Opération rétropédalage pour SFR. Après avoir annoncé en juillet dernier un étonnant projet de procéder à la couverture en fibre optique de 80% de la France d'ici à 2020, le secrétaire général du groupe, Régis Turini, a eu la délicate tâche de faire machine arrière toute. « Force est de constater que nous n'avons pas su créer les conditions nécessaires pour remporter l'adhésion du plus grand nombre et surtout des collectivités locales », a expliqué Régis Turini.

Les voix ont en effet été nombreuses à s'élever contre le projet de SFR depuis le début. Cela a été, en particulier, le cas de Patrick Chaize, sénateur de l'Aisne et président de l'association des villes et collectivités pour les communications électroniques et de l'audiovisuel. « Je continue à penser que cela n'a jamais été une option sérieuse », a indiqué Patrick Chaize. « SFR a tenté de secouer le prunier [...] Ils ont réveillé l'écosystème et fait en sorte que des questions se posent. Mais je ne crois pas une seule seconde qu'ils avaient vraiment l'intention d'investir 25 milliards et d'aller irriguer l'ensemble du territoire national. »

Les réseaux, pas une marchandise comme les autres

Outre les collectivités locales, qui pouvaient légitimement craindre que le projet de fibre de SFR vienne perturber les initiatives de déploiement en cours et casser leur retour sur investissement, l'Arcep est également montée au créneau. « Les réseaux de communication ne sont pas une marchandise comme les autres [...] La volonté d'investir affichée par SFR est une bonne nouvelle, mais il faut veiller à ce que cette offre s'insère harmonieusement avec le reste. Car on ne part pas d'une feuille blanche et d'autres acteurs se sont organisés depuis 2011. Notre position à l'égard de SFR est donc d'être fermes mais pas fermés. Dans les territoires, des pratiques de "débauchage" déstabilisent l'ensemble constitué par des porteurs de projets publics. Ce n'est pas acceptable », a expliqué le président de l'Arcep, Sébastien Soriano.

Outre les critiques émanant des élus, des collectivités locales et de l'autorité de régulation des télécoms, le projet de SFR de fibrer la France a aussi pâti de l'éviction de Michel Paulin et de Michel Combes, respectivement directeur général et PDG de l'opérateur télécom, qui l'avaient porté à bout de bras. Mais le coup fatal est sans aucun doute venu du marché, qui a très lourdement sanctionné la stratégie du groupe en laminant son cours de bourse ce qui a conduit le groupe de Patrick Drahi à céder en urgence des actifs. Pas sûr en effet que le fait d'investir des milliards dans un réseau privé de fibre qui n'aurait été soutenu par personne aurait vraiment rassuré les actionnaires sur l'avenir du groupe.