Les produits et plates-formes d'Apple ont été de bons facteurs de changement dans l'entreprise, mais la firme a toujours peu de temps à consacrer aux responsables informatiques, sauf s’ils peuvent s’engager sur l'achat de très gros volumes d’iPad ou d'autres terminaux de la marque. D’après un groupe de responsables IT invités à témoigner à la Conférence MacIT 2015, du 14 au 16 juillet à Santa Clara, en terme de support sur les produits Apple, les entreprises sont globalement livrées à elles-mêmes. Tous les DSI espèrent qu’Apple sera plus à l’écoute des besoins des petites et moyennes entreprises… mais plus personne n’attend de vrai changement.

Aaron Gette, DSI du Bay Club, un club de remise en forme et de gestion du mode de vie, dit qu'il n'a jamais attendu qu’Apple lui apporte le niveau de support direct que les professionnels de l'informatique reçoivent habituellement de la part de vendeurs IT traditionnels. Selon Aaron Gette, pour avoir de bonnes relations avec Apple, les DSI ont deux solutions. « Il faut soit appartenir à la division des ventes de l'entreprise, à laquelle la firme peut vendre 10 000 iPad, soit s’appuyer sur l'équipe commerciale dédiée à l'entreprise qui se trouve dans les Apple Store ». Aaron Gette a misé exclusivement sur cette dernière option.

L’offre d'Apple pour l'entreprise

La mentalité du « à prendre ou à laisser » semble prédominer sur les produits d’Apple pour l'entreprise. Et si les DSI peuvent parfois résoudre des problèmes techniques avec un Apple Store, le processus prend du temps. Les échanges de courriels et les appels téléphoniques n’offrent tout simplement pas le niveau de support dont ont besoin la plupart des professionnels de l'informatique. Ces dernières années, Apple a bien fait quelques efforts pour répondre aux besoins de l'entreprise, y compris en proposant des programmes comme le Device Enrollment Program qui facilite le déploiement d’appareils iOS dans l’entreprise et le programme d'achats en volume qui simplifie la recherche, l'achat et la distribution d'apps iOS et Mac. Mais la promesse d'alliances autrefois inimaginables avec des entreprises comme IBM ne se concrétise pas pour la majorité des DSI.

Pour Debra Jensen, DSI de la chaîne de vente de vêtements au détail Charlotte Russe, chaque fois qu’elle reçoit un message publicitaire d’Apple, elle a l’impression d’avoir gagné à la loterie. « Au lieu d'être invitée à la présentation, j’ai été « nominée » pour y assister », raconte-t-elle. Debra Jensen n’est pas allée au briefing, non pas à cause de la manière dont Apple l’a approchée, mais parce que Charlotte Russe n’achètera jamais suffisamment de produits Apple pour être considérée comme un client important.

Un rapport distant à l'entreprise 

« Le point de vue des DSI sur le matériel Apple est en train de changer, même s’ils savent qu’ils ne pourront pas recevoir le support attendu de la part d’Apple », estime pour sa part Stuart Appley, DSI de la société immobilière Shorenstein. Il ne veut plus faire partie de ces entreprises qui disent non aux utilisateurs qui veulent des produits Apple au travail, et il a renforcé son propre personnel informatique pour ne pas être pris au dépourvu. « Apple ne s’est jamais, au moins jusqu'à récemment, intéressé à l’entreprise », a-t-il déclaré. « La firme de Cupertino est entièrement et, en priorité, tournée vers les consommateurs ».

Aucun des changements récents apportés par Apple dans l'entreprise n’a été dicté par la nécessité. À peu près tout ce que fait la firme de Cupertino pour les PME et leurs employés passe par les appareils, les applications et les plates-formes qui les alimentent. L’entreprise californienne n'a tout simplement pas besoin de s’octroyer directement les bonnes grâces des DSI, et elle le sait. « Elle met à la disposition des personnels informatiques des informations de support facilement accessibles, généralement en libre-service, qui leur permettent de comprendre et de suivre l'ensemble du processus, depuis l'approvisionnement jusqu’au déploiement et à la gestion », explique Debra Jensen. « Apple est tellement habitué à traiter avec les consommateurs, qu’elle ne se soucie pas de l'entreprise, parce qu'elle n’en a pas besoin », a-t-elle ajouté. « Elle pense que la demande des consommateurs qui travaillent dans l’entreprise va être si forte qu’elle finira par l’emporter ». Selon la DSI de Charlotte Russe, les départements informatiques veulent comprendre comment travailler avec Apple pour faire en sorte que ses appareils s’intègrent dans leurs environnements existants. « Vous attendez de ce genre d’entreprises qu’elles vous aident », a-t-elle ajouté. « Si Apple veut que ses terminaux entrent dans votre environnement, elle doit vous aider, écouter, et comprendre ce qu’il y a autour pour que ça fonctionne ».

La politique de la chaise vide 

Malheureusement, la société à la pomme ne joue pas ce jeu. Quand la firme de Cupertino a mis fin à son serveur d'entreprise Xserve, fin 2010, « c’était une façon de dire au monde qu’elle ne se souciait plus de l'entreprise », explique pour sa part Aaron Gette. « Apple pourrait concevoir davantage de produits matériels ou de services dédiés à l'entreprise afin de construire des relations avec le monde des affaires, mais dans la plupart des cas, elle ne s’en soucie tout simplement pas », a ajouté le DSI du Bay Club. Cinq ans après l’arrivée des premiers iPad dans l’entreprise par le biais des utilisateurs, peu de choses ont changé pour les DSI disposés à soutenir les appareils Mac et iOS, du moins du côté d'Apple. Ceux qui ne peuvent pas se permettre d’acheter ou qui n’ont tout simplement pas besoin de 10 000 iPad, aimeraient que leurs relations avec Apple se passent davantage dans un esprit de partenariat. Mais la réalité est qu'il y a peu de chances que cela se produise de sitôt.