’an dernier).
A cela s’ajoute le contexte international. L’attitude du président des États-Unis Donald Trump sur les droits de douane place l’écosystème face à un dilemme : d’un côté, les entreprises souhaitent maintenir l’accès de leurs produits et services au marché américain, et de l’autre bénéficier de solutions technologiques - notamment américaines - au coût le plus faible possible. Quant aux investisseurs, ils s’emploient à maintenir l’attractivité de la France et de l’Europe face à la concurrence étrangère. De leur côté; les investisseurs étrangers, qui restent minoritaires représentent moins de 17 % des actifs sous gestion du capital risque en France.

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