Suite à la victoire d'Epic Games contre Google, Apple pourrait envisager d'ouvrir une partie de sa technologie NFC servant au paiement mobile Apple Pay à ses concurrents. Le fabricant de l'iPhone a décidé de faire cette offre plutôt que d’avoir à répondre à une injonction réglementaire ou de se voir infliger une lourde amende.

De la NFC pour les autres

L’an dernier, la Commission européenne avait accusé Apple de concurrence déloyale parce qu'elle empêchait d'autres entreprises de paiement mobile d'utiliser la puce NFC (Near Field Communications) de l'iPhone pour leurs propres services. Cette décision faisait suite à une enquête similaire du Bureau de protection des consommateurs en matière financière (Consumer Financial Protection Bureau, CFPB), une agence américaine qui scrute aussi de près les activités d'Apple dans le domaine des paiements mobiles. À la suite d'une série de conclusions défavorables de l'Union européenne, Apple espère manifestement que cette initiative réglera les accusations d'infraction à la législation antitrust et d'éviter une lourde amende.

Les autorités de régulation de l'UE vont désormais examiner l'offre et s'entretenir avec les concurrents et les clients afin de décider si Apple est allée assez loin ou si des mesures supplémentaires sont nécessaires et s'il convient d'engager des poursuites pour infraction à la législation antitrust. Apple Pay est devenu populaire en Europe. Le système de la firme est pris en charge par plus de 2 500 banques, la majorité des commerçants et de nombreuses banques concurrentes. L'une des raisons de la popularité du service, c’est qu'Apple Pay est effectivement le seul système de paiement mobile pris en charge par l'iPhone.

Un changement d’approche

Pour défendre cette position, Apple a mis en avant beaucoup d’arguments. Mais la décision d'ouvrir les paiements au secteur du retail avec Tap To Pay (un service qui permet aux commerçants  d'utiliser des systèmes de paiement et des applications de services tiers, ainsi que la puce NFC embarquée) montre qu'il est possible d'ouvrir cette partie de l'écosystème. Cette situation et l'intensité croissante de la réglementation sur tous les prés carrés dorés des grandes entreprises IT signifient qu'Apple sait qu'elle doit changer d’approche pour certains aspects de son activité. Rien ne sert de résister à l'inévitable. Mieux vaut identifier des moyens constructifs de s'engager dans la transformation afin d'exploiter ces vents du changement.

Les avantages sont peut-être un peu difficiles à trouver, mais l'un des atouts d'Apple se situe généralement dans la conception de l'interface utilisateur. Et tout comme l'Apple Card a révélé un réel désir des clients pour une meilleure interface utilisateur, Apple utilisera ses avantages pour s'assurer que les services Pay et Wallet restent les meilleures alternatives pour la plupart des gens. L'utilisation de la NFC fait partie de la bataille, mais la sécurisation du processus et la création d'une bonne expérience client resteront le Saint Graal des paiements mobiles, même après qu'Apple aura cédé ce terrain.

S'ouvrir à l'UE

Ces revendications concernant le NFC dans l'iPhone doivent être prises en compte parallèlement à d'autres changements que l'entreprise est censée apporter à ses services (sous réserve d'un appel). Dans l'UE, l'une d'entre elles consiste à s'ouvrir aux fournisseurs de paiement tiers et aux alternatives aux App Stores de la société américaine. L'entreprise doit également faire face à un litige avec Spotify, qui estime que la commission d'Apple sur les achats in-app limite la concurrence avec Apple Music sur les Mac, les iPhone et les iPad. Cependant, à l'instar de nombreuses plaintes relatives à la « taxe Apple », tout détaillant est en droit de demander une contrepartie pour l'ouverture d'un marché aux produits, et une certaine augmentation des ventes. La seule véritable négociation porte sur le montant qu'il est raisonnable de facturer pour ces ventes et savoir dans quelle mesure la réduction de la rentabilité peut nuire à l'expérience des clients existants. De nombreux chapitres de cette histoire restent à écrire.

L'erreur d'Elizabeth Warren sur iMessage

La controverse sur iMessage continue aussi d'attirer l'attention cette semaine, suite au message de la sénatrice américaine Elizabeth Warren (D-MA) accusant Apple « d’empêcher, par cupidité, les utilisateurs d'Android d'envoyer des messages aux utilisateurs d'iPhone de manière sécurisée ». Un avis sur le service de messagerie d'Apple jugé erroné. Suivant les traces de Nothing, la start-up de messagerie Beeper a choisi de faire de la rétro-ingeniérie pour s'introduire dans l'écosystème Apple. Selon l’entreprise californienne, « elle aurait exploité de « fausses informations d'identification » pour accéder à iMessage ».

Et sa solution au problème des bulles vertes et bleues a été d'obliger les utilisateurs à partager leur identifiant Apple avec un système tiers qui, inévitablement, offrait moins de sécurité aux utilisateurs que celle promise par Cupertino. C'est en partie pour cette raison qu'Apple a bloqué l’accès de l’app Android à iMessage. L'idée d'interopérabilité est une chose, mais l'approche doit être basée sur des normes et hautement sécurisée.

Apple, cible antitrust idéale

Cependant, la controverse autour d’iMessage montre à quel point Apple est devenue la cible antitrust préférée de tous les experts et régulateurs. Une fois que ce chapitre autour de la croissance de l'entreprise sera clos, beaucoup d’obstacles tomberont. Il faudra peut-être regarder de plus près les documents relatifs à la sécurité et à la vie privée chaque fois qu’on utilisera un système de paiement ou une boutique d'applications. Bien évidemment, Apple est tout à fait capable de se réinventer pour s'adapter à une nouvelle réalité et cela ne devrait pas impacter son business à l'avenir.