L'annonce a sonné comme un coup de tonnerre. Iliad, maison-mère de Free, a proposé 15 milliards de dollars (soit près de 11,2 milliards d'euros) pour mettre la main sur 56,6% du capital de T-Mobile US, quatrième plus grand opérateur télécoms aux Etats-Unis avec près de 45 millions de clients, derrière Sprint, Verizon et AT&T, le colosse du marché. Une opération d'ailleurs confirmée par Xavier Niel, PDG de Free (8 millions d'abonnés), qui voit là une excellente occasion de positionner son entreprise sur un marché où il était jusqu'alors totalement absent : les Etats-Unis. 

Oui mais voilà, plusieurs grains de sable pourraient venir enrayer la mécanique de l'opération imaginée par Iliad. Tout d'abord, le groupe français n'est pas le seul prétendant au rachat de T-Mobile US. Ainsi, le troisième opérateur, Sprint, est également entré en discussions avec T-Mobile US depuis plusieurs mois. Et si les lois anti-concentration américaines pourraient jouer en faveur de l'opérateur français face à Sprint, il n'en reste pas moins qu'Iliad n'est valorisé qu'à 12 milliards d'euros. Une valeur conséquente, certes, mais bien en-deça de celle de T-Mobile US qui s'élève à près de 18,5 milliards d'euros (25 milliards de dollars). Et pour de telles acquisitions, rares sont les David à avaler les Goliath.

Ensuite, sur les modalités du rachat en lui-même, les doutes sont permis quant à la crédibilité d'une telle offre. En effet, Iliad propose de mettre sur la table plus de 11 milliards d'euros, en numéraire, combinant fonds propres et dette. Le hic ? Le montant des fonds propres apportés serait « seulement » de 2 milliards d'euros contre une dette qui pourrait représenter une somme abyssale de plus de 9 milliards d'euros. Il se murmure qu'Iliad bénéficierait du soutien de plusieurs établissements bancaires pour le soutenir dans cette opération, à savoir BNP Paribas et HSBC, selon Reuters.

La proposition de rachat de T-Mobile US par Iliad sanctionnée en Bourse

Quoi qu'il en soit, l'offre proposée par Iliad apparaît bien inférieure à celle que proposerait Sprint (près de 32 milliards de dollars). Pas sûr dans ces conditions que les actionnaires de T-Mobile US, dont Deutsche Telecom qui possède à ce jour 67% de l'opérateur américain, se jettent à corps perdu dans les bras d'Iliad. « Nous sommes sceptiques que T-Mobile et ses actionnaires, incluant Deutsche Telecom, vont trouver cette offre attractive », ont indiqué les analystes de Credit Suisse au Wall Street Journal. « Cette proposition pourrait mettre la pression sur Sprint pour bouger plus rapidement que prévu. »

La proposition de rachat de T-Mobile US par Iliad a aussi été mal accueillie par le marché. A Paris, l'action de l'opérateur français s'est ainsi offert une frayeur en dévissant en début de séance ce matin jusqu'à plus de 10%. Ce qui n'a pas empêché Fleur Pellerin, ex-première dame du Numérique, de se satisfaire dans un tweet de cette opération : « Bravo à Xavier Niel qui incarne l'esprit de conquête dont nous avons besoin ! ». Outre-Atlantique, l'annonce du français a été accueuillie de façon plus contrastée, avec une hausse de 6,5% de l'action T-Mobile US à Wall Steet tandis que dans le même temps, celle de Sprint a reculé de 5.3%.

Cette annonce surprise de l'acquisition de T-Mobile US par Iliad, intervient quelques semaines après l'échec des négociations de ce dernier pour racheter Bouygues Telecom. La maison mère de Free aurait-elle si besoin de brûler son cash en ce moment alors qu'elle investit déjà des sommes astronomiques dans ses infrastructures 4G ? En tout cas, si une telle opération réussissait, Iliad signerait là la plus grosse acquisition depuis sa création, loin devant celle d'Alice en 2008 pour 750 millions d'euros.