Appelé en avril dernier pour succéder à Marc Gennevois pour piloter la direction générale de SAP France, Gérald Karsenti n'a pas eu besoin de beaucoup de temps pour trouver ses marques après un passage éclair chez Oracle France. « L'équipe d'Oracle France est formidable mais il faut avoir le sentiment d'avoir ce qu'il faut pour faire le job », a expliqué le nouveau directeur général France de SAP interpellé par la rédaction de LMI à l'occasion d'un déjeuner presse organisé ce mercredi 16 mai au siège de la filiale française du géant des progiciels allemands, sur son départ surprise du géant américain du progiciel. « Il faut avoir des moyens humains, financiers et de la latitude pour pouvoir changer l'entreprise ». Des ingrédients qui ont apparemment manqué pour que la mayonnaise prenne...

Désormais installé à la tête de SAP France, l'ancien patron de HP et HPE France qui a auparavant passé précédemment de longues années chez IBM et Capgemini, a semble-t-il déjà les idées claires sur les leviers à actionner pour doper le business d'une société dont il est par ailleurs mandataire social. « Le plus important est d'organiser plus que jamais l'entreprise autour du client », a martelé Gérlad Karsenti. « Mettre le client au coeur de notre stratégie, cela change tout ». Interrogé sur le fait de savoir si cela n'était pas le cas jusqu'à présent, le directeur général de SAP France a précisé sa pensée : « Il faut gagner en valeur et aller dans le cloud en s'appuyant sur notre grand point fort qui est notre compétence verticale pour mieux comprendre les métiers en nous appuyant sur nos partenaires Capgemini, Accenture, Atos, Sopra, Bearing Point, PwC, Deloitte, etc. »

50% du business dans le cloud et chiffre d'affaires doublé d'ici 5 ans

Pour accompagner les grandes ambitions de SAP France - à savoir un doublement de son chiffre d'affaires d'ici 5 ans - son nouveau directeur général s'appuie sur plusieurs piliers. Dont celui qui consiste à développer ses revenus en régions en répondant aux besoins d'entreprises de taille plus modeste que les grands comptes comprenant les PME/PMI et les sociétés de taille intermédiaire. « L'objectif est d'accélérer sur le segment PME où la demande client croit énormément. SAP n'est pas que l'entreprise des grands groupes et nous avons des solutions agiles qui peuvent accompagner ces entreprises. Les régions, j'y suis super attaché et je suis de ceux qui pensent que les décisions et les influenceurs ne sont pas qu'à Paris ».

Parmi les grands axes de développement que compte activer Gérald Karsenti, on trouve aux premières loges le renforcement de la division general business du groupe regroupant les activités channel, réseaux de partenaires, intégrateurs et également les investissements dans les start-ups. « On va la faire grossir dans le temps avec un objectif de croissance à deux chiffres », a indiqué le directeur général de SAP France sans toutefois donner de précision sur ce que cela représente en valeur. Dès son arrivée, Gérald Karsenti a par ailleurs mis en place un programme de customer success piloté au plus haut niveau de la direction générale pour assurer le suivi dans le temps de la satisfaction client. « Il ne s'agit pas simplement de savoir si un client est content ou pas mais de l'accompagner et de l'aider à structurer ses projets dans le temps sur toute sa chaine de fonctionnement », explique Gérald Karsenti. Au siège du groupe, organisé autour de différentes project rooms thématiques (sport, industrie, santé...), une success room a été aussi mise en place dans laquelle les clients de l'éditeur bénéficient de conseil pour industrialiser et faire gonfler le volume de leur activité. « Il ne faut jamais oublier que le client est au centre de tout, qu'un client satisfait est un client qui commande et que le plus dur est de conquérir et de garder sa confiance », lâche Gérald Karsenti.

Une accélération des investissements en France

Pour coller au plus près des besoins de ses clients, l'éditeur n'hésite pas à inclure dans ses produits une touche de personnalisation pour répondre à des demandes particulières. « On travaille en direct avec beaucoup de partenaires là-dessus car on veut que les solutions que l'on vendent répondent à des problèmes spécifiques. C'est facile à dire mais difficile à faire », explique Gérald Karsenti. Visant à terme 50% de son activité dans le cloud, le directeur général de SAP France a précisé que le volume de chiffre d'affaires représenté par cette activité ressortait en croissance à deux chiffres - voire trois chiffre selon les segments de solutions concernées - mais qu'il ne croit pas pour autant à une cannibalisation de ce type d'offres par rapport à celles reposant sur un modèle traditionnel on-premise. « Je ne suis pas sur un modèle aussi dogmatique que d'autres sur du 100% cloud. Si on organise l'entreprise seulement autour du cloud, on perd des compétences que ne le sont pas. Je pencher plus sur un modèle reposant dans 10 ans sur de l'achat de services avec une facturation à l'usage », a précisé le directeur général.

« SAP dispose d'un portefeuille de solutions extrêmement large dont le moteur central est l'ERP constitué autour de l'Intelligence Enterprise regroupant un ensemble d'acquisitions que l'on est allé chercher dans le best of breed comme Concur, Success Factors, Aruba et Hybris », a par ailleurs expliqué Gérald Karsenti. « Cet ensemble repose sur un socle technologique en IA, machine learning, IoT et blockchain que l'on injecte dans les projets clients en fonction de leurs besoins ». Outre un large portefeuille de solutions, la 5e filiale de SAP au niveau mondial en termes de chiffre d'affaires mise également pour accélérer son business sur quelques points différenciants clés. « Nous avons des labs à Paris, Mougins, Sofia et Caen, un accélérateur à start-ups qui sera mis en place en septembre et allons continuer à racheter et investir dans des sociétés comme Recast et Andjaro [par ailleurs également accéléré par Oracle, NDLR] », poursuit Gérald Karsenti. Avec plus de 850 personnes en France dans sa R&D, SAP a accéléré depuis le début de l'année ses investissements dans le pays, avec comme point d'orgue l'annonce par son CEO Bill McDermott d'y injecter 2 milliards d'euros, sans que l'on sache - même en insistant auprès du directeur général France - les modalités précises de ce financement.

Serein sur ses relations avec l'USF

Interrogé sur la polémique autour de la facturation des accès indirects, Gérald Karsenti souhaite aborder sereinement le sujet très prochainement (ce jeudi) avec le nouveau président de l'USF, Gianmaria Perancin élu en mars dernier. « Je considère depuis toujours que l'on ne fait pas de business par la pression. Je ne veux pas laisser l'impression que SAP utilise les audits pour faire du business. On a changé le système de tarification en facturant les accès indirects au document créé et non pas consulté, ce qui se base pour nous sur un modèle de fair use », a expliqué Gérald Karsenti.