La carrière de Mary McDowell a été marquée par de nombreux évènements déterminants, comme son long passage chez Compaq, à l'époque de son essor puis du rachat de Digital (avant d’être repris par HP) ou les turbulences de Nokia après la sortie de l’iPhone, ou encore la supervision de la vente de Polycom, pour ne citer que ceux-là. Mais, clairement, elle n'a rien connu de comparable en 2020, si ce n’est que la pandémie a mis à mal le fonctionnement normal de toutes les activités. Cependant, le Covid a été également un vecteur d’opportunités commerciales, comme peuvent en témoigner des entreprises de services à domicile telles qu’Amazon, Deliveroo et Peloton. Mais c’est surtout la virtualisation rapide des communications qui a fortement marqué la crise. Et certaines de ces communications sont probablement passées par Mitel, le vétéran du réseau canadien. De l’avis de Mme McDowell, la ligne de produits de communications unifiées MiVoice MX-ONE de Mitel fait partie de ces « héros méconnus », après « un été plein d'incertitudes », soit six mois à peine après sa prise de fonction. Mitel s'est développée grâce à des acquisitions et Mary McDowell, plus que familière de la question, a été amenée à donner de la cohérence à ces actifs disparates. « Je suis venue pour relier ces actifs ensemble », avait-elle déclaré par téléphone à la fin de l'année 2020.

Un choix de stratégie non dominant

Une tactique évidente, qui aura convenu à tous, aurait pu consister à tout mettre dans le cloud, dans l'espoir que 2021 accélère définitivement la migration de l’IT hors site. Mais Mme McDowell affirme que « chaque semaine un tas d’éléments plaide à nouveau en faveur des opérations sur site... Mais cette tendance ne fait pas les gros titres ». « D’autant plus que personne ne sait vraiment comment la situation va évoluer », a-t-elle déclaré avec une admirable honnêteté. Depuis notre discussion, les choses ne se sont pas beaucoup éclaircies, à l'exception du fait que nous aspirons tous à un avenir plus radieux après la vaccination. J’ai donc demandé à Mme McDowell, pourquoi, étant donné la concurrence intense dans le secteur des communications et après avoir supervisé la vente du géant de la vidéoconférence Polycom à Plantronics, elle s’était retrouvée chez Mitel. En réponse de quoi elle a déclaré qu'elle avait bien aimé l’image de la marque, son solide réseau de revendeurs et son modèle de partenariat qui lui avait permis de se lier avec des entreprises comme BT, Google, Amazon et d'autres.

D'autres acquisitions en cours ?

« J'ai appris que l'on ne dit jamais, jamais, dans le cas des technologies », a-t-elle ajouté, mais elle souligne que l'intégration est le maître mot à court terme. Il est probable que demain, l’entreprise canadienne qui produit des téléphones numériques et IP, dépendra plus du cloud que des téléphones, mais qu’elle aura aussi une capacité à se débrouiller dans les marchés sous-jacents malgré ce contexte d'incertitude économique. Quelle que soit la rapidité avec laquelle le marché adopte le cloud, Mme McDowell pense qu'une grande partie de l'attrait de ce modèle ne réside pas dans les spécifications techniques, mais dans la capacité à ajouter et à soustraire des capacités. Il est donc nécessaire de faire en sorte que ce modèle d'utilité soit disponible pour un plus grand nombre de produits et de services. « La transition vers un modèle par abonnement est probablement la chose la plus importante, même sur site », a expliqué Mme McDowell. La vague du Covid « a soulevé tous les bateaux… la voix, la vidéo et le chat n'ont jamais été aussi demandés », a encore expliqué Mary McDowell. « La concurrence est « féroce », c'est la raison pour laquelle je milite pour les bons produits. C'est le fondement de toute entreprise technologique : accroître la R&D, développer les solutions cloud, approfondir les partenariats ».

L’empreinte de Compaq

Tous ces principes ont été appliqués chez Compaq, une entreprise où Mary McDowell a travaillé au début de sa carrière et où elle a gagné ses premiers galons. Á l’époque, l’entreprise texane avait prouvé qu'il y avait de la place pour une marque de PC haut de gamme autre qu’IBM. Elle y est restée 17 ans, pour en partir en 2003, peu après le rachat de Compaq par HP. « Compaq était une entreprise pionnière », a-t-elle déclaré. « Ma conviction que de bons produits permettent de se différencier sur le marché vient de là. On peut débattre d’un tas de choses, mais si l’on fait en sorte de remplir certaines conditions on peut arriver à de bons résultats. Rod Canion (le légendaire co-fondateur de Compaq) avait cette culture du consensus… J'étais un produit de cette culture ». Beaucoup plus tard, alors qu’elle était en poste chez Polycom (2016-2018), elle a déclaré : « J'étais prête à tenter ma chance comme CEO ». C’est là, croit-elle, qu’elle a appris comment faire un bon cocktail. « On peut faire de bonnes choses avec un bon mix de personnes, par exemple en associant quelques vétérans avec des gens à l’affût de promotions », se souvient-elle. « Je suis fortement convaincue par la nécessité d’avoir des stratégies ambitieuses et simples à appliquer ».